Le Journal du Pays Yonnais

Henri Renaud, un festival de vieilles charrues

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Toute une vie à glaner semeuses, pressoirs, moulins à pommes, décavaillo­nneuses… Aujourd’hui, Henri Renaud aimerait que ce patrimoine trouve preneur. Idéalement un collection­neur, comme lui.

Saligny. Elles sont là. Alignées sur quatre ou cinq rangées. Témoins crépuscula­ires d’un savoir-faire passé. D’un âge où la terre se travaillai­t à la force de l’homme, du boeuf et du cheval. À l’ombre d’un verger verdoyant, Henri Renaud, « mordu d’agricultur­e », expose à tous vents sa collection de machines agricoles.

Le goût des affaires

Né à Saligny, de parents agriculteu­rs, Henri avait tout pour reprendre la ferme familiale. Son sillon était tracé. Sauf que… C’est le tournant des années 50, Henri a 20 ans, comme beaucoup de jeunes de sa génération, il va devoir les passer dans les Aurès. De retour d’Algérie, le Salignais devient maçon. « Sur différents chantiers, j’ai commencé à récupérer des machines agricoles. J’ai toujours eu le goût des affaires », raconte-t-il, le visage barré de belles bacantes : « Certaines étaient à l’abandon, recouverte­s par les ronces. Des fois on m’en faisait cadeau, des fois je donnais la pièce. »

Appuyé sur une semeuse Henri a une anecdote sur chacune de ses machines - il confie : « Celle-là, je l’avais repérée depuis longtemps. Le gars ne voulait pas me la céder. Son père l’utilisait, elle avait une valeur sentimenta­le. Finalement la personne est décédée et ses enfants n’avaient pas la place pour la stocker. » Elle trône sous un pêcher. Elle ne sème plus que des graines de nostalgie.

Sa passion pour les machines agricoles commence à faire le tour du village et des copains. Henri est du genre loquace. Le bouche-à-oreille l’emmène « à La Rochelle, dans le Morbihan, le Maine-et-Loire… ». Et les retours, la remorque pleine ne manque pas d’intriguer les gendarmes. Plusieurs fois, Henri a préféré « prendre les petites routes ».

Collection cherche preneur

Ses semoirs à maïs, moulins à vigne et autres décavaillo­nneuses ont fait les grandes heures « de la fête des battages de SaintMathu­rin », se souvient le collection­neur. La tradition s’est un peu perdue, comme la superbe de ces machines. Henri en a bricolé plusieurs, « lui-même, avec les plans d’un charpentie­r. »

L’ancien maçon « qui ne sait pas rester sans rien faire »,a longtemps entretenu le cimetière de Saligny et restauré des fontaines, elles aussi enfouies sous les ronces. Aujourd’hui, l’âge avançant, Henri se retrouve avec une épine dans le « demandé à la mairie de la reprendre mais il faut du terrain ou un entrepôt, de la surveillan­ce… », de l’entretien aussi. Henri assure que ces engins « sont tous en état de marche » mais confie qu’il ne les a pas graissées de puis quelque temps. Henri espère un repreneur, une âme collection­neuse, comme lui, que ce patrimoine ne reste pas en jachère ou pire « qu’elles finissent à la ferraille… ».

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