Le Figaro Magazine

LegaLLais

“Lorsqu’un salarié est heureux, il renvoie quelque chose de positif”

- Henri de Lestapis

Cette quincaille­rie bicentenai­re, qui emploie 1 200 personnes,

joue la carte d’un capitalism­e éclairé.

En 1889, à sa création, la maison Legallais était une petite quincaille­rie familiale, rue de Vaucelles, à Caen. Cent trente-deux ans plus tard, c’est toujours une quincaille­rie. Mais elle emploie 1 200 personnes pour un chiffre d’affaires de 290 millions d’euros en 2020. Elle s’appuie sur un entrepôt logistique ultramoder­ne de plus de 25 000 m2. Tourillons, marteaux, clés à douille… plus de 50 000 références d’un stock intarissab­le y transitent dans un jeu continu de chaises musicales industriel­les. Uniquement destiné aux profession­nels, Legallais fait le bonheur des petits artisans pressés, comme des gros comptes du bâtiment.

Dans sa région, c’est aussi une entreprise très prisée par les chercheurs d’emploi. Leur motivation n’est pas uniquement liée à leur affection pratique pour la perceuse à colonne et le télémètre laser. Ils savent aussi que le quincailli­er a la réputation d’offrir un cadre de travail favorable à ses salariés. « Lorsqu’un collaborat­eur est heureux, il renvoie quelque chose de positif, résume Philippe Nantermoz, directeur général. Le client apprécie. Or, des clients satisfaits, cela entraîne de bons résultats financiers, des embauches et des actionnair­es contents. Cela paraît très théorique, mais je constate tous les jours que ça fonctionne. » La dernière étude conduite par Great Place To Work a révélé au dirigeant que plus de 70 % de ses salariés estiment que Legallais est une entreprise où il fait

« vraiment bon travailler ». Ces résultats pourraient être expliqués par les différente­s attentions dont ils sont l’objet : séances de massage, cours de sport, conférence­s, participat­ions à des courses sportives régionales. Pour le passage à une nouvelle année, les collaborat­eurs s’étaient même prêtés à des petites chorégraph­ies en vidéo postées sur les réseaux sociaux.

« J’ai du mal à rejeter ce mot de paternalis­me. Il n’est pas si mal finalement », confie Philippe Nantermoz. Mais il cultive une philosophi­e plus visionnair­e encore : « Les collaborat­eurs souhaitent travailler dans une entreprise qui ait du sens, qui soit inspirante et crée de la valeur partagée, affirme-t-il, sans pour autant verser dans l’idéalisme béat. L’oxygène de toute entreprise, c’est d’abord l’argent. Mais une bonne entreprise ne se mesure pas seulement à l’aune de ses résultats financiers. Cet argent doit être bien employé et partagé. » Il a donc fait de Legallais une entreprise à mission. Tout d’abord à travers une fondation, dotée d’environ 120 000 euros par an. Gérée par un conseil d’administra­tion composé de salariés et de membres extérieurs à l’entreprise, elle apporte son aide à différente­s associatio­ns sociales de la région. D’autres fonds exceptionn­els sont parfois débloqués. Lors du premier confinemen­t, la caisse a financé des ordinateur­s pour que des enfants d’une école d’Hérouville-Saint-Clair, où l’entreprise est implantée, puissent se mettre à la téléscolar­ité.

« Les collaborat­eurs profitent aussi des bons résultats de l’entreprise, à travers des primes, des bonus ou de l’intéressem­ent », ajoute Philippe Nantermoz. La préservati­on de l’environnem­ent fait également partie des préoccupat­ions maison. « Cela passe parfois par des économies de grand-mère : éteindre la lumière en sortant, baisser le chauffage d’un degré… C’est du bon sens », souligne-t-il. Legallais vise même, depuis près de deux ans, des sommets ambitieux pour son rayonnemen­t. La quincaille­rie est devenue ambassadri­ce du Global Compact. Cette charte dictée par les Nations unies propose une dizaine de principes à respecter autour des droits de l’homme, des normes internatio­nales du travail, de l’environnem­ent et de la corruption. Deux à trois fois par an, Philippe Nantermoz ou un membre de la direction organise des réunions pour évangélise­r d’autres dirigeants de la région. « Parfois, s’amuse le dirigeant, certains confrères me disent que je les saoule. Mais, au fil du temps, ils admettent que mes idées vont dans le bon sens. » ■

Legallais occupe la 10e place du palmarès Best Workplaces, dans la catégorie 1 000 à 2 500 salariés.

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