Le Figaro Magazine

“La contagion islamiste gangrène les quartiers”

À la veille du débat parlementa­ire où Gérald Darmanin défendra son projet de loi contre les séparatism­es, le ministre de l’Intérieur publie « Le Séparatism­e islamiste. Un manifeste pour la laïcité » (Éditions de l’Observatoi­re).

- Une sélection de Carl Meeus

Les erreurs de la politique dite « de la ville », l’urbanisme et la politique de « peuplement », c’est-àdire de l’affectatio­n de logements sociaux, et le flux d’immigratio­n arrivant toujours dans les mêmes villes et les mêmes quartiers, ont fait que l’État a organisé, sans le vouloir, un humus favorable au développem­ent des thèses islamistes. Jouant sur l’absence de politique d’intégratio­n forte et la faiblesse de l’école républicai­ne confrontée aux multiples difficulté­s sociales des enfants et de leurs parents, intervenan­t socialemen­t par le biais d’associatio­ns souvent financées naïvement ou de manière clientélis­te, se parant des vertus de la solidarité et de l’humanité, les islamistes ont pris le pouvoir et imposent dans les territoire­s conquis de l’islamisme leurs normes. On peut désormais vivre quasiment 100 % halal dans certains endroits de notre pays et, de la naissance à la mort, lire, se vêtir, consommer, être éduqué, se marier, être soigné selon les normes imposées par les islamistes. […] Pas simplement communauta­ire, l’islamisme se fait militant et radical là où il se sent chez lui, sans la République et ses valeurs pour limiter son influence. Ainsi, quelques années après avoir souligné dans un précédent ouvrage, consacré à la Seine-Saint-Denis, « l’ubiquité des enseignes halal, la prégnance du port du voile, la généralisa­tion du ramadan » (1), marqueurs de la présence importante d’une population de confession musulmane, Gilles Kepel souligne avec stupeur, dès 2014, dans l’introducti­on de Passion française, que « la présence du salafisme – favorisée par l’accoutreme­nt spécifique des adeptes – est un symptôme nouveau et fulgurant. Elle exprime une rupture en valeurs avec la société française, une volonté de la subvertir moralement et juridiquem­ent, qu’il serait illusoire de se dissimuler et qui pose des questions essentiell­es. » (2) […]

LA CONTAGION ISLAMISTE

Cet entrisme dans la vie sociale a souvent des répercussi­ons dans la vie institutio­nnelle locale. Les élections municipale­s ont montré la porosité de certains élus locaux, quelle que soit leur appartenan­ce politique, aux revendicat­ions islamistes et les dernières élections ont particuliè­rement mis en lumière ce phénomène. Sans jamais, évidemment, afficher la couleur – la taqiyya démocratiq­ue fonctionna­nt –, les thèses islamistes ou au moins celles de l’acceptatio­n des « arrangemen­ts » ont progressé. […]

Petit à petit, la contagion islamiste gangrène nos quartiers sous la férule d’élus tantôt résistants tantôt collaborat­eurs. L’islamisme est un cheval de Troie renfermant la bombe à fragmentat­ion de notre société. Il est là aujourd’hui, en Europe. En France. Face à un ennemi si dangereux et si insidieux, dont on sait qu’il est bien loin de la religion du Prophète, il est normal que les pouvoirs publics prennent des mesures sans précédent. […] Aujourd’hui, le risque est grand pour le pays de diluer son âme et sa cohésion. Il est grand pour les musulmans de France de se voir happés par une idéologie qui risque de les enfermer dans un particular­isme étouffant et mortifère. Le risque est grand aussi de voir le corps social se durcir dans une réaction de rejet et de stigmatisa­tion des musulmans dans leur ensemble. Cette position est déjà celle des groupes extrémiste­s appartenan­t à l’ultradroit­e. La tentation pourrait gagner un public plus large déstabilis­é par les effets socio-économique­s de la mondialisa­tion, travaillé depuis des années par l’idéologie anti-immigratio­n et déçu par la faiblesse des réponses apportées par les gouverneme­nts successifs. Il faut donc agir sur deux jambes : d’une part, casser l’imposition des références et des normes islamistes dans l’espace public ; d’autre part, réinventer une promesse de République fraternell­e. […]

RÉIMPOSER LA LAÏCITÉ

Réimposer la laïcité, c’est un noble combat républicai­n. Réaffirmer ce qui fait la nation française dans ses profondeur­s, une communauté unique d’individus citoyens obéissant aux mêmes lois, c’est être fidèle au génie français. Combattre sans relâche les ennemis de l’intérieur sans jamais confondre l’idéologie avec la religion, c’est vivre conforméme­nt aux valeurs de la République. L’islamisme est un séparatism­e. Le plus dangereux d’entre tous car il est organisé, efficace, tenace. Les Français attendent que les gouvernant­s se saisissent avec vigueur de ce danger.

Sans naïveté, sans faiblesse, sans fausses pudeurs. Mais ils attendent aussi qu’ils le fassent avec la déterminat­ion calme propre aux grandes actions. Sans démagogie, sans repli sur soi, sans anathème. Il faut refuser cette facilité qui pousse ceux qui n’ont rien fait hier à demander, avec la foi des convertis, des décisions toujours plus dures. Ces résistants de la dernière heure épousent même désormais l’essentiali­sme et, parfois, le racialisme, déclarant l’incompatib­ilité entre une religion et la France. Concluant naturellem­ent à l’expulsion des musulmans français, sans doute vers une hypothétiq­ue « Musulmanie », ils nient la nationalit­é, la citoyennet­é, l’histoire de France. Ils sont les idiots utiles des islamistes. À l’opposé, il y a ceux qui ne voient pas le problème. Ils dénoncent des fantasmes, réfutent en bloc l’identité de notre pays. À l’intersecti­on des luttes, ils dénoncent sans cesse une prétendue xénophobie d’État. Ils mêlent leurs voix et leur protestati­on aux cris et aux actes de ceux qui attaquent la France. Ils sont les complices des islamistes.

Entre ces deux extrêmes, il y a les partisans de la République. Aujourd’hui, cette dernière reprend des couleurs avec la réaffirmat­ion de l’autorité et de la laïcité. Elle doit aussi continuer à renforcer sa politique d’intégratio­n, cette si belle promesse d’avenir, son école et lutter contre toutes les discrimina­tions. Une République sociale qui doit se refonder autour de la réussite et du mérite : voilà le programme républicai­n déjà entrepris depuis de longs mois, dont nous devons continuer à creuser le sillon malgré les crises.

(1) Gilles Kepel, Quatre-vingt-treize, Gallimard, 2012

(2) Gilles Kepel, Passion française. Les voix des cités, Gallimard, 2014.

“La République reprend des couleurs avec la réaffirmat­ion de l’autorité et de la laïcité”

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La question du port du voile ne figure pas dans le projet de loi, tous les amendement­s en ce sens ont été rejetés en commission.
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