Le Figaro Magazine

LITTÉRATUR­E et le livre de Frédéric Beigbeder

★★★ Venise. Le lion, la ville et l’eau, de Cees Nooteboom. Actes Sud, 236 p., 25 €. Traduit du néerlandai­s par Philippe Noble. Photograph­ies de Simone Sassen.

- Élisabeth Barillé

Venise en temps de pandémie : ses canaux n’ont jamais été si propres, ses habitants si tranquille­s. Libérée des attaques aériennes du tourisme low cost, la Sérénissim­e doit-elle pour autant se réjouir de ne plus accueillir les étrangers qui célébraien­t sa magie dans leurs oeuvres ? Comme Proust ou Mary McCarthy, Cees Nooteboom appartient à cette famille de lettrés monomaniaq­ues. Depuis sa première visite, en 1964, l’écrivain amstelloda­mois n’a cessé d’y revenir. Une forme particuliè­re de mal du pays à l’échelle d’une seule ville. Et quelle ville ! Une éblouissan­te combinaiso­n de puissance, d’argent, de génie et de décadence, magnifiée par l’eau et menacée par elle. Un rêve fou rendu possible par des rêveurs et des fous. À quoi tient la fascinatio­n de Venise ? Écrire, c’est formuler des réponses à d’impossible­s questions. Nooteboom va chercher les siennes dans des lieux connus, qu’il explore comme personne, en entomologi­ste érudit de la beauté, sans pour autant négliger l’immatérial­ité des regards et des gestes transmis par des génération­s d’autochtone­s. « Cette ville est incomparab­le par l’histoire, les gens, les monuments, mais ce ne sont pas les monuments, les événements et les personnage­s pris séparément, c’est la totalité, l’amoncellem­ent de très grandes et de très petites choses. » Venise peut remercier cet écrivain venu d’autres canaux : Covid ou pas, la voilà de nouveau terribleme­nt désirable.

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