Pourquoi les camping-cars sont-ils de plus en plus gros ?
En trois décennies, à l’image de l’automobile, le camping-car a profondément changé pour devenir plus propre, plus confortable et plus costaud. Des améliorations qui ont malheureusement un impact sur la masse et qui ont imposé l’utilisation de moteurs plu
En 1985, Pilote proposait dans son catalogue un camping-car profilé haut de gamme, le R320. Conçu sur une base Renault Trafic, il pouvait recevoir un moteur diesel d’une cylindrée de 2 068 cm3 pour une puissance maximale de 60 ch et un PTAC de 2 670 kg (poids à vide de 2 040 kg). À l’époque, ça faisait rêver ! Plus de trente ans après, un peu moins. Le modèle phare du même constructeur, conçu sur une base Fiat, propose a minima un moteur diesel de 2,3 l pour 130 ch. Soit le double. De son côté, Challenger – fabricant né en 1985 – disposait alors d’une gamme réduite (trois modèles, dont deux capucines) et son modèle emblématique était le 340. Cette capucine utilisait une base Peugeot J5 1300D, châssis cabine, disponible en essence (PTAC 2 900 kg) ou en diesel (PTAC 3 000 kg) et dont la puissance la plus élevée ne dépassait pas les 75 ch. Aujourd'hui, Roger Clavaret, directeur marketing de Challenger, indique que le modèle le plus vendu est le 288, un profilé avec lit de pavillon deux places à l'avant, lit central à l'arrière qui est proposé sur une base Ford avec un moteur de 2,0 l pour 130 ch ou un Fiat 2,3 l de 130 ch. Des augmentations de puissance qui sont imposées par le triptyque sécurité, écologie et confort.
■ Plus de sécurité C’est certainement l’un des points d’évolution les plus importants des véhicules modernes. Et les règlements ne sont pas si vieux que cela puisque, avant les années quatre-vingt, il n’y avait pas de réglementation concernant la sécurité des véhicules. Les premiers tests de chocs à être introduits étaient exclusivement concentrés sur le choc frontal et ne mesuraient, en gros, que les intrusions dans l’habitacle comme le recul de la colonne de direction. Ce n’est qu’un peu plus tard que sont
apparus les premiers mannequins, notamment grâce à la création de l’organisme indépendant Euro NCAP en 1997 – chargé d’évaluer les véhicules européens en termes de sécurité. Dès lors, c’est la philosophie même de la sécur ité qui a changé : il faut désormais préserver les occupants en minimisant les effets du choc, mais aussi éviter de causer des dommages aux piétons. L’ensemble de ces exigences a conduit à alourdir la structure des véhicules. Comme le souligne Antoine Jaulmes, responsable R&D plateforme véhicules utilitaires légers chez PSA. « Nousavons dûrenforcerl’avantdeschâssis denosvéhiculespourrésist er àdeschocsdeplusenplusdifficilesenfrontal(vitesseélevée, choccontreunebarrièredéformable…),maisaussienlatéral. Et,lorsquel’onsaitquelamasse duchâssisreprésenteauminimumuntiersdupoidsd’un camping-car,t outesc es contraintessetraduisentinéluctablementparuneaugmen
tationdupoidstotal. » Les constructeurs ont donc dû s’adapter et trouver une solution pour limiter l’embonpoint de leurs engins. Cela passe alors par l’utilisation d’aciers à très haute limite élastique, plus légers, qui améliorent la résistance de la caisse tout en limitant la prise de poids. Simultanément, sont apparus des systèmes d’aide à la sécurité active (destinés à éviter l’accident) comme l’ABS, l’ESP, le régulateur de vitesse, les détecteurs de pluie et de luminosité, les différents radars et caméras etc. Mais aussi des dispositifs de sécurité passive (qui interviennent une fois que le choc a eu lieu) comme les airbags ou les prétensionneurs de ceintures. Tous ces dispositifs par ticipent donc à l’augmentation du poids du véhicule. Pire, leur mise en place impose la création d’un réseau électrique beaucoup plus important qui, lui aussi, pèsera sur la balance. Les faisceaux électriques deviennent alors un vér itable casse-tête pour les constructeurs. C’est le multiplexage qui leur permettra de limiter les dégâts. Son principe : faire passer plusieurs informations dans un même fil, comme le téléphone et Internet (ADSL) à la maison, moyennant l’ajout de calculateurs électroniques.
■ Agrément et respect de l’environnement
La seconde raison qui a obligé les constructeurs à augmenter la puissance de leurs moteurs est le respect de l’environnement. En effet, avant 1993, aucune réglementation ne leur était imposée. Puis, à partir des années 2000, l’augmentation du coût de l’énergie et la prise de conscience de la maîtrise des émissions de CO2 ont joué un rôle de plus en plus important. Avec l’entrée en vigueur de la nouvelle réglementation Euro 6 en 2016, les moteurs ont accusé une prise de poids conséquente. Cela aurait pu être le cas du moteur Euro 6 de PSA, qui n’a pris “que” 12 kg en raison de l’implantation du système AdBlue. Mais, pour Pascal Bélot,
responsable camping-cars In
ternational PSA, « lesurpoids aurait pu atteindre 45 kg si nous n’ avions pas op té pour un moteur Euro62,0HDI,à 100% d’ origine P SA pour compenser l’ ajout des dis positifs de dé pollution ». Sa puissance a donc été augmentée depuis son ap- parition en 1999. Il disposait alors de 89 ch (66 kW) contre 177 ch (132 kW) aujourd’hui. Pour Mercedes, la puissance n’a pas été la seule évolution majeure des moteurs modernes. Le couple a, lui aussi, beaucoup progressé. Ce dernier est en effet primordial pour emmener un véhicule en pleine charge sur les premiers rapports. En plus de jouer un rôle important dans l’agrément de conduite, l’augmentation du couple permet aussi de réduire la consommation. La boîte automatique commence à faire son apparition dans le monde du camping-car. Ainsi, Renault propose une boîte robotisée sur son Master tout comme Fiat sur le Ducato alors que Mercedes peut équiper le Sprinter d’une boîte de vitesses automatique à 7 rapports (7G Tronic-Plus). De son côté, le Daily Hi-Matic d’Iveco reçoit une boîte automatique à 8 rapports. Des solutions qui apportent du confort d’utilisation et de la sécurité, mais qui s’avèrent plus lourdes qu’une boîte de vitesses manuelle.
■ Plus de confort pour des clients plus exigeants Roger Clavaret le constate, « les porteur sont grandi et il n’ existe plus de capucine dont la hauteur est inférieure à trois mètres. Mais outre la puissance, le design et le confort, ce sont les clients qui ont changé et qui exigent un confort quasi- équivalent à celui de la maison: la transformation des dînettes en couchagesestc onsidérée comme une corvée et le“lit tout fait” est quasiment obligatoire
aujourd'hui ». On voit ainsi apparaître des systèmes plus sophistiqués, donc plus lourds, comme le lit de pavillon électrique qui ne nécessite aucune manipulation. Et en journée, le lit “disparaît” au plafond dégageant ainsi un maximum d'espace. De même, la dînette classique, avec deux banquettes face à face et une table accrochée au mur est désormais remplacée par des sièges cabine pivotants et une table centrale. Le tout est installé dans un véhicule plus long, qui offre plus de place et de rangements.