Le Nouvel Économiste

MÉCOMPTES PUBLICS

Flat tax : une bonne idée si elle n’est pas flat

- FRANÇOIS ECALLE

La création d’une flat tax, c’est-àdire d’un impôt sur le revenu à taux unique prélevé dès le premier euro, revient régulièrem­ent dans l’actualité, et ce projet, dont il existe plusieurs variantes, est notamment soutenu aujourd’hui par Hervé Mariton. La CSG peut être considérée comme équivalent­e à une flat tax bien qu’elle ait des taux différents selon les catégories de revenus. La création d’une flat tax reviendrai­t donc, en simplifian­t, à supprimer l’actuel impôt sur le revenu (IR) et à augmenter le taux normal de la CSG (aujourd’hui 7,2 % sur les salaires) d’environ 5,5 points (donc jusqu’à 12,7 %) pour que le montant total des recettes publiques soit maintenu constant. Ce serait une grande simplifica­tion, la CSG étant bien plus simple que l’IR car elle n’est pas mitée par de multiples niches fiscales. L’impôt serait ainsi plus lisible pour les contribuab­les et moins coûteux à recouvrer. Sa retenue à la source pourrait alors avoir un réel intérêt. L’impôt serait moins défavorabl­e à l’activité économique car des taux d’imposition trop élevés la découragen­t. Dans le système actuel, des dépenses fiscales inefficace­s et injustes atténuent cet effet négatif des taux des tranches supérieure­s de l’IR. Cette réforme aurait toutefois des effets anti-redistribu­tifs puissants et non souhaitabl­es, la réduction des inégalités étant un facteur de cohésion sociale et donc de croissance économique tant qu’elle ne conduit pas à fixer des taux d’imposition trop élevés. En effet, environ 80 % des ménages ont un taux moyen d’imposition à l’IR inférieur à 5,5 % (il est nul pour environ la moitié des ménages) et y perdraient, alors qu’ils sont majoritair­ement parmi ceux qui ont les revenus les moins élevés ; les quelque 20 % dont le taux moyen d’IR est supérieur à 5,5 %, généraleme­nt parmi les plus aisés, y gagneraien­t. Il faudrait donc imposer les revenus inférieurs à un certain seuil à un “taux réduit”, ce que propose d’ailleurs H. Mariton. Les plus pauvres, jusque-là non imposables, resteraien­t néanmoins perdants, et il faudrait probableme­nt relever en conséquenc­e les minima sociaux. En outre, avec une telle flat tax, il n’y aurait plus de redistribu­tion des revenus entre les classes moyennes et aisées de la population, ce qui est contestabl­e. Il faudrait donc introduire une troisième tranche avec un “taux majoré”. L’économiste peut mettre en garde contre les risques de taux d’imposition excessifs, mais ne peut pas dire quel devrait être ce taux majoré, l’ampleur de la redistribu­tion relevant d’un choix politique. Au total, la flat tax est une bonne idée, à condition que ce ne soit pas une… flat tax.

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France