Focus : le match Mercedes/Fiat . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Depuis le lancement de la troisième génération de Sprinter, l’an dernier, Mercedes ne cache pas son ambition de redevenir un acteur majeur sur le secteur du véhicule de loisirs. S’il n’a pas vocation à détrôner le Ducato, qui règne sans partage depuis plus de 10 ans, le porteur allemand se présente néanmoins en alternative techno et haut de gamme.
D
ire que le Ducato est le porteur de référence dans l’univers du véhicule de loisirs, au sens large incluant les fourgons, est un doux euphémisme. Non seulement le modèle Fiat représente quelque 80% des immatriculations de camping-cars, mais en outre il s’offre le luxe d’être pour la douzième année
consécutive élu « Meilleure base camping-car de l’année » par les lecteurs de notre confrère allemand Promobil ! Le Ducato a même éclipsé le Renault Master du catalogue de la quasi-totalité des constructeurs de campingcars, et si le Ford Transit tient fièrement le second rôle, sa présence reste très discrète face au ténor italien. Cependant un outsider fait son retour dans la cour des porteurs et pourrait bien bousculer cet ordre établi. Car si la seconde génération de Mercedes Sprinter était devenue bien rare sur le marché et se limitait aux fourgons, la nouvelle mouture ne manque pas d’ambitions et s’en donne les moyens, en étant disponible dans toutes les configurations possibles ! Nous avons donc confronté les propositions techniques de la star Ducato et de l’étoile montante Sprinter pour voir si l’Allemand présente d’autres arguments que son prestige pour rivaliser avec la référence et, en fin de compte, si l’effort financier réclamé par le Mercedes est intégralement compensé par ses prestations.
Fiat Ducato
Comme tous les autres porteurs, le Ducato passe aux nouvelles normes de dépollution grâce à la catalyse sélective SCR, basée sur la solution à base d’urée adBlue, alors qu’il était jusqu’ici le seul à s’en passer. L’architecture du moteur reste inchangée, avec un bloc 4 cylindres de 2,3 litres à injection par rampe commune Multijet et suralimenté par un turbo à géométrie variable. Celui-ci se décline en 4 variantes de 120 à 180 ch, en offrant des valeurs de couple supérieures aux anciennes versions et sur des plages plus larges. Le Ducato est exclusivement proposé en traction avec de série une boîte de vitesses manuelle à 6 rapports. En option sur les 3 déclinaisons les plus puissantes (140, 160 et 180 ch), la nouvelle boîte automatique 9 rapports, à convertisseur de couple hydraulique, transmet davantage de couple que la boîte manuelle (+20 Nm sur 160 ch et +50 Nm sur 180 ch) et surtout remplace avantageusement l’ancienne boîte robotisée, tant sur le plan des performances et de l’agrément que de la fiabilité. Quelles que soient la puissance et la transmission, les intervalles d’entretien sont établis à 48 000 km ou 2 ans, comme toujours au premier des deux termes atteint.
MOTEURS ET TRANSMISSIONS
Mercedes Sprinter
Chez Mercedes, l’offre mécanique est principalement déclinée autour du moteur 4 cylindres biturbo de 2 143 cm3, disponible en 114 ch sur traction et propulsion, 143 ch sur traction, propulsion et 4x4, 163 ch sur propulsion et 4x4, et 177 ch en cabine motrice traction exclusivement destinée aux carrossiers pour les transformations en camping-car. Si la cylindrée et les principales valeurs de puissance sont identiques à l’ancienne génération, un travail de fond a été accompli pour réduire les frottements internes, avec pour résultats une réduction des bruits et des vibrations, mais aussi et surtout une optimisation des consommations. Quelle qu’en soit la puissance, ce moteur est alimenté par une rampe commune haute pression et dépollué par adBlue, tout comme le 6 cylindres 3,0 litres de 190 ch disponible sur les versions propulsion et 4x4 et qui constitue une offre unique dans la catégorie des porteurs dérivés de grands utilitaires. Du côté des boîtes de vitesses, l’offre standard sur toutes les motorisations est constituée d’une boîte manuelle à 6 rapports : une proposition bien classique chez le constructeur mais cette boîte est en fait plus nouvelle qu’il y paraît, celleci ayant été profondément revue pour plus de précision, d’agrément et de longévité. En boîtes automatiques, la version à propulsion et son évolution à transmission intégrale peuvent recevoir la 7G-Tronic+ qui comme son nom l’indique compte 7 rapports. En traction, la toute nouvelle boîte 9G-Tronic se montre tout aussi douce que la précédente, tout en étant plus réactive et moins génératrice de surconsommation. Ces deux boîtes fonctionnent avec un convertisseur de couple.
Fiat Ducato
Initialement conçu avec un châssis spécial camping-car, le porteur Fiat peut aussi se décliner en cabine motrice qu’il est possible de brider, notamment, à un châssis Al-Ko.
