LES RENDEZ-VOUS
de J-R Van der Plaetsen
“Ne rien faire ne va pas de soi, même dans l’administration”
C’est autour d’une bouteille de vieux tokay que l’on retrouve Jean-Christophe rufin. Comme chaque année à la même date, il publie un nouveau tome des aventures d’Aurel timescu, ce consul plus préoccupé de démêler les intrigues de cour et d’ambassade que d’exercer son métier de diplomate. Particularité de ce personnage loufoque, mais détective aussi subtil que l’inspecteur Colombo : il fait une consommation effrénée de tokay, ce nectar hongrois à la belle robe dorée en lequel Louis XiV voyait « le vin des rois et le roi des vins » et auquel rufin trouve un goût de bonbon.
C’est grâce à de tels détails, la loupe de sherlock Holmes ou la pipe de Jules Maigret, que prend forme un personnage. rufin le sait, lui qui avait été pressenti par Gérard de Villiers pour prendre la relève de sAs. « Faire vivre un héros récurrent n’est pas aisé car le lecteur n’a pas toujours lu les tomes qui précèdent », dit-il, ajoutant : « Avec Aurel, j’utilise les codes du roman noir, à commencer par le suspense, sans m’encombrer de ses archétypes que sont l’extrême violence, les tueurs en série et le dépeçage des victimes. » Le public plébiscite ces polars souriants : chacun des trois précédents volumes s’est vendu à 150 000 exemplaires.
Avec La Princesse au petit moi, rufin situe son intrigue dans une principauté européenne imaginaire. Le choc des mondes est l’un des ressorts du comique : l’irruption d’Aurel dans un univers régi par le protocole est prétexte à de savoureuses descriptions du Gotha. il est aussi question de manipulations psychologiques dans ce roman où les aigrefins se faufilent entre les familles blasonnées et les têtes couronnées. « J’ai longtemps fait passer l’action avant mes romans, dit l’auteur. Aujourd’hui, la littérature est ma vie. Mais je me demande encore ce que je ferai quand je serai grand. » Une certitude : rufin a l’élégance de ceux qui ne se prennent pas au sérieux.
La PriNcesse au Petit moi, de Jean-Christophe Rufin, Flammarion, 385 p., 20 €.