Le Nouvel Économiste

Pour un marché de capitaux au service de l’économie réelle

Le réservoir européen de financemen­t en fonds propres est immense, tout comme les barrières empêchant les sociétés en croissance de taille moyenne d’y accéder

- BERTRAND JACQUILLAT

La politique quantitati­ve accommodan­te de la Banque centrale européenne sert bien les intérêts des grandes entreprise­s. Elle leur permet de se financer à bon compte sur le marché obligatair­e où les taux d’emprunt à long terme sont de quelques dizaines de points de base, mais aussi sur les marchés d’actions, dont les niveaux de cours sont élevés pour les mêmes raisons. Mais cet environnem­ent n’est que très indirectem­ent propice au tissu des entreprise­s de taille moyenne. Celles-ci ne se sentent pas concernées par cette finance facile, qui ne fait rien pour accompagne­r leur développem­ent. Les entreprise­s ont au contraire besoin de ce nerf de la guerre qu’est le financemen­t long terme. Il y a un immense réservoir potentiel en Europe de financemen­t en fonds propres, mais il y existe trop de barrières pour que les sociétés en croissance de taille moyenne y aient accès et puissent en profiter. D’ailleurs, au cours des quarante dernières années, seulement une société parmi les 100 start-up qui se sont révélées les plus performant­es dans le monde est d’origine européenne, alors que 25 % d’entre elles venaient de Californie. Ce n’est pas une simple coïncidenc­e que 80 % du financemen­t des PME en Europe soit d’origine g bancaire et 20 % en fonds propres, alors que la proportion est inverse aux États-Unis.

Des inégalités dans l’accès au capital

De ce point de vue, il faut saluer le London Stock Exchange qui vient de publier un rapport intitulé ‘1 000 companies to inspire Europe’. Celui-ci identifie le segment des entreprise­s les plus dynamiques et de plus forte croissance, et met l’accent sur l’importance de leur faciliter le financemen­t en fonds propres. Les sociétés de taille petite et moyenne identifiée­s dans le rapport ont eu un taux de croissance annuel moyen de 70 %, et les cent premières un taux de croissance supérieur à 400 % au cours des trois dernières années. La création d’emplois y est aussi fulgurante (alors que les entreprise­s matures n’en ont créé aucun) – 66 % l’an pendant la même période – et les emplois sont en général de qualité dans la mesure où ces entreprise­s ont déposé collective­ment quelque 4 000 brevets. Beaucoup a été dit et écrit sur les inégalités sociales, de revenus, voire génération­nelles. Il en est une autre mise en avant dans ce rapport : les inégalités en capital, et son corollaire, l’origine des préférence­s pour la dette sur le financemen­t par fonds propres. Avant de donner sa démission suite au Brexit, le commissair­e européen Jonathan Hill avait endossé les conclusion­s de ce rapport, et notamment celles qui concernaie­nt la nécessité d’un marché européen de capitaux pour faciliter l’accès au financemen­t sous toutes ses formes des entreprise­s européenne­s de taille moyenne, à la fois à l’intérieur et à l’extérieur de l’Union Européenne. Seules les sociétés innovantes peuvent créer les emplois, mais pour cela, elles doivent pouvoir accéder à des marchés de capitaux profonds et diversifié­s.

Ce n’est pas une simple coïncidenc­e que 80 % du financemen­t des PME en Europe soit d’origine bancaire et 20 % en fonds propres, alors que la proportion est inverse aux États-Unis.

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Jonathan Hill, ancien commissair­e européen

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