Le Ducato est proposé en PTAC de 3,3, 3,5 et 4,4t, voire 5,0 t avec un châssis Al-Ko double essieu. Compte tenu de sa genèse, il dispose systématiquement de suspensions spécifiquement dédiées aux camping-cars. En seconde monte, bon nombre d’intervenants, agréés ou non par Fiat, proposent l’adaptation de suspensions pneumatiques.
Mercedes Sprinter
Si le précédent Sprinter n’existait qu’en châssis-cabine propulsion et 4x4, en plus du classique fourgon, le nouveau est proposé en châssis et en tête tractrice, à laquelle on peut accoler un châssis spécifique type Hymer SLC ou Al-Ko, et est dorénavant disponible aussi avec les roues avant motrices. Signalons qu’Hymer propose pour 2020 une version sur châssis d’origine et traction, pour abaisser le prix d’accès. Bref, une multitude de configurations de base qui assurent une adaptation à toutes les transformations possibles ! Selon qu’il est en traction ou en propulsion, les PTAC du Sprinter varient de 3,0 à 4,1 t dans le premier cas et de 3,0 à 5,5t dans le second. Signalons au passage que le modèle 5,5t est dorénavant homologué en essieu arrière à roues simples, plus facile à carrosser en camping-car PL qu’en roues jumelées. Outre les possibilités supplémentaires de transformations permises par la traction, celle-ci confère un allègement de 50 kg par rapport à la propulsion, au bénéfice direct de la charge utile, et un seuil d’accès abaissé de 80 mm. Sur un camping-car carrossé, cela permet soit de disposer d’un double-plancher plus logeable, soit d’augmenter la hauteur intérieure, soit de réduire la hauteur hors-tout.
En plus des suspensions conventionnelles de série, le Sprinter peut recevoir en option sur toutes les versions des suspensions modulaires avec ressorts en plastique renforcé de fibres de verre (GRP) qui réduisent le poids du véhicule et améliorent le confort de conduite, tout en procurant jusqu’à 12 kg de charge utile supplémentaire. Sur les versions propulsion et 4x4, le Sprinter peut recevoir en option une suspension pneumatique arrière, avec une configuration spécifique aux camping-cars qui garantit confort de conduite sur les longs trajets et roulement bas de la carrosserie. L’effort de conception impliqué est réduit par des pré-installations pour le châssis et l’essieu arrière. La suspension pneumatique permet au véhicule d’être abaissé ou soulevé manuellement, facilitant ainsi l’entrée et la sortie des passagers. La fonction de contrôle de niveau est disponible sur les Sprinter équipés du châssis confort et de la suspension pneumatique, à condition qu’ils soient vides ou seulement partiellement chargés.
Fiat Ducato
Le Ducato proposait déjà des systèmes tels que la reconnaissance des feux de route (passage automatique codes / phares), la détection des panneaux de signalisation et l’alerte de franchissement de ligne. Le modèle 2020 ajoute l’ESP incluant le contrôle de stabilité ESC, le Traction+ pour démarrer même en cas de très faible adhérence, l’aide au démarrage en côte (Hill Holder) et le contrôle actif du roulis. On note aussi des équipements présents depuis longtemps en automobile et même devenus courants sur les utilitaires légers, au point de se demander pourquoi le Ducato en était dépourvu : les phares et essuie-glaces automatiques, ainsi que les capteurs de pression des pneus. D’autres nouveautés sont en revanche plus modernes et apportent une réelle plus-value sécuritaire. Le Full Brake Control détecte les obstacles devant le véhicule et alerte le conducteur en cas de danger de collision imminent, sans réaction du conducteur, il intervient en déclenchant automatiquement un freinage d’urgence. Le Rear Cross Path Detection, ou détection d’obstacle transversal arrière, signale les véhicules arrivant latéralement lors d’une sortie de stationnement en marche arrière. Plus connu, le Blind Spot Assist utilise les capteurs du parechocs arrière pour détecter les véhicules présents dans l’anglemort des rétroviseurs extérieurs.
