Réglementation : le stationnement des camping-cars.
Nul n’est censé ignorer la loi, pas même les campingcaristes. Certains maires, en revanche, semblent s’affranchir de cette maxime, nous privant de la liberté de stationner. Rappelons qu’en l’espèce, il est interdit d’interdire, à quelques exceptions près…
S elon que vous roulez en camping-car de moins de 3,5 t ou en poids lourd, les choses seront un peu différentes. Passons rapidement le cas des PL, pour lesquels les dispositions applicables sont identiques à celles concernant tous les poids lourds : vous serez soumis aux limites de poids (panneaux d’interdiction B13 et de catégorie M4f) mais pas à celles relatives aux transports de marchandises (panneaux B8 et M4g avec figurine d’un camion). En passant le permis PL, vous en avez été informé.
Si, comme l’immense majorité votre camping-car affiche un PTAC i nférieur ou égal à 3 500 kg, les articles R.221-4 et R.311-1 du Code de la route posent clairement les choses : il s’agit d’un véhicule léger de la catégorie M1 conduit avec le permis B. En d’autres termes, une automobile avec les mêmes droits en matières de circulation et de stationnement, ni plus ni moins ! À cet effet, souvenons-nous de la réponse donnée en 2010 par le ministre de l’Intérieur, de l’Outre-mer et des Collectivités territoriales (à l’époque Brice Hortefeux) au sénateur de Moselle Jean-Louis Masson qui demandait de lui indiquer « quelles sont les règles de stationnement des camping-cars sur le domaine public et sur le domaine privé et quels sont éventuellement les pouvoirs de réglementation des maires » . Parmi les éléments de réponse détaillés exposés par le ministre, quelques extraits résument une situation encore totalement applicable : « Les camping-cars peuvent stationner au même titre que les autres véhicules de la catégorie à laquelle ils sont rattachés et dans le respect des mêmes règles. En effet, s’agissant de véhicules automobiles, les camping-cars ne sauraient être privés du droit de stationner sur le domaine public, dès lors que leur arrêt ou leur stationnement n’est ni dangereux (art. R. 417-9 du Code de la route), ni gênant (art. R. 41710 et R. 417-11 du code précité) ni abusif (art. R. 417-12 et R. 417-13 du même code). » S’agissant des pouvoirs de police donnés aux maires sur leur commune, le ministre précisait : « Sauf circonstances locales exceptionnelles, les motifs légaux tirés de l’article L. 2213-4 du Code général des collectivités territoriales ne permettent pas d’édicter à l’encontre de tous les camping-cars une interdiction générale de stationner sur l’ensemble de la commune. La jurisprudence du Conseil d’État s’est du reste toujours montrée hostile aux interdictions générales et absolues. Certaines restrictions peuvent en effet être tolérées à condition qu’elles ne soient ni générales ni absolues et que leur
justification apparaisse comme suffisamment motivée au regard des contraintes locales par des considérations liées à la sécurité, la salubrité, la tranquillité publiques, ou bien encore à l’environnement (Conseil d’État, 24 janvier 1994, commune de Vauxaillon). » Et de conclure par le cas particulier des espaces privés : « S’agissant du stationnement sur le domaine de personnes privées, le Code de l’urbanisme considère le camping-car comme une caravane et précise donc les conditions et les limites de son stationnement (art. R. 111-37 à R. 111-40, R. 421-23 et R. 421-19 du Code de l’urbanisme). » (source : JO Sénat du 24/06/2010 – page 1637). Ainsi, tant en ce qui concerne l’application du Code de la route que les pouvoirs de police conférés par le Code général des collectivités territoriales au maire sur sa commune, ces explications du ministre ne laissent place à aucun doute ni aucune discrimination ! De fait, si vous souhaitez visiter un site, et sauf exceptions temporaires dûment motivées, vous pouvez tout à fait stationner votre camping-car comme n’importe quelle automobile particulière, dans le respect des règles qui sont imposées aux voitures, notamment de tarification horaire et de durée maximale de stationnement : 7 jours en règle générale, 48 heures dans certaines zones par exemple touristiques.
