Le Nouvel Économiste

Handicap au travail

Même si ce dispositif ne concourt pas forcