les enfants perdus
★★★ Des chrysanthèmes jaunes, de Rafael Reig, Métailié, 350 p., 22 €. Traduit de l’espagnol par Myriam Chirousse.
Pedrito Ochoa a grandi dans un orphelinat de Madrid tenu par des religieuses à l’époque du franquisme finissant. C’est d’ailleurs à la mort du Caudillo que ses grands-parents maternels adoptent le jeune garçon pour lui offrir un avenir meilleur. il abandonne ainsi ses camarades d’infortune et découvre une société plus policée, mais non moins féroce. troisième roman de rafael reig publié en France,
Des chrysanthèmes jaunes brosse à travers l’apprentissage de son héros un tableau décapant de l’espagne postfranquiste. sans jamais rompre avec ses amis de jeunesse ni avec la Vierge (une Vierge d’un genre spécial) qui lui apparaît régulièrement, Pedrito va devenir un avocat réputé, se marier avec une riche héritière et faire fortune.
La transition démocratique voit l’avènement des « personnes charmantes », une nouvelle bourgeoisie éclairée et bien-pensante. Les socialistes au pouvoir prônent l’enrichissement personnel. La bourse a remplacé les idéologies, mais la dérégulation n’est pas seulement financière. Libération des moeurs, pornographie, drogue et Movida : on tourne le dos au vieux monde. rafael reig n’épargne personne dans ce roman burlesque, cruel, insolent, baroque. en dépit de son ascension, Pedrito n’a pas cessé d’être un gamin des rues, un peu voyou et sentimental, fidèle aux siens, qui sait que
« la seule chose irrémédiable – et la seule chose véritable –, c’est l’enfance ».