LE “CARNOPHAGE”, UN ÊTRE PRÉHISTORIQUE, VOIRE A-HISTORIQUE ?
Les « poubelles de l’Histoire » sont bien pratiques. Elles permettent à tout militant de liquider ses opposants en les y jetant avec indifférence. Ainsi firent Léon Trotski avec les mencheviks, Ronald Reagan avec le marxisme-léninisme. Mais on peut mieux faire et Barbara Pompili l’a compris. En qualifiant de « débats préhistoriques » les controverses qui suivirent l’annonce de repas sans viande dans les cantines scolaires de Lyon, elle a radicalisé la disqualification de ses adversaires. Car, finir dans les « poubelles de l’Histoire » signifie au moins qu’on est entré dans celles-ci. Ce qui est bien moins dégradant que de se trouver relégué dans les ténèbres infra-humaines de l’âge de pierre. Si l’on suppose que l’entrée dans l’Histoire et l’entrée dans l’Humanité sont une seule et même chose et que tout « carnophage » est une créature préhistorique, alors il ne peut être au mieux qu’une simple préfiguration embryonnaire du civilisé, au pire un visage de l’inhumanité. L’emploi du terme
« préhistorique » par la ministre de la Transition écologique est donc tout sauf une coquetterie ou une maladresse sémantique. Il exprime clairement une volonté idéologique d’imposer son calendrier à l’espèce humaine. De redéfinir l’Histoire en lui donnant un sens déduit de ses valeurs propres. À démoniser la viande et ses amateurs, à sanctifier le légume et ses adorateurs.