Si le stationnement est plus libre que certaines municipalités essaient de nous le faire croire et si légalement, rien n’empêche de passer la nuit dans un camping-car correctement stationné, l’activité de camping est quant à elle interdite sur les zones réservées au stationnement. Par ce terme, il faut comprendre une installation avec cales et/ou équipements extérieurs : auvent, table et chaises (même pour un pique-nique), toit relevable… Attention donc à ne pas vous placer dans une situation irrégulière qui donnerait lieu à une verbalisation en bonne et due forme.
Balaruc-les-Bains est une cité touristique au bord de l’étang de Thau. Au début de l’été 2016, le maire adopte un arrêté réglementant le stationnement
« des véhicules type camping-car ou de véhicules de même gabarit ». Par cet arrêté, les véhicules visés peuvent stationner dans la presqu’île et le quartier des bains, mais pour 1h30 maximum, seulement dans certaines rues et entre 9 h et 12 h ou entre 14 h et 19 h. Alternative proposée : 3 aires de camping-car totalisant 18 places, pour une durée maximum de 72 h. Le Comité de liaison du campingcar (association regroupant des professionnels du secteur et des camping-caristes), avait demandé à la municipalité de retirer cet arrêté. S’en est suivie une procédure administrative après le refus initial de la municipalité. Pour défendre son arrêté municipal, la commune a mis en avant l’argument écologique, basé sur le classement Natura 2000 de Thau et les risques de vidanges sauvages des camping-cars. Mais le juge relève qu’aucun élément fourni par la commune ne permet d’établir la « réalité » de ces problèmes. La gêne pour la circulation, également invoquée par la commune, est aussi rejetée par le juge administratif, certains des parkings interdits n’étant pas concernés.
Le tribunal administratif de Montpellier a donc ordonné à la commune d’abroger son arrêté municipal dans les trois mois, et de procéder à la dépose de la signalétique (panneaux et portiques), estimant que « les motifs tirés de la circulation, de la sécurité publique ou de la protection de l’environnement », n’étaient pas « de nature à justifier l’interdiction totale de stationnement à toute heure ».
Nonobstant, certaines municipalités persistent à opposer aux camping-caristes des interdictions de stationnement abusives, motivées par la « nuisance visuelle » (peut-être un camping-car est-il plus laid qu’un autocar de tourisme ?) ou tout autre motif douteux… Et ces entraves à la liberté de stationnement s’exercent par des moyens qui le sont encore plus : les barres de hauteur ne sont autorisées que pour signaler un danger et non pour limiter l’accès aux véhicules selon leur gabarit ! Autre exemple du même acabit, les innombrables panneaux avec représentation d’un camping-car qui sont purement et simplement illégaux : le Code de la route ne compte en effet aucun panneau spécifique aux camping-cars. Ces faux panneaux routiers sont donc de fait frappés de nullité. Enfin, sachez que la présence sur la commune d’une « aire de stationnement » dédiée aux camping-cars ne vous interdit aucunement d’accéder aux places de stationnement mises à disposition des autres usagers.
Certes, pour faire valoir nos droits de camping-caristes, c’est un peu le pot de fer contre le pot de terre : seul contre une municipalité, avec les lenteurs administratives, il est souvent plus simple de payer les 60 € de la contravention que de jouer à David contre Goliath… et les mairies en question comptent bien dessus ! Pourtant, avec le relais des médias – dont votre magazine préféré –, conseillés par les spécialistes d’UNI VDL et aidés par le CLC, la FFCC et la FFACCC, chaque année de nombreux camping-caristes amènent des mairies devant le tribunal administratif qui les condamne à retirer sans délai toute signalisation abusive et à abandonner toute mesure discriminatoire. Nous relayons dans nos pages chacune de ces décisions portées à notre connaissance et la liste des jurisprudences récentes serait trop longue pour l’énumérer ici : mais il apparaît sans le moindre doute que les décisions rendues par les tribunaux sont invariablement en faveur des camping-caristes, jamais des mairies concernées.
En tout état de cause, s’il semble peu facile de vous heurter sur place à un agent municipal qui vous verbaliserait, n’hésitez pas à continuer à informer la presse spécialisée des mesures locales illégales et abusives, à solliciter l’assistance juridique de votre contrat d’assurance et à contacter les associations campingcaristes de votre région pour vous aider à faire valoir votre bon droit !