D’une pierre, deux coups ?
L’opération visite des quartiers par Luc Bouard et un staff conséquent a officiellement pour objectif de prendre le pouls de la population. En 2014, le candidat UMP avait remporté le scrutin municipal à la surprise générale. Avec la forte baisse des suffrages de droite aux départementales puis aux régionales et l’arrivée des législatives, le maire tente, en réalité, de reprendre la main. Il a tout d’abord réorganisé son équipe, lancé quelques chantiers, tel celui du Bourg, et monté ces visites dans les quartiers. Aussi estil légitime de s’interroger : quelles intentions réelles, quelle participation des Yonnais, quelle organisation des réunions, quelle efficacité réelle en termes d’influence sur les politiques publiques et enfin quel rapport aux stratégies électorales ?
Le premier questionnement touche à l’état d’esprit du maire. Pour le dire autrement jusqu’où est-il prêt à aller pour prendre en compte les souhaits des Yonnais ? Quelle est sa marge de manoeuvre en termes de budgets ? Quelle faisabilité pour traiter des suggestions ?
Le deuxième questionnement concerne le rapport nombre de présents/nombre d’habitants du quartier. Comment convaincre les Yonnais de participer à ces réunions pour donner leur opinion ? Certains n’en ont pas l’envie. D’autres hésitent à venir. Enfin, certains n’ont guère d’aisance pour prendre la parole en public. À l’arrivée, sauf lorsqu’une thématique particulière est au centre des débats telle la méthanisation aux Pyramides (70 participants), les assistances paraissent bien maigrichonnes : 11 à Jean Yole et 22 à La Vigne aux Roses… Au final, sur une population de 53 000 habitants et de 37 500 électeurs, la participation est modeste.
Autre interrogation : la forme de l’organisation de la réunion maire/citoyens. Elle a des conséquences sur l’expression de ces derniers. À cet égard, à La Roche, l’organisation est classique : les gouvernés sont mis en avant en termes d’organisation de l’espace alors qu’une communication de type symétrique semble préférable lors d’un exercice de démocratie participative.
Enfin, sur le plan politique Luc Bouard assure que ces visites n’ont rien à voir avec les législatives 2017. Son entourage immédiat en veut pour preuve le fait qu’il visite aussi la partie nord de la Ville. Un peu court. En réalité, il tente de faire d’une pierre deux coups : renouer des liens qui s’étaient distendus et mine de rien, préparer sa campagne des législatives. Il y est en compétition interne avec Maxence de Rugy. La majorité au Département, comme à la Région, semble préférer son jeune homologue de Talmont. Au sein de la majorité municipale yonnaise, certains fidèles du maire semblent même inquiets de son éventuel départ pour cause de non-cumul. Bouard lui maintient le cap : il candidaterait, même sans l’investiture de son parti, Les Républicains. Info ou intox ?
À l’arrivée, l’opération visite des quartiers ne semble pas susciter un enthousiasme délirant. Elle ressemble trop à un copier/coller des enveloppes de quartiers mises en place pour la première fois en France par Jacques Auxiette. Le charismatique leader socialiste avait aussi fait de La Roche la deuxième ville de France à se doter d’un Conseil des sages. Difficile, dans une ville dotée de tels outils de démocratie participative de retenir l’attention de ses compatriotes avec un pseudo-événement.