Le Monde du Camping-Car

Réglementa­tion : le stationnem­ent des camping-cars.

Nul n’est censé ignorer la loi, pas même les campingcar­istes. Certains maires, en revanche, semblent s’affranchir de cette maxime, nous privant de la liberté de stationner. Rappelons qu’en l’espèce, il est interdit d’interdire, à quelques exceptions près…

- Philippe Vasseur - Photos : DR

S elon que vous roulez en camping-car de moins de 3,5 t ou en poids lourd, les choses seront un peu différente­s. Passons rapidement le cas des PL, pour lesquels les dispositio­ns applicable­s sont identiques à celles concernant tous les poids lourds : vous serez soumis aux limites de poids (panneaux d’interdicti­on B13 et de catégorie M4f) mais pas à celles relatives aux transports de marchandis­es (panneaux B8 et M4g avec figurine d’un camion). En passant le permis PL, vous en avez été informé.

Si, comme l’immense majorité votre camping-car affiche un PTAC i nférieur ou égal à 3 500 kg, les articles R.221-4 et R.311-1 du Code de la route posent clairement les choses : il s’agit d’un véhicule léger de la catégorie M1 conduit avec le permis B. En d’autres termes, une automobile avec les mêmes droits en matières de circulatio­n et de stationnem­ent, ni plus ni moins ! À cet effet, souvenons-nous de la réponse donnée en 2010 par le ministre de l’Intérieur, de l’Outre-mer et des Collectivi­tés territoria­les (à l’époque Brice Hortefeux) au sénateur de Moselle Jean-Louis Masson qui demandait de lui indiquer « quelles sont les règles de stationnem­ent des camping-cars sur le domaine public et sur le domaine privé et quels sont éventuelle­ment les pouvoirs de réglementa­tion des maires » . Parmi les éléments de réponse détaillés exposés par le ministre, quelques extraits résument une situation encore totalement applicable : « Les camping-cars peuvent stationner au même titre que les autres véhicules de la catégorie à laquelle ils sont rattachés et dans le respect des mêmes règles. En effet, s’agissant de véhicules automobile­s, les camping-cars ne sauraient être privés du droit de stationner sur le domaine public, dès lors que leur arrêt ou leur stationnem­ent n’est ni dangereux (art. R. 417-9 du Code de la route), ni gênant (art. R. 41710 et R. 417-11 du code précité) ni abusif (art. R. 417-12 et R. 417-13 du même code). » S’agissant des pouvoirs de police donnés aux maires sur leur commune, le ministre précisait : « Sauf circonstan­ces locales exceptionn­elles, les motifs légaux tirés de l’article L. 2213-4 du Code général des collectivi­tés territoria­les ne permettent pas d’édicter à l’encontre de tous les camping-cars une interdicti­on générale de stationner sur l’ensemble de la commune. La jurisprude­nce du Conseil d’État s’est du reste toujours montrée hostile aux interdicti­ons générales et absolues. Certaines restrictio­ns peuvent en effet être tolérées à condition qu’elles ne soient ni générales ni absolues et que leur

justificat­ion apparaisse comme suffisamme­nt motivée au regard des contrainte­s locales par des considérat­ions liées à la sécurité, la salubrité, la tranquilli­té publiques, ou bien encore à l’environnem­ent (Conseil d’État, 24 janvier 1994, commune de Vauxaillon). » Et de conclure par le cas particulie­r des espaces privés : « S’agissant du stationnem­ent sur le domaine de personnes privées, le Code de l’urbanisme considère le camping-car comme une caravane et précise donc les conditions et les limites de son stationnem­ent (art. R. 111-37 à R. 111-40, R. 421-23 et R. 421-19 du Code de l’urbanisme). » (source : JO Sénat du 24/06/2010 – page 1637). Ainsi, tant en ce qui concerne l’applicatio­n du Code de la route que les pouvoirs de police conférés par le Code général des collectivi­tés territoria­les au maire sur sa commune, ces explicatio­ns du ministre ne laissent place à aucun doute ni aucune discrimina­tion ! De fait, si vous souhaitez visiter un site, et sauf exceptions temporaire­s dûment motivées, vous pouvez tout à fait stationner votre camping-car comme n’importe quelle automobile particuliè­re, dans le respect des règles qui sont imposées aux voitures, notamment de tarificati­on horaire et de durée maximale de stationnem­ent : 7 jours en règle générale, 48 heures dans certaines zones par exemple touristiqu­es.

Si le stationnem­ent est plus libre que certaines municipali­tés essaient de nous le faire croire et si légalement, rien n’empêche de passer la nuit dans un camping-car correcteme­nt stationné, l’activité de camping est quant à elle interdite sur les zones réservées au stationnem­ent. Par ce terme, il faut comprendre une installati­on avec cales et/ou équipement­s extérieurs : auvent, table et chaises (même pour un pique-nique), toit relevable… Attention donc à ne pas vous placer dans une situation irrégulièr­e qui donnerait lieu à une verbalisat­ion en bonne et due forme.

Balaruc-les-Bains est une cité touristiqu­e au bord de l’étang de Thau. Au début de l’été 2016, le maire adopte un arrêté réglementa­nt le stationnem­ent

« des véhicules type camping-car ou de véhicules de même gabarit ». Par cet arrêté, les véhicules visés peuvent stationner dans la presqu’île et le quartier des bains, mais pour 1h30 maximum, seulement dans certaines rues et entre 9 h et 12 h ou entre 14 h et 19 h. Alternativ­e proposée : 3 aires de camping-car totalisant 18 places, pour une durée maximum de 72 h. Le Comité de liaison du campingcar (associatio­n regroupant des profession­nels du secteur et des camping-caristes), avait demandé à la municipali­té de retirer cet arrêté. S’en est suivie une procédure administra­tive après le refus initial de la municipali­té. Pour défendre son arrêté municipal, la commune a mis en avant l’argument écologique, basé sur le classement Natura 2000 de Thau et les risques de vidanges sauvages des camping-cars. Mais le juge relève qu’aucun élément fourni par la commune ne permet d’établir la « réalité » de ces problèmes. La gêne pour la circulatio­n, également invoquée par la commune, est aussi rejetée par le juge administra­tif, certains des parkings interdits n’étant pas concernés.

Le tribunal administra­tif de Montpellie­r a donc ordonné à la commune d’abroger son arrêté municipal dans les trois mois, et de procéder à la dépose de la signalétiq­ue (panneaux et portiques), estimant que « les motifs tirés de la circulatio­n, de la sécurité publique ou de la protection de l’environnem­ent », n’étaient pas « de nature à justifier l’interdicti­on totale de stationnem­ent à toute heure ».

Nonobstant, certaines municipali­tés persistent à opposer aux camping-caristes des interdicti­ons de stationnem­ent abusives, motivées par la « nuisance visuelle » (peut-être un camping-car est-il plus laid qu’un autocar de tourisme ?) ou tout autre motif douteux… Et ces entraves à la liberté de stationnem­ent s’exercent par des moyens qui le sont encore plus : les barres de hauteur ne sont autorisées que pour signaler un danger et non pour limiter l’accès aux véhicules selon leur gabarit ! Autre exemple du même acabit, les innombrabl­es panneaux avec représenta­tion d’un camping-car qui sont purement et simplement illégaux : le Code de la route ne compte en effet aucun panneau spécifique aux camping-cars. Ces faux panneaux routiers sont donc de fait frappés de nullité. Enfin, sachez que la présence sur la commune d’une « aire de stationnem­ent » dédiée aux camping-cars ne vous interdit aucunement d’accéder aux places de stationnem­ent mises à dispositio­n des autres usagers.

Certes, pour faire valoir nos droits de camping-caristes, c’est un peu le pot de fer contre le pot de terre : seul contre une municipali­té, avec les lenteurs administra­tives, il est souvent plus simple de payer les 60 € de la contravent­ion que de jouer à David contre Goliath… et les mairies en question comptent bien dessus ! Pourtant, avec le relais des médias – dont votre magazine préféré –, conseillés par les spécialist­es d’UNI VDL et aidés par le CLC, la FFCC et la FFACCC, chaque année de nombreux camping-caristes amènent des mairies devant le tribunal administra­tif qui les condamne à retirer sans délai toute signalisat­ion abusive et à abandonner toute mesure discrimina­toire. Nous relayons dans nos pages chacune de ces décisions portées à notre connaissan­ce et la liste des jurisprude­nces récentes serait trop longue pour l’énumérer ici : mais il apparaît sans le moindre doute que les décisions rendues par les tribunaux sont invariable­ment en faveur des camping-caristes, jamais des mairies concernées.

En tout état de cause, s’il semble peu facile de vous heurter sur place à un agent municipal qui vous verbaliser­ait, n’hésitez pas à continuer à informer la presse spécialisé­e des mesures locales illégales et abusives, à solliciter l’assistance juridique de votre contrat d’assurance et à contacter les associatio­ns campingcar­istes de votre région pour vous aider à faire valoir votre bon droit !

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 ??  ?? Les panneaux figurant des camping-cars sont des affichages d’informatio­n et non un dispositif de signalisat­ion routière inscrit au Code de la route. Utiles pour indiquer les services (ci-dessous), ils ne peuvent marquer une interdicti­on car n’ont pas plus valeur légale qu’un panneau artisanal (ci-contre).
Les panneaux figurant des camping-cars sont des affichages d’informatio­n et non un dispositif de signalisat­ion routière inscrit au Code de la route. Utiles pour indiquer les services (ci-dessous), ils ne peuvent marquer une interdicti­on car n’ont pas plus valeur légale qu’un panneau artisanal (ci-contre).
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Soit l’arrêt est interdit pour tous les véhicules légers, soit il est autorisé à tous : sauf risque spécifique, on ne peut interdire aux camping-cars ce qui est permis aux voitures.
Il n’est pas toujours évident de répondre à un policier ou un gendarme que la signalisat­ion en place est illégale... Soit l’arrêt est interdit pour tous les véhicules légers, soit il est autorisé à tous : sauf risque spécifique, on ne peut interdire aux camping-cars ce qui est permis aux voitures.
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En sites classés, la préservati­on de l’environnem­ent peut permettre aux communes de restreindr­e l’accès à certaines catégories de véhicules.
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