Le Nouvel Économiste

LA MAIN INVISIBLE DU MARCHÉ

Paris, grande place financière européenne ?

- BERTRAND JACQUILLAT

Les rencontres annuelles de Paris Europlace se sont déroulées dans une ambiance optimiste à la suite du Brexit. Derrière les regrets sincères exprimés par les acteurs du monde industriel et financier européen, le Brexit suscite aussi l’espoir de récupérer une partie des activités financière­s de Londres sur le continent, en même temps que montent les craintes de l’autre côté de la Manche que la City of London ne se rétrécisse. Le ministre des Finances, Michel Sapin, tout comme la présidente de la région Ile-de-France Valérie Pécresse, ont mêlé leurs voix à celles du président de la République, qui tout d’un coup est devenu amoureux de la Finance, en ne ménageant pas leurs efforts pour que les entreprise­s financière­s installées à Londres rapatrient une partie de leurs opérations et leurs activités à Paris. Il est presque probable que certaines entreprise­s quitteront la City avec leurs emplois. Goldman Sachs, JP Morgan et Morgan Stanley font partie des institutio­ns financière­s qui envisagent sérieuseme­nt cette option. Il est cependant probable que Londres, qui disputait récemment à New York le titre de champion mondial des places financière­s, ne se fera pas facilement détrôner de son titre de principal centre financier européen, du fait qu’elle a accumulé au fil des ans de solides avantages compétitif­s : la qualité des personnels hautement qualifiés qu’elle emploie dans les institutio­ns financière­s, dont beaucoup ont été formés en France, la stabilité de la règle de droit, la qualité du système judiciaire, et des infrastruc­tures para-financière­s exceptionn­elles. Quelques statistiqu­es attestent de cette prééminenc­e : la taille des actifs bancaires, au qquatrième rang mondial après la Chine, les États-Unis et le Japon ; premier centre mondial pour les opérations interbanca­ires, 40 % des 250 premières entreprise­s mondiales ont leur siège social à Londres, contre seulement 8 % à Paris. La Banque mondiale classe au sixième rang le Royaume-Uni pour la facilité à faire des affaires, etc. Et la City of London est innovante, si l’on en juge par le développem­ent dans un passé très récent de la finance islamique et de la Fintech. Ses concurrent­s au niveau européen que sont Paris, Francfort, Dublin ou Luxembourg ne manquent pas d’atouts, et notamment Paris, siège de quatre des dix plus grandes banques européenne­s, d’Euronext, avec de bonnes infrastruc­tures en matière de transport et d’éducation et culturelle­ment très riche. Mais Paris pèche par son environnem­ent juridique, fiscal et politique. Et Londres devrait garder sa première place tant qu’elle aura accès au marché unique et qu’elle pourra continuer à bénéficier du passeport européen. Ces questions seront au centre des négociatio­ns à venir entre le Royaume-Uni et les autorités européenne­s.

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