LITTÉRATURE et le livre de Frédéric Beigbeder
★★★★ Le Patio bleu, de Denis Tillinac,
Les Presses de la Cité, 310 p., 20 €.
Au patio bleu, dans la cour d’un hôtel du XVIIIe de la ville de Condom, dans le Gers, ils sont quelques-uns à se retrouver : quinquagénaires ou sexagénaires, encombrés d’enfants ou de petits-enfants. Cette petite bande de Parisiens en rupture de ban, fédérée au hasard d’apéros en déjeuners de soleil, fait mine de croire à une seconde chance dans une province faussement préservée. Ils ont des projets, se séparent, tombent amoureux. Autour de ces « témoins désuets d’une Atlantide engloutie », la France périphérique gronde via les « gilets jaunes ». Ailleurs, le chaos et les attentats se rapprochent. Leur monde d’avant n’a pas que peu d’avenir face à la modernité numérique qui vient. Le narrateur, un diplomate ayant roulé sa bosse à travers la planète, rêve de se replier non loin du patio bleu et de Marie-Anne à laquelle le lie une amitié vieille de plusieurs décennies et plus forte que d’éphémères étreintes.
Il y a dans Le Patio bleu, roman posthume de Denis Tillinac, des maisons de famille que l’on vend car il n’y a plus de famille, des fantômes, des accidents de voiture, des enterrements, des coucheries, des regrets, des secrets, des souvenirs, des aveux chuchotés, un sentiment d’inachèvement. Une mélancolie sourde parcourt ce roman d’automne et de toutes les saisons qui évoque « une tragi-comédie, un film de Sautet ». Frondeur et nostalgique, Tillinac nous offre une espérance qui défie le temps.