POLÉMIQUE
L’objectif de 25 % de logements sociaux dans les villes d’ici à 2025 semble irréaliste. Des élus réclament plus de pragmatisme sur le terrain.
La colère gronde chez de nombreux maires soumis à la loi solidarité et renouvellement urbain (loi srU, adoptée le 13 décembre 2000), qui obligera les villes proches des grandes agglomérations à disposer de 25 % de logements sociaux d’ici à 2025. selon un bilan rendu public fin décembre, sur les 1 035 communes soumises au bilan triennal 2017-2019, 550 n’ont pas rempli les quotas leur permettant d’atteindre dans les temps le chiffre totem inscrit dans le marbre de la loi. En constat de carence, 280 municipalités viennent même d’écoper de lourdes amendes en raison du retard pris. Certains maires manquent peut-être de zèle ; mais nombreux sont aussi ceux qui dénoncent les objectifs inatteignables qui leur sont imposés, trop arithmétiques et coûteux. « Avec 20,7 % de logements sociaux, on n’y arrive plus ; on n’a plus de place,
témoigne Xavier Melki, maire (Lr) de Franconville. Sans parler de l’impossibilité de financer les équipements qui découlent de l’arrivée de ces nouvelles populations. Nous disposons de 21 écoles à Franconville. Il en faudrait 18 de plus si nous devions respecter à la lettre les dispositions de la loi SRU. Soit un surcoût de 61 millions d’euros. »
Dans le Val-de-Marne, un collectif de 22 maires est monté au créneau pour appeler à la modification de la loi, dans une lettre ouverte adressée à la ministre du Logement, Emmanuelle Wargon. « Les maires et leurs équipes sont parfaitement conscients du besoin de logements en Île-de-France, qu’ils soient sociaux ou privés, mais cette densification ne doit pas se faire aveuglément », estiment les élus locaux, qui réclament une mixité sociale « intelligente et non dogmatique ». Moins contraignante également. Dans leur département, dix villes sont en constat de carence et subissent de lourdes sanctions. Comme saint-Maur-des-Fossés, dont l’amende est passée de 1,6 à… 6,4 millions d’euros à compter de 2021. Quatre villes (Ormesson, Le Perreux, saint-Mandé et saintMaur-des-Fossés, là encore) ont même vu récemment leurs compétences urbanistiques réduites au profit du préfet qui a désormais la possibilité d’exercer un droit de préemption et de délivrer les permis de construire à la place du maire.
un sujet très Politique
Dans le Val-d’Oise également, l’exaspération est à son comble. Quatre villes sont pointées du doigt, avec des amendes qui font grincer des dents les élus : 180 000 € par an à Montmorency (22 % de logements sociaux) ; 382 000 € à Auvers-sur-Oise, où les contraintes imposées par les Monuments historiques font de la construction des logements sociaux un vrai casse-tête ; 400 000 € au Plessis-bouchard ; et même 430 000 € à Enghien-lesbains qui ne parvient à construire que 30 à 40 logements sociaux par an, quand il faudrait en faire plus de 350 pour se conformer aux objectifs de la loi srU. Les socialistes voudraient aller plus loin encore en supprimant les aides départementales pour les communes carencées. Les propos tenus dernièrement par nicolas bougeard, conseiller départemental et municipal (Ps) à Argenteuil, ont fait monter le ton d’un cran. stigmatisant le manque de volonté politique de certains élus, il a laissé entendre sur VOtv (la chaîne de télévision du Val-d’Oise) que les maires de droite rechignaient à « mettre des pauvres dans leur ville. Et en plus, si ces pauvres ne sont pas blancs, cela va encore plus les gêner », a-t-il ajouté. « En affirmant face caméra que les maires gèrent leur commune en fonction de la couleur de peau de leurs administrés, Nicolas Bougeard emprunte les méthodes qui brandissent le racisme pour bâillonner leurs opposants et asseoir leurs thèses, ont aussitôt réagi, dans un communiqué, une trentaine de maires du Val-d’Oise. « Nous sommes chauds bouillants dans cette affaire, confie Florence Portelli, maire (Libres !) de taverny et vice-présidente de la région Île-de-France. Il est parfaitement malhonnête intellectuellement de faire croire que nous sommes contre le logement social. Ces injures publiques nous atteignent profondément dans notre honneur et relèvent des tribunaux. »