PATRIMOINE
Depuis 2017, l’administration rémunère les tuyaux de ses informateurs, jusqu’à 1 million d’euros. Le dispositif, renforcé un peu plus chaque année, va être évalué.
Le fisc fait feu de tout bois pour traquer les contrevenants. il peut depuis l’année dernière surveiller les réseaux sociaux comme Facebook pour y déceler des anomalies, ou scruter les annonces du Boncoin ou d’eBay à la recherche d’une activité commerciale occulte. mais il peut aussi, depuis 2017, rémunérer des « aviseurs » susceptibles de lui fournir des informations. La mesure, contestée à son lancement, concernait au départ plutôt les gros poissons : elle était réservée aux faits délictueux dans le cadre d’affaires internationales. mais son champ a été élargi en 2020. Les fraudes à la tVa et les « manquements » visés par des « pénalités graves », au-delà de 100 000 euros, sont maintenant concernés. Un décret technique publié en janvier est venu à nouveau mettre un peu d’huile dans les rouages. Un rapport parlementaire sur ces sujets doit aussi être remis prochainement, en vue d’évaluer le dispositif. et peut-être de le renforcer ? « Ce dispositif, au départ expérimental et à l’impact limité, a peu à peu été élargi. Une fois que la pratique sera entrée dans les moeurs, je ne vois pas l’administration s’arrêter là », prédit Virginie Pradel, fondatrice de l’institut de recherche fiscale et économique Vauban. en 2019, un rapport parlementaire avait évalué à 90 millions d’euros l’argent récolté de 2017 à mi-2019. Les sommes en jeu sont désormais plus importantes. Fin 2019, Gérald Darmanin faisait déjà état d’un redressement de près de 340 millions d’euros. L’informateur avait été rémunéré 1 million d’euros, le tarif maximal. La prime étant proportionnelle au montant du recouvrement. L’encouragement à la délation fiscale a de quoi faire tiquer. Cependant, ce dispositif vient encadrer des pratiques qui existaient déjà de façon opaque. « La rémunération des informateurs a toujours existé ; là, il y a un cadre et une protection pour les informateurs. Ce qui peut être gênant en revanche, c’est l’encouragement non dissimulé à la dénonciation », souligne Virginie Pradel. Certains pays pratiquent la dénonciation fiscale depuis bien plus longtemps. C’est le cas des États-Unis où elle est en plein essor. La Securities and exchange Commission (SeC) a reçu plus de 6 900 signalements durant l’année fiscale 2020 (+ 31 %).
Selon Bercy, la lutte contre la fraude fiscale a permis de collecter 9 milliards d’euros en 2019 (+ 1,3 milliard d’euros par rapport à 2018). Des chiffres élevés que l’administration attribue justement à l’amélioration de ses outils d’information.