LA CHRONIQUE de François d’Orcival
Il est possible d’acheter français, en ligne, et donc à toute heure. Deux villes, Angers et Nice, s’y sont mises. Résultats garantis.
Les magasins licencient, internet recrute, comment les petits commerçants peuvent-ils résister ? Le confinement du printemps et celui de l’automne ont accéléré les réflexions sur le sujet. D’abord pour ne pas mourir, ensuite pour grandir et se développer.
Fille d’un entrepreneur de l’immobilier, Charlotte Journo-Baur, 30 ans, créatrice de la société Wishibam à Paris, s’est demandé comment elle pouvait répondre à ce défi. Elle a monté un projet adressé à des chambres de commerce et à des municipalités qu’elle jugeait susceptibles d’y adhérer. Son idée était bouclée avant la crise sanitaire. Celle-ci a tout accéléré. Deux villes ont été les premières à lui répondre : Angers, puis Nice. Pourquoi Angers ? Parce que son maire, l’ancien sénateur Christophe Béchu, ami d’Édouard Philippe, avait déjà mis au point un plan de « smart city » pour sa ville (150 000 habitants), en ayant fait approuver un investissement de
120 millions sur douze ans pour rendre son commerce de plus en plus « intelligent ». Il saisit aussitôt l’idée du site internet marchand lancé par Wishibam et qui devient chez lui Angersshopping.com.
Ce site ouvre cinq semaines après le début du confinement, le 20 avril dernier. 150 boutiques de la ville le rejoignent. Sur le thème : achetez français, achetez chez vous. Le magasin est fermé ? Commandez en ligne de jour comme de nuit. « Le retour est direct, dit Christophe Béchu. Ça soulage le chiffre d’affaires en temps de fermeture, ça le complète quand la boutique peut rouvrir, à mesure que le site gagne en audience. »
Nice, qui compte plus de deux fois plus d’habitants qu’Angers (340 000), ouvre son propre site de e-shopping au mois de juin. Le maire de la ville, Christian Estrosi, est un ami de son collègue angevin.
« Nous ne voulons pas voir les commerces perdre leurs clients et fermer, nous sommes là pour qu’ils retrouvent leurs clients, en ligne ou sur place »,
dit Wishibam. Le Mans, Antibes et d’autres villes étudient la même promesse. Le 24 août, le ministère des Finances consacrait une note au e-commerce : il indiquait que 192 000 sites marchands avaient généré l’an dernier un chiffre d’affaires de 103,4 milliards d’euros. Qu’en sera-t-il cette année ? On affirmait la semaine dernière que les ventes sur internet avaient augmenté de 50 %. Et l’on a vu La Poste annoncer qu’elle allait traiter 30 % de colis supplémentaires
– un « volume jamais atteint », dit-elle. Elle vient de lancer le recrutement de 9 000 jeunes gens en CDD pour gérer la hausse de ce trafic.