On interdit le stationnement même à Toulon-sur-Arroux !
J’aurais pu commencer en vous posant la question suivante : « à votre avis, où ces photos ont-elles été prises ? » Beaucoup m’auraient sans doute répondu « dans une station balnéaire » ou encore « dans un endroit touristique ». Eh bien non, ces panneaux ont été installés dans un paisible village à la porte Sud du Morvan, une charmante bourgade dans laquelle j’ai passé les trois premières années de ma vie : Toulonsur-Arroux. Pour bien comprendre la teneur de mon propos, il faut d’abord revenir aux fondamentaux : que signifient ces panneaux ? Pourquoi ontils été mis en place ? Par qui ? Si on demande au commun des mortels ce qu’il en pense, il dira qu’il s’agit d’une interdiction de stationner visant les camping-cars… Ce qu’il faut savoir, c’est que ces panneaux-là ne veulent strictement rien dire du tout. Ils ne sont pas réglementaires car non inscrits au Code de la route, code auquel il faut se référer en priorité en matière de circulation et de stationnement des véhicules. Mais là où les choses deviennent plus sérieuses, c’est qu’en plus d’être non réglementaires – ce qui est un moindre mal – ces panneaux sont illégaux car ils affichent une interdiction discriminatoire. Je m’explique : les campingcars sont des véhicules classés M1, comme les voitures particulières (véhicule de tourisme de moins de 3,5 tonnes comportant outre le siège du conducteur 8 places assises au maximum). Or, on ne peut à l’intérieur d’une même catégorie, interdire le stationnement à certains véhicules et pas à d’autres… Imaginez un parking sur lequel on aurait interdit le stationnement des SUV alors que toutes les autres voitures pourraient y accéder librement, je vous laisse prendre la mesure d’une telle interdiction et du tollé que cela déclencherait ! C’est exactement ce qui se passe pour les campingcars, et cela ne choque pas grand monde parce que c’est devenu courant… Hélas ! Alors, me direz vous, comment en est on arrivé là ? Eh bien il s’agit d’un mal pernicieux qui s’est installé progressivement, au fur et à mesure de l’expansion du phénomène camping-car. En effet, les camping-caristes ont, dès le début, été classés « mauvais élèves » par les comités départementaux du tourisme. Non pas comme on le prétend à cause de comportements inciviques, mais tout simplement parce qu’ayant été désignés comme étant le « créneau le moins rentable du tourisme ». Effectivement, une fois son véhicule acquis, le camping-cariste peut se contenter d’eau fraîche et de gazole ! Il n’a recours à aucune structure d’accueil, son camping-car a d’ailleurs été conçu pour cela : lui offrir liberté, indépendance, et autonomie en toutes circonstances. Et c’est bien-là que le bât blesse ! Les professionnels du tourisme et les communes ont vu d’un très mauvais oeil ces vacanciers qui ont l’outrecuidance de profiter de la vie en s’affranchissant des péages. Il fallait réagir avant que l’hémorragie ne soit fatale. Alors, on s’est mis à interdire, au mépris des lois de la République, mais qu’importe, le pognon avant tout ! De quelles tares rédhibitoires n’a-t-on pas affublé les campingcaristes et leurs véhicules pour justifier l’injustifiable : sans-gênes, avares, encombrants, laids, sales… La liste est longue et non exhaustive. Diriger les camping-caristes vers une étape obligatoire et payante était devenu une priorité, quand bien même il fallait tordre le cou à la loi ! Et c’est ce qui c’est passé à Toulon-sur-Arroux. Ici comme ailleurs, la municipalité a croqué le fruit défendu. Mais comment peut-on prendre une mesure aussi abjecte, priver par une simple décision arbitraire – et illégale – des campingcaristes, souvent paisibles retraités, de leur bien le plus précieux, le plus inaliénable : leur liberté. Comment peut-on décider, comme un monarque, édicter ses propres règles et poser une signalisation non conforme dans le but de soutirer de l’argent à des touristes en leur imposant l’étape nocturne dans une structure d’accueil dont ils n’ont nullement besoin et qui constitue l’antithèse même de la philosophie des loisirs qu’ils ont choisie. Y avait-il à Toulon-sur-Arroux « l’invasion » que les grandes stations balnéaires évoquent lorsqu’elles tentent de justifier leurs arrêtés illégaux envers les camping-cars ? (…). Jean-Yves Morand