L’AUDACE DU VIN GLOBAL
En assemblant des crus californiens et australiens, Penfolds, la marque d’Adélaïde, crée des cuvées hors norme et secoue le vieux monde.
Depuis plusieurs années, la marque Penfolds, propriété du groupe Treasury Wine Estates – un mastodonte du secteur basé à Melbourne, à la tête de 13 000 hectares de vignes –, affole le secteur du vin. Comment ? En conservant un, voire deux ou trois coups d’avance sur ses concurrents de l’ancien et du nouveau monde.
Des étiquettes à la viticulture, l’Australie laisse s’exprimer la créativité de ses vignerons, la législation locale se montre très souple. Pas plus de traditions que de dogmes. Dans ce contexte, libre à l’Australo-Anglais Peter Gago (photo), chef winemaker-grand sorcier-vigneron, de jouer avec les cépages et de composer avec les crus de ses différentes parcelles, issus des vignes d’Australie méridionale, mais aussi de Nouvelle-Galles du Sud, de l’État de Victoria ou encore de Tasmanie. Si les raisins sont toujours pressés sur place, les jus peuvent être transportés en camion, en avion, à basse température, sous forme de mous, du domaine à un chai situé à des centaines de kilomètres.
C’est même le secret du Grange, la cuvée phare de la maison, « qui réunit les meilleurs raisins d’Australie dans un même vin », explique Gago. Une performance vinicole doublée d’un succès commercial.
Puisqu’on peut assembler des jus venus des quatre coins de l’Australie et obtenir de fameuses (et très chères) cuvées, pourquoi ne pas aller plus loin encore dans la démarche ? La marque vient de franchir un nouveau pas avec deux nouveaux venus – le Quantum Bin 98 et le Bin 149 – estampillés « Wine of the word ». Ces deux vins, millésime 2018, sont constitués d’un assemblage de crus australiens et californiens. Car Penfolds est aussi installé en Californie depuis une trentaine d’années. « Nous allons créer une polémique, souligne Gago, avec un sens aigu de la communication. Mais nous le faisons sans aucune arrogance. Il s’agit pour nous d’assembler des vins de grande qualité, comme nous l’avons toujours fait dans la Barossa Valley ou ailleurs et de réaliser un élevage dans des tonneaux de chêne, comme d’habitude. Seule la matière première change. Cette fois, nous réunissons des vins de deux pays lointains. » Avec la mention « Wine of the world » sur l’étiquette, Peter Gago peut désormais s’autoriser tous les assemblages imaginables. « Nous pourrions très bien composer un assemblage de crus de trois pays différents. Mais ce n’est pas notre objectif. Ce qui compte est uniquement la qualité du vin que l’on a dans le verre. Sachant qu’il doit être identifié comme un Penfolds. » Comme leur créateur, les deux nouveau- nés ne manquent pas de caractère.