Le mari au sabre sera rejugé
Vendredi, Hassan Aminov a été reconnu coupable d’avoir tenté de tuer son épouse avec un sabre. Sauf que la peine prononcée - 25 ans de réclusion criminelle - est illégale. Le parquet a fait appel. Explications.
« Qu’elle me pardonne. Mettez-moi 30, 50 ans… Pourvu que mon épouse et mes enfants me pardonnent ». Les derniers mots d’Hassan Aminov soufflés à la cour. Des mots qui contrastent avec ceux, hargneux et durs, que le Caucasien a multipliés face aux jurés. Pendant deux jours, l’accusé de 49 ans a nié. « Je voulais juste lui faire peur ». Cette nuit du 3 octobre 2013, l’ancien berger du Daghestan menace sa femme avec un sabre de 71 centimètres, dans leur domicile yonnais. « Obsédé par l’idée que son épouse la trompe », il veut lui faire cracher le nom de son amant. Un homme qui n’existe pas… Pire, il argue que ses cinq enfants ne peuvent être de lui.
Deux fois, Hassan Aminov hausse le ton : « Elle s’est embrochée toute seule sur le sabre ». La présidente de la cour d’Assises, Rita Marquis, lui oppose l’expertise médicolégale : « Huit coups étaient de nature à donner la mort ». Lui parle « d’invention ». Crie à plusieurs reprises : « Je n’ai jamais touché personne avec mon doigt ». Se tourne vers son épouse, Zaynab Moussalaieva, prostrée dans la salle d’audience. La montre du doigt : « Tout ça, c’est des mensonges ».
La victime de 39 ans raconte son calvaire. Les frissons parcourent la salle. « J’ai prié avec mes dernières forces ». Prié dans ce lit « inondé de sang », viscères à l’air. Les photos de son ventre ouvert font le tour des jurés. Hassan Aminov reste immobile. Campé sur ses positions : « Elle souriait à d’autres hommes. Elle le faisait pour m’énerver. Elle le faisait exprès pour que je lève la main sur elle ».
« Quand il sortira, il finira le travail »
Mariés au Daghestan en 2000, Hassan et Zaynab étaient arrivés en France en 2006, avant de bénéficier de l’asile politique trois ans plus tard. En 2011, la maman avait trouvé refuge dans un centre d’accueil d’urgence pour femmes à La Roche. « Elle disait subir régulièrement des violences physiques et psychologiques de la part de son mari », glisse une travailleuse sociale à la barre. « Elle le décrivait comme un fou qui pouvait la tuer ».
Est-il passé à l’acte cette nuit-là ? Pour Me Carole Verdu, l’avocate de la partie civile, c’est oui. Elle plaide la préméditation : « J’ai pris l’engagement moral de les protéger. Vous savez ce que me dit Zaynab : « Je suis persuadée que lorsqu’il sortira, il finira le travail ». C’est terrible à dire. Mais ce jourlà, il l’a libérée. Une liberté qui a un prix exorbitant : se voir mourir ». La préméditation, l’avocat général, Yannick Le Goater, demande à la cour de la retenir : « Il a saisi cette arme l’étale et a tenté d’achever son épouse ». Il requiert 25 ans de réclusion.
Pour la défense, point de préméditation, « mais la volonté irrépressible de savoir s’il a été trompé, mais sans vouloir la tuer », plaide Me Peggy Boucher-Chiale. Une avocate qui évoque « une sauvagerie qui est le résultat de ce qu’il a vécu ». Cet enfer de son expérience en Azerbaïdjan et en Afghanistan. « Il a été emprisonné, torturé ».
Une peine illégale
Le verdict est tombé : 25 ans de réclusion criminelle. Mais, coup de théâtre, la peine prononcée est illégale. Si la cour a suivi les réquisitions du parquet, elle n’a pas retenu la préméditation. Et c’est là que ça coince. Sans préméditation, l’accusation de tentative d’assassinat se transforme en tentative de meurtre. La peine maximale est alors de trente ans, mais l’accusé ne peut être condamné à plus des deux tiers de la peine, soient vingt ans. Le parquet est donc contraint de faire appel. Un nouveau procès devra se tenir avant un an. Pendant ce temps, Hassan Aminov reste en détention provisoire.