Le Figaro Sport

Cérémonies d'ouverture des Jeux : l'équipe de France portera du Berluti

- Matthieu Morge Zucconi

EXCLUSIF - Le bottier a réalisé les chaussures et les costumes des athlètes de la délégation tricolore les 26 juillet et 28 août.

Le duc de Windsor, Yves Saint Laurent, François Truffaut, Andy Warhol, Marcello Mastroiann­i, Yul Brynner, Gianni Agnelli… La liste des grands noms chaussés par Berluti au fil de son histoire est impression­nante. Il faudra bientôt y ajouter ceux des athlètes olympiques et paralympiq­ues français que la maison habillera pour les deux cérémonies d'ouverture de Paris 2024, le 26 juillet et le 28 août. Or, avec un milliard de téléspecta­teurs espérés et une mise en scène qui s'annonce des plus spectacula­ires, cela promet d'être un moment fort des Jeux où il s'agit, pour la délégation tricolore, de marquer les esprits avant les épreuves.

« Une cérémonie d'ouverture, ce n'est jamais anodin pour un athlète, ne serait-ce que parce qu'elle peut durer jusqu'à huit heures de mobilisati­on, avec les émotions que cela engendre, explique

Brice Guyart, ex-escrimeur, deux fois médaillé d'or olympique, en charge de l'expérience et de l'engagement des athlètes pour Paris 2024. Même les athlètes qui n'y participen­t pas mettent la tenue pour regarder les festivités : elle est un marqueur d'appartenan­ce à l'équipe. C'est aussi un moment où les sportifs se jaugent, on voit si une délégation a mis les moyens, si elle est prête… Le costume est très important pour faire passer ces messages et mettre nos champions dans les bonnes conditions pour leurs performanc­es futures. Par le passé, nous n'avons pas toujours représenté l'élégance à la française, à mon sens. Je me souviens notamment d'olympiades où nous avions été marqués par les Américains qui, dès cette cérémonie, montraient qu'ils étaient confiants, élégants… À Paris, nous serons en nombre, et nous serons plus beaux, plus chics ! »

La patine Berluti déclinée sur la veste

Pour se montrer à la hauteur de l'enjeu, Berluti, maison de LVMH, partenaire officiel de Paris 2024, a choisi la styliste Carine Roitfeld. Le vestiaire, révélé ce 17 avril, à 100 jours tout juste du début des Jeux, se compose, pour les hommes, d'un smoking bleu marine à col châle à deux boutons et d'une chemise blanche, et, pour les femmes, d'une version sans manches de la veste, portée soit avec un pantalon, soit avec une jupe portefeuil­le. Seule fantaisie ? Le revers de soie de la veste se pare d'un dégradé tricolore. Une référence au drapeau français, bien sûr, mais aussi à la signature du bottier : la fameuse patine, technique (encore réalisée à la main pour les souliers) inventée par Olga Berluti dans les années 1980 qui permet de colorer le cuir de teintes uniques. « Nous ne voulions pas faire des survêtemen­ts, qui ne correspond­ent pas à l'esprit de Berluti, maison de luxe à l'identité très forte, mais l'idée était d'avoir une forme de continuité entre l'homme et la femme, souligne Carine Roitfeld, qui a contribué comme consultant­e à ce projet. La complexité de l'exercice est qu'il faut plaire à tous les athlètes, aux différents acteurs de la cérémonie, aux fédération­s… Nous avons trouvé la bonne formule, et, à mon sens, nous avons réalisé une tenue très française, bien représenta­tive de notre vision du chic : pour la femme, c'est une question de longueur et de forme de la jupe, et pour l'homme, cela tient notamment à cette décontract­ion dans cette chemise portée boutons ouverts, sans cravate ! »

Ce projet se révèle d'envergure pour la marque, dont les capacités de production ne sont pas aussi grandes qu'un Louis Vuitton ou qu'un Dior, le prêt-à-porter y restant un secret d'initiés. Berluti ne défile plus depuis la pandémie, et n'a plus de direction artistique incarnée depuis le départ de Kris Van Assche, en 2021. « Pour la maison, ce projet est une immense fierté, raconte Vanessa Le Goff, directrice de collection. Des milliards de personnes vont avoir les yeux rivés sur cet événement planétaire. C'est l'occasion pour nous de montrer l'étendue de notre savoir-faire. Il a fallu travailler main dans la main avec les athlètes, pour comprendre leurs besoins. Il y a une notion d'élégance, évidemment, car elle fait partie de notre ADN, mais aussi de confort, essentiell­e, car nous habillons cette fois-ci des sportifs. Il a aussi fallu penser à la chaleur, avec des chemises légères en coton et soie, une taille élastiquée au pantalon, des matières respirante­s… »

Dix heures pour monter une veste

Berluti n'a pas fait les choses à moitié. Ces costumes ont été fabriqués en Italie dans les règles de l'art, avec un niveau de finition digne des meilleurs tailleurs sur mesure : un entoilage à la main sans thermocoll­age, jusqu'à dix heures de montage pour la seule veste… Et si chaque sportif n'a pas eu droit à sa prise de cotes, la morphologi­e de certains a imposé que l'on adapte le système de tailles, façon demi-mesure. « C'est un véritable challenge, assure Agnès Fillioux, directrice de production prêt-àporter. Nous avons l'habitude d'habiller des clients avec des tailles finalement assez standards. Nous avons dû cette fois-ci nous adapter aux 1 500 sportifs et encadrants, aux morphologi­es très différente­s. Nous en avons rencontré certains, olympiques comme paralympiq­ues, ce qui nous a aidés et rassurés sur notre taillage, permis d'ajuster certaines choses… Sans compter que, pour la première fois de son histoire, Berluti habille des femmes ! »

Et, forcément, quand il est question de Berluti, il est aussi question de chaussures… En l'occurrence, les hommes porteront des sneakers (variantes du best-seller de la maison, la Shadow, en bleu marine, à languette patinée tricolore), et les femmes, un mocassin ultrasoupl­e. « Il n'était pas question de faire marcher les athlètes pendant toute la cérémonie dans des souliers trop rigides qui pourraient les blesser, précise Vanessa Le Goff. Par ailleurs, les femmes peuvent également, si elles adoptent le pantalon à la place de la jupe, porter les sneakers ! » Pour l'occasion, le chausseur a fait fabriquer, dans ses ateliers de Ferrare, à quelques encablures de Bologne, des modèles en pointure 57 !

 ?? Berluti ?? De gauche à droite, le cycliste Alexandre Leauté, le sauteur en longueur Arnaud Assoumani, le triathlète Alexis Hanquinqua­nt, le cavalier Karim Laghouag, la nageuse synchronis­ée Laure Thibaud-Obry, la boxeuse Estelle Mossely, le basketteur Nando de Colo, la joueuse de tennis-fauteuil Pauline Déroulède, l'escrimeuse Marie-Florence Candassamy, la lanceuse de poids Gloria Agblemagno­n, la grimpeuse Oriane Bertone et l'exjoueur de tennis, et responsabl­e de la délégation masculine, Paul-Henri Mathieu. À droite, la Shadow réalisée pour l’équipe de France.
Berluti De gauche à droite, le cycliste Alexandre Leauté, le sauteur en longueur Arnaud Assoumani, le triathlète Alexis Hanquinqua­nt, le cavalier Karim Laghouag, la nageuse synchronis­ée Laure Thibaud-Obry, la boxeuse Estelle Mossely, le basketteur Nando de Colo, la joueuse de tennis-fauteuil Pauline Déroulède, l'escrimeuse Marie-Florence Candassamy, la lanceuse de poids Gloria Agblemagno­n, la grimpeuse Oriane Bertone et l'exjoueur de tennis, et responsabl­e de la délégation masculine, Paul-Henri Mathieu. À droite, la Shadow réalisée pour l’équipe de France.

Newspapers in French

Newspapers from France