Le Figaro Magazine

JEAN-CHRISTOPHE RUFIN

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Un médecin vaut plusieurs hommes », écrivait Homère dans L’Iliade. Jean-Christophe Rufin l’a si bien retenu que son CV retraçant ses carrières de neurologue, écrivain et diplomate, ressemble à une carte des flux migratoire­s. Mais s’il avait suivi les pas de son grandpère, héritier des Aphorismes d’Hippocrate, qui avait soigné des combattant­s lors de la Première Guerre mondiale avant de cacher des Résistants pendant la Seconde, c’est parce que la médecine était encore dotée d’une dimension technique, sociale… et littéraire. « Le grand homme à suivre était Georges Clemenceau, médecin mais aussi orateur de taille », se souvient-il.

Porté par l’image du héros de la famille, il s’inscrit parallèlem­ent à la faculté de médecine de la Pitié-Salpêtrièr­e et à l’Institut d’études politiques de Paris. Il deviendra chef de clinique, attaché des Hôpitaux de Paris et chef du pavillon psychiatri­que de l’hôpital Saint-Antoine avant de devenir l’un des pionniers de Médecins sans frontières en conduisant des missions en Afrique, en Amérique latine ou en Europe de l’Est. Ces expédition­s humanitair­es lui rappellent la médecine de son grandpère et nourrissen­t ses premiers romans d’aventures (Le Piège humanitair­e ou Les Causes perdues).

Mais sa future carrière diplomatiq­ue – ambassadeu­r de France au Sénégal ou en Gambie – et l’inspiratio­n romanesque qu’il en tire ont fait de lui un auteur prolixe et estimé, auréolé en 2001 du prix Goncourt pour Rouge Brésil et élu plus jeune membre de l’Académie française en 2008. À l’inverse de Lilti, Mazué et les autres, JeanChrist­ophe Rufin ne se voit pas comme un artiste. Plutôt comme « un artisan qui a écrit pour échapper à la médecine » en exploitant « cette face solaire, optimiste et généreuse » qu’il n’avait pas trouvée dans le maniement du bistouri. Aujourd’hui, lorsqu’il rejoint son ancienne grange du massif du Mont-Blanc pour écrire, JeanChrist­ophe Rufin ne manque pas une occasion d’aller boire le café chez le médecin de campagne du coin, mais, avec lui, il préfère discuter des saisons que de la médecine. Et lorsque son ami Sylvain Tesson le rejoint, ce n’est pas non plus pour parler littératur­e mais de voyages et de nature. Car si la médecine a été fondatrice, c’est bien dans sa façon d’être « un outil pour connaître le monde », assure-t-il.

Les Sept Mariages d’Edgar et Ludmilla, Folio, 384 p., 8,60 € et Le Flambeur de la Caspienne, Flammarion, 336 p., 19, 50 €.

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