Le Journal du Pays Yonnais

Facture plus salée pour l’aide à domicile

La révision des barèmes impacte les usagers

- Philippe Ridou

À compter du 1er mars, la Vendée ne compte plus d’associatio­n d’aide à domicile habilitée à l’aide sociale. Certains usagers se verront désormais facturer un reste à charge.

C’est la fin d’un bras de fer entre l’associatio­n Aide à domicile pour tous 85 (ADT 85) et le Conseil départemen­tal. L’ADT 85 jette l’éponge et cesse son activité au 1er mars. Quelque 1 500 usagers et 130 salariés vont devoir faire face à ce changement. Au coeur du conflit, le montant du remboursem­ent de l’heure d’interventi­on à domicile. L’ADT 85 était la dernière structure habilité à l’aide sociale.

C’est-à-dire que les usagers ne se voyaient pas facturer de reste à charge. Depuis le 1er avril 2016, le Conseil départemen­tal a adopté un barème unique de 20,50 € de l’heure. Un montant qui contraint les prestatair­es à s’y conformer ou à facturer la différence à l’usager. Un principe qu’a toujours réfuté Geoffroy Verdier, le directeur de l’ADT85. Il explique que « cela nous met en difficulté car notre coût horaire est de 23 €, notamment parce que notre personnel est formé et qualifié. Chaque heure d’interventi­on génère un manque à gagner d’environ 2 € ».

Barème unique

Stéphanie Edel, directrice générale adjointe du Pôle Solidarité­s et Famille, pointe « un désaccord avec l’ADT 85. La différence de 2 € de l’heure est liée à des charges de ressources humaines et de convention collective propres à l’associatio­n », jugées « extralégal­es » par le départemen­t. Il estime donc ne pas devoir les prendre en considérat­ion.

L’ADT est également présente sur la Loire-Atlantique « où elle n’est pas en péril. Le tarif départemen­tal couvre nos coûts de prestation­s », assure Geoffroy Verdier.

Le barème unique a été décidé dans le prolongeme­nt de la loi d’adaptation de la société au vieillisse­ment, adoptée en décembre 2015. Isabelle Rivière, vice-présidente du conseil départemen­tal en charge des familles, fait valoir que le barème unique « est majoré pour les personnes ayant des revenus inférieurs à 800 € : 20,50 € contre 19,85 €. »

L’objectif du barème unique est de mettre les acteurs associatif­s, privés et publics sur un pied d’égalité. « Certains arrivent bien à ne pas facturer plus de 20,50 € de l’heure », affirme Yves Auvinet.

Pourtant, sur les 148 prestatair­es d’aide à domicile de la Vendée, 3 sur 4 dépassent le tarif fixé par le départemen­t. Rien d’étonnant : une étude de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) et de la Direction générale de la cohésion sociale (DGCS) de mai 2016 évalue le coût horaire moyen à 24,24 €.

Reste à charge

Interpellé sur le principe de mettre à contributi­on les personnes en perte d’autonomie, le départemen­t retarde sa réponse. « Le travail est en cours. Nous allons inventorie­r les situations qui seraient délicates », avance Yves Auvinet, admettant qu’à ce jour, il « manque d’informatio­ns techniques précises sur le sujet ». Des solutions seront-elles trouvées d’ici le 1er mars ?

Stéphane Ibarra (PS) a alerté le départemen­t. « Cela pose problème aux personnes, notamment les plus modestes, qui peuvent prétendre à une prise en charge à 100 % ». L’élu de l’opposition estime que « les Vendéens financent le désengagem­ent du départemen­t. Or, celui-ci a les moyens de financer cette prise en charge ».

« Pour une personne nécessitan­t 20 heures d’interventi­on hebdomadai­res, le reste à charge serait de l’ordre de 30 à 40 € », avance Geoffroy Verdier. Il admet que l’ADT 85 n’a pas connu un afflux massif d’usagers depuis l’entrée en vigueur du tarif unique, le 1er avril dernier.

Pour l’heure, le départemen­t se prévaut de disposer d’un maillage d’offres d’aide à domicile sur tout le territoire et de diffuser une informatio­n transparen­te sur celle-ci. Il rappelle que, conforméme­nt à la loi, « l’usager est libre de choisir son prestatair­e. »

Usagers et salariés

« Ce qui importe, c’est la continuité de service pour nos 1500 usagers et les 130 salariés de l’ADT85 », souffle Geoffroy Verdier, satisfait de la reprise d’activité et des 130 salariés par l’ADMR. Les usagers de l’ADT 85, informés mi-janvier par courrier n’ont eu qu’un mois et demi pour changer de prestatair­e : c’est court, notamment pour des personnes en situation de vulnérabil­ité.

Nicolas Saillour, directeur de la fédération ADMR Vendée, est « fier d’accueillir » les salariés de l’ADT, « de bons profession­nels, bien formés ». « Nous étions préoccupés de sauver l’activité, les emplois, les salariés en souffrance. C’est un vrai enjeu social. »

La casse est donc limitée pour les salariés. Une dizaine d’entre eux n’a pas souhaité contractua­liser avec l’ADMR, les 130 autres n’ont « guère eu le choix », tout en appréciant être repris « en CDI et avec l’ancienneté ».

Continuero­nt-ils à s’occuper des mêmes usagers alors que leur nouvel employeur les invite à travailler dans le périmètre de leur domicile ? Continuité de service, vraiment ?

L’offre d’aide à domicile sur chaque commune et les tarifs pratiqués sont à consulter sur le site du Conseil départemen­tal : www.vendee-senior.fr

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 ??  ?? 148 services d’aide à domicile sont autorisés à intervenir en Vendée pour les personnes âgées et/ou handicapée­s. La plupart facture un reste à charge à l’usager.
148 services d’aide à domicile sont autorisés à intervenir en Vendée pour les personnes âgées et/ou handicapée­s. La plupart facture un reste à charge à l’usager.

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