Mercedes Sprinter
Sur le Sprinter, la liste des ADAS (systèmes d’aide à la conduite) disponibles en série ou en option semble sans fin ! On y trouve des dispositifs directement transposés du catalogue automobile de la marque, certains étant inédits sur le segment des grands utilitaires, à l’image du régulateur de vitesse avec maintien de distance et freinage actif ou de l’aide au stationnement avec caméra 360° à vues personnalisables. La liste des aides et équipements de série est déjà conséquente et hormis l’unique airbag frontal côté conducteur (5 de plus sont disponibles en option), elle renvoie davantage à l’automobile premium qu’à l’utilitaire porteur de cellule aménagée. Ainsi le contrôle de stabilité ESP devient-il la « régulation du comportement dynamique adaptative ESP9i » incluant notamment la fonction de stabilisation de remorque et, sur les versions 4x4, le contrôle de traction 4ETS spécifiquement adapté à la transmission intégrale, tout en conservant les fonctions classiques de l’ESP Adaptatif. Le Sprinter intègre également de série la stabilisation en cas
de vent latéral, les feux stop avec un mode clignotant en cas de freinage brutal, les phares à allumage automatique et le démarrage sans clé. Au rang des options, la technologie automobile est aussi de mise. L’aide au stationnement est par exemple disponible avec une classique caméra de recul ou un système 360° multivues, basé sur 4 caméras périmétriques. L’aide au stationnement inclut les fonctions de protection latérale, indiquant la présence d’obstacles tout autour du véhicule et Drive Away Assist : une assistance au démarrage qui limite la vitesse à 3 km/h sur le premier mètre si un obstacle est détecté aux abords du véhicule (sur BVA). L’anti-angle mort, avertissant le conducteur de la présence d’un véhicule dans l’angle mort du rétroviseur, dispose de la fonction Rear Cross Traffic Alert. Celle-ci active un signal si une intersection est détectée lors de la sortie d’une place de stationnement en marche arrière. Le Blind Spot Assist inclut aussi l’avertissement de sortie de véhicule : pendant 3 minutes après l’arrêt du véhicule si l’ouverture d’une porte représente un danger, des alertes visuelles et sonores sont activées. L’alerte de franchissement de ligne ne semble pas démarquer le Sprinter du Ducato, mais l’Allemand ne se contente pas de signaux visuels et sonores assortis de vibrations dans le volant : il peut, en l’absence de rectification du conducteur qui franchirait alors la ligne, replacer le véhicule sur sa voie par un freinage unilatéral.
Des technologies issues de l’auto
Le régulateur actif de distance Distronic est disponible pour la première fois sur le Sprinter. Le système maintient une distance minimale par rapport au véhicule qui précède et réduit la vitesse si la distance par rapport au véhicule qui précède diminue. Si nécessaire, le système ralentit le Sprinter jusqu’à son immobilisation et redémarre automatiquement. Dès que les conditions de circulation le permettent, le véhicule accélère à nouveau jusqu’à la vitesse souhaitée. Si la distance avec le véhicule qui précède est trop faible, la fonction Active Brake Assist envoie un avertissement visuel. En cas de détection d’un danger de collision, le système émet un avertissement sonore. Le système peut en outre soutenir le freinage du conducteur voire freiner en cas d’absence de réaction. Le Sprinter peut également proposer la fonction Attention Assist, qui détecte les baisses de concentration du conducteur. Le système enregistre le comportement du conducteur pendant les 15 à 20 premières minutes de trajet routier ou autoroutier à plus de 60 km/h et définit
un « profil de conduite », basé sur l’analyse de plus de 70 paramètres. En cas de somnolence ou de moindre vigilance, le système émet un avertissement sonore et visuel, ainsi qu’un message demandant au conducteur de faire une pause. Un schéma sur le tableau de bord indique le niveau de concentration du conducteur et le temps de trajet depuis la dernière pause. Signalons enfin l’interface multimédia MBUX (MercedesBenz User Experience) avec un écran haute définition de 10,25’’ de diagonale dont les fonctionnalités sont déclenchées par l’écran tactile, par les commandes sensorielles au volant ou une commande vocale optimisée pour une activation par mots-clés et la compréhension du langage courant. En outre, le système télématique apprend à connaître l’utilisateur à partir de son comportement précédent et fait des suggestions adaptées, par exemple des destinations, des contacts ou des stations de radio.
Fiat Ducato
Avec le Fiat, même si les moteurs ont sensiblement évolué, on reste en terrain connu. L’ambiance intérieure de la cabine est classique : elle reste très typée utilitaire avec notamment un volant encore incliné. La position de conduite rappelle également plus celle d’une camionnette que d’une voiture, avec une assise assez haute et une amplitude longitudinale qui oblige les plus d’1m80 à conduire jambes repliées. Il n’en demeure pas moins que le confort prodigué permet d’envisager sereinement de passer plusieurs heures à son volant. Le réglage en hauteur des accoudoirs peut toujours sembler fastidieux de prime abord, avec la molette sous l’accoudoir, mais il s’ajuste au millimètre ! La planche de bord reste en plastique dur : un grief récurrent à l’heure des garnitures moussées. Mais son grain flatte l’oeil et il ne faut pas oublier que le plastique dur est moins sensible aux rayures : il gardera son aspect plus longtemps, une caractéristique qui prendra tout son sens au jour de la revente… A la conduite, la direction reste celle d’un véhicule utilitaire. Le volant de grand diamètre permet des manoeuvres aisées, mais le ressenti reste encore un peu lourd à basse vitesse et avec un point milieu encore léger à allure routière. L’ergonomie des principales commandes est bonne, tout étant à portée de main, mais certaines fonctions ne sont pas particulièrement intuitives, à l’image des menus de l’ordinateur de bord ou de la navigation d’origine Fiat qui équipera certains porteurs.
Mercedes Sprinter
A bord du Sprinter, aucun doute possible : comme sur les voitures de la marque, le « toucher de conduite » Mercedes est reconnaissable entre mille ! Tant en traction qu’en propulsion, la direction est souple en manoeuvres, grâce à son assistance électrique asservie à la vitesse. Ainsi, tout en ayant un volant typé automobile tant par ses dimensions que son implantation verticale, retrouve-t-on la sensation des précédents Sprinter à volant de grand diamètre et à jante fine… le côté « camion » en moins ! Le siège présente une bonne amplitude de réglages, tant en hauteur d’assise qu’au plan longitudinal, offrant une position plus typée automobile que dans le Ducato. Le Fiat prend une revanche pour ceux qui aiment rouler le coude à la portière ou qui ne sont pas adeptes du télépéage, la découpe de contreporte de l’italien ne présente aucune gêne particulière, contrairement à l’allemand où les garnitures plastiques arrivent un peu plus haut que la vitre baissée à son maximum en présence de stores latéraux type Remis. Un grief valable sur les profilés mais qui disparaît sur les intégraux, plus larges. Sur le Sprinter aussi, les garnitures de cabine sont en plastique dur, mais le grain encore plus fin que sur le Fiat ferait presque illusion au premier regard ! On aime ou non, mais la console multimédia rapportée façon tablette renvoie directement à l’univers des berlines de la marque tout en offrant une ergonomie parfaitement intuitive. L’effet est particulièrement
flatteur à l’oeil en présence du système MBUX à grand écran de 10,25 pouces (26 cm) qui présente une finition laquée noire.
Bons porteurs !
A l’épreuve de la route, les deux porteurs présentent de réelles qualités tout autant que des personnalités différenciées. Les suspensions du Fiat affichent une certaine sècheresse sur les irrégularités de revêtement mais les mouvements de caisse sont bien maîtrisés, même avec une cellule haute qui remonte le centre de gravité, et le confort reste préservé. On retrouve ici les effets du châssis Fiat CCS (Camping-car Special), prévu dès le développement initial du Ducato et dont les voies arrière élargies s’accommodent parfaitement de la carrosserie rapportée. Et lorsque la cabine Ducato est bridée à un châssis Al-Ko, le résultat est encore plus convaincant ! L’insonorisation et l’isolation des vibrations ont, de toute évidence, compté parmi les préoccupations premières des équipes de développement Fiat. En regard des plus anciens Ducato, les progrès méritent d’être salués. La commande de boîte manuelle, suffisamment précise en guidage et en verrouillage, demande encore une relative décomposition du geste. En automatique, la nouvelle boîte à 9 rapports et convertisseur de couple d’origine ZF fera oublier sans le moindre regret l’ancienne boîte robotisée... Avec le porteur Sprinter sur châssis Mercedes, tant en traction qu’en propulsion, les oscillations de la caisse sont d’autant plus perceptibles que la carrosserie est haute. Ainsi, les enchaînements de virages ne seront-ils pas du goût de tous… Ce porteur pourra même raviver chez certains le souvenir des vieilles berlines américaines avec lesquelles le Sprinter partage son sélecteur de boîte auto au volant… Chacun est libre d’aimer ou non, mais ici on oubliera le charme vintage et le ronronnement du V8 culbuté ! Pus sérieusement, cette « souplesse Pullman » portée à son paroxysme permettra de passer les saignées importantes sans appréhension et ménagera les vertèbres des occupants, même sur les plus longs trajets. Tout en préservant un confort de très haut niveau, le phénomène est en grande partie oublié avec l’adaptation de la cabine Mercedes à un châssis Al-Ko ou à la structure SLC Hymer. On dénote encore quelques légères prises de roulis au braquage mais l’ensemble se cale rapidement sur ses appuis, tandis que les transferts de masses au freinage ne font plus plonger l’avant du véhicule. Au chapitre de l’insonorisation mécanique et de la filtration des vibrations, il est incontestable que chez Mercedes, on maîtrise le sujet ! Aucune fausse note à ce sujet, donc, si ce n’est le sifflement du turbo, présent en relances sur les moteurs les moins puissants… De ce point de vue le bloc 177 ch, spécifiquement développé pour les camping-cars, est une réussite ! Riche en couple, il ne donne jamais l’impression de devoir être pris en défaut et son association à la boîte automatique 9 rapports confirme, si besoin en était encore, la maîtrise du constructeur.