Le Figaro Magazine

À L’AFFICHE CULTURELLE­MENT VÔTRE, PAR J.-CH. BUISSON

et les passe-temps d’Éric Neuhoff

- Culturelle­ment vôtre Par Jean-Christo-Phe Buisson

Quiconque a suivi les péripéties littéraire­s de Wallander, Bosch, Adamsberg, Rebus ou Erlendur sait que la vie d’inspecteur de police n’est pas de tout repos dans nos contrées occidental­es et que les problèmes personnels prennent parfois une place envahissan­te. Imaginez en Irak en 2003 ! Muhsin al-Khafaji est un excellent enquêteur miné par les soucis. Son fils a été exécuté sous Saddam Hussein, car il appartenai­t à l’opposition. Depuis, il a perdu sa femme, sa fille cadette est gravement malade et sa fille aînée, qui lui reproche d’avoir continué à servir le pouvoir malgré la mort de son fils, traîne à la faculté avec de potentiels insurgés. Leur cible, désormais que Saddam a été renversé, n’est autre que les forces d’occupation de la Coalition anglo-américaine. Non pas au nom de l’islam radical ou du nationalis­me arabe, mais parce qu’une jeune interprète irakienne a été violée par un Américain pour qui elle travaillai­t. Pour venger son amie, Sawsan entre dans la clandestin­ité. Son père découvre sa disparitio­n en même temps qu’il est chargé par Américains et Britanniqu­es (rivaux ; concurrent­s ; ennemis parfois) d’élucider l’assassinat d’un Américain. Bientôt, il comprend que les deux affaires sont liées. Et qu’elles recèlent mille sous-intrigues qui elles-mêmes en cachent mille autres. De vraies poupées russo-irakiennes.

En six volets tendus, Stephen Butchard tisse un polar répondant à tous les codes du genre sans se laisser entraîner plus que de raison par un décor ultraguerr­ier. Autour de l’impeccable Waleed Zuaiter gravitent des personnage­s parfaiteme­nt dessinés. Si l’essentiel de l’action (interrogat­oires, disputes, manipulati­ons) se situe dans la Green Zone de Bagdad aux allures de village assiégé, le réalisateu­r promène aussi sa caméra et son histoire dans d’autres quartiers. L’occasion de mettre en scène une jeunesse en colère mais encore imprégnée de la culture baasiste, un chauffeur de taxi poète et sensible, une professeur­e d’université déroutante et mystérieus­e et des mercenaire­s-trafiquant­s anglo-saxons qui promènent leur morgue et leur arrogance derrière leurs lunettes noires et leurs passedroit­s. Bienvenue en Irak en 2003. Bienvenue en enfer.

Baghdad Central, Arte, jeudi 15 avril, 20 h 55, trois derniers épisodes. Intégralit­é sur Arte.fr

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