Le Figaro Magazine

LES OURSINS DANS LES POCHES ET L’ASSIETTE

★★★ Mémoires d’un avare, de Louis-Henri de La Rochefouca­uld, Éditions du Cerf, 139 p., 12 €.

- LE MARQUE-PAGE DE NICOLAS UNGEMUTH

Les Éditions du Cerf ont demandé à sept auteurs d’écrire sur les sept péchés capitaux. Le plus facétieux d’entre eux, Louis-Henri de La Rochefouca­uld – oui, il descend bien du duc François et son illustre aïeul pourrait être fier de lui –, s’est chargé de l’avarice. Dans son livre, un critique gastronomi­que raconte sa vie alors qu’il s’apprête à mourir de la maladie de Charcot. « À dix-neuf ans, je détestais déjà payer, et j’aimais les châteaux en ruines. » Il devient donc gigolo « chaste » : « Si François-Marie Banier savait y faire, c’est que c’était à la portée de tout le monde. » Désormais entretenu, il commence sa carrière de flingueur des restaurant­s, modestemen­t (« En février 1991, pour m’aérer, j’étais parti une semaine au ski. C’était aussi du travail : je devais écrire pour Libération un sujet sur les meilleures raclettes de Courchevel »), avant de devenir, grâce à sa méchanceté, une star du milieu qui n’a désormais plus rien à débourser. Après avoir épousé une riche jeune femme qui meurt rapidement, il devient un riche veuf, ce qui ne change rien à ses habitudes : il n’achète rien, ne jette rien, se contente de cirer ses éternels mocassins à pampilles : « Mon avarice était écologique. J’étais un Harpagon bio ! » Avoir de l’argent sans le dépenser fait son bonheur. Il aime les Stranglers, Landru, le Clérambard de Marcel Aymé, et rappelle la phrase de Balzac : « L’avarice commence où la pauvreté cesse. » Jusqu’au jour où la santé de cette terreur des chefs étoilés vacille. La chute est parfaite : avant de mourir, il a cette question ultime : « Ma fin a-t-elle justifié les moyens ? »

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France