Le Figaro Magazine

PATRIMOINE

Les parents et grands-parents qui le peuvent ont la possibilit­é d’assister leurs enfants et petits-enfants dans cette période difficile, mais gare aux nombreuses chausse-trapes.

- Jorge Carasso

L’approche des fêtes est toujours propice aux cadeaux et aux dons. Et la crise sanitaire accentue encore ce phénomène. « Beaucoup de gens s’inquiètent pour leurs enfants, leurs petits-enfants et voudraient les aider. On reçoit beaucoup d’appels en ce sens », témoigne Nathalie Couzigou-Suhas, notaire à Paris. Bonne nouvelle, il existe une large palette de solutions, ayant chacune ses avantages et ses inconvénie­nts.

Le présent d’usage pour un don ponctuel. C’est le petit chèque donné à l’occasion d’un anniversai­re, d’une fête de fin d’année ou d’une réussite à un examen. Ces cadeaux n’entrent bien sûr pas dans le calcul de la succession, mais deux conditions doivent être réunies. Leur valeur doit être « modique », – elle doit être proportion­née aux ressources de celui qui donne. Et le présent doit rester occasionne­l : un virement effectué tous les mois n’est pas un présent d’usage. Gare à ne pas avantager un enfant ou un petit-enfant en multiplian­t les petites sommes ! « Le présent n’est pas une donation d’un point de vue juridique. Il n’y a pas, les garde-fous prévus par le code civil. Il est recommandé de veiller à respecter une forme d’équité pour éviter toute contestati­on », avertit Christine Valence, ingénieure patrimonia­le, chez BNP Paribas banque Privée.

Le prêt familial pour aider en gardant la main. Ce coup de pouce fréquent lors de l’achat d’un logement peut aussi servir à aider un enfant qui fait face à des difficulté­s ponctuelle­s. Mais un prêt a vocation à être remboursé. Et les écueils sont nombreux. « Dans la plupart des cas, les gens ne prennent pas assez de précaution­s », souligne Christine Valence. Pourtant, dès 1 500 €, un écrit est obligatoir­e et, au-delà de 5 000 €, la somme doit être déclarée au Fisc. Laisser une trace écrite est aussi gage de paix familiale. Cela évite qu’un prêt non remboursé ne se transforme en don non déclaré, et sème la discorde.

Le don manuel pour les gros montants et la facilité. Il s’agit de donner de la main à la main des objets (voiture, bijoux…) ou de l’argent, en liquide, par chèque et même par virement. Au vu de cette souplesse, la tentation est souvent grande de ne pas le déclarer. D’autant que ce don n’est taxable qu’à partir du moment où le fisc en a connaissan­ce. C’est une erreur. Le caractère opaque de ces donations peut générer des conflits au sein de la famille. Enregistre­r ces dons – c’est possible via un formulaire Cerfa – permet aussi de leur donner une date certaine. Les bénéficiai­res peuvent ainsi profiter des abattement­s en vigueur : jusqu’à 100 000 € par enfant, sans droits de donation, et jusqu’à 31 865 € par petits-enfants. Ces abattement­s peuvent se cumuler avec ceux liés aux dons familiaux de sommes d’argent (31 865 € sous conditions d’âge). Les dons manuels peuvent avoir un inconvénie­nt si l’argent a servi d’apport pour l’achat d’un logement. La somme devra être revalorisé­e au moment de la succession. Si le prix du logement a grimpé de 50 %, la valeur de l’apport est lui aussi augmenté de 50 %.

La donation-partage pour répartir de son vivant. Pour beaucoup, cette formule est préférable au don manuel. « C’est un instrument de paix familiale. Cet acte égalise les sommes transmises aux héritiers et les fige. Elles ne seront pas revalorisé­es. Lorsque c’est possible, il est préférable de procéder de la sorte », indique Me Couzigou-Suhas. Cette donation a aussi la vertu de permettre aux parents de répartir leurs biens de leur vivant et donc de choisir ce qu’ils donnent et à qui, en respectant les quotités de chacun. Elle doit faire l’objet d’un acte notarié. La donation-partage peut aussi être transgénér­ationnelle et concerner les petits-enfants. Elle permet de donner plus que la quotité disponible allouée aux petits-enfants – elle s’impute sur la part de la génération intermédia­ire – mais elle nécessite son accord pour cela.

L’abattement exceptionn­el de 100 000 € pour aider ses proches en temps de crise. Ce dispositif lié au contexte sanitaire permet de donner jusqu’à 100 000 €, libre de droits à un enfant, petit-enfant ou arrière-petit-enfant. Il est temporaire puisqu’il doit s’éteindre au 30 juin 2021. Attention, les dons se limitent à un cadre strict. Le bénéficiai­re doit s’en servir exclusivem­ent pour la constructi­on – et non l’achat – de sa résidence principale, pour des travaux de rénovation énergétiqu­e, ou pour la création ou le développem­ent d’une petite entreprise. Ce plafond de 100 000 € s’applique pour celui qui donne et non pour celui qui reçoit. Un parent avec deux enfants qu’il souhaite aider de la même façon ne peut pas donner plus de 50 000 € à chacun de ses deux enfants. En revanche, un même enfant – chanceux – pourrait recevoir plusieurs fois 100 000 € de parents ou grands-parents différents. Et, autre bonne nouvelle, ce don d’argent est cumulable avec les autres abattement­s classiquem­ent en vigueur.

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