MAUVAISE PASSE POUR LES RÉSIDENCES DE TOURISME
Fortement impactés par la crise sanitaire, des exploitants de résidences de tourisme ne versent plus les loyers à leurs propriétaires, les mettant parfois dans des situations dramatiques.
Apriori, investir en résidence de tourisme n’avait que des avantages : fiscalité attractive (remboursement de la TVA, réduction d’impôt…), revenus garantis et gestion sans soucis. Il suffisait de confier la gestion du bien par bail commercial de 9 ans à l’exploitant de la résidence, celui-ci se chargeant ensuite de trouver des locataires et de reverser un loyer en principe garanti aux propriétaires. Mais, la crise sanitaire a fait voler en éclats un système qui avait déjà montré des signes de faiblesse dans le passé. Entre confinements successifs, fermeture des remontées mécaniques…, nombre de touristes français et étrangers, d’hommes d’affaires… ont renoncé à se déplacer, faisant chuter la fréquentation de ces résidences et mettant à mal les exploitants.
Rien qu’en tourisme d’affaires, une étude KPMG réalisée pour le Syndicat national des résidences de tourisme (SNRT) fait état d’une baisse moyenne de fréquentation en 2020 de 51 % en Îlede-France et de 30 % en province, et d’un chiffre d’affaires pouvant atteindre respectivement – 71 % et – 66 %. Résultat : certains exploitants comme Pierre & Vacances - Center Parcs, Odalys, Belambra, Réside Études, Lagrange… ont cessé de verser les loyers promis, mettant les investisseurs à rude épreuve.
Propriétaire à Val-Thorens, Michel ne décolère pas. « Depuis que Pierre & Vacances ne paie plus mes loyers, j’ai du mal à rembourser la banque », explique-t-il. Le même exploitant met Joëlle, propriétaire à Perros-Guirec, dans la même galère. Gabrielle, propriétaire à PeiseyVallandry, sur le domaine des Arcs, s’insurge : « CGH, qui gère notre résidence, nous a déduit 78 jours de revenus en 2020, sans aucune compensation ; nous ne serons pas une variable d’ajustement. » À défaut de pouvoir payer leur crédit, certains propriétaires s’angoissent de devoir revendre à prix cassé. Les exploitants sont d’autant moins enclins à payer que la loi d’urgence sanitaire du 14 novembre 2020 les protège s’ils ont moins de 250 salariés, moins de 50 millions d’euros de chiffre d’affaires et des pertes supérieures à 50 % en novembre 2020.
« Cette loi introduit l’impossibilité de saisir le tribunal en vue de recouvrer des loyers impayés », note Me Jacques Gobert, avocat du cabinet Gobert & Associés qui défend près de 5 000 propriétaires. Des actions collectives sont menées contre certains gestionnaires. Une procédure de conciliation a été ouverte par le tribunal de commerce de Paris pour Pierre & Vacances - Center Parcs et ses filiales début février. Près de 20 000 propriétaires doivent être consultés. L’Unpi apporte son aide. « Nous informons les propriétaires de cette conciliation, sachant qu’ils sont libres de l’accepter ou de la refuser, précise Pierre Hautus, directeur général de cette union de propriétaires. Il ne faut pas se faire d’illusion, elle débouchera soit sur le paiement de loyers minorés, soit sur le non-paiement. » Pour l’heure, les propriétaires se sentent piégés par un bail commercial dont ils ne mesuraient pas les contraintes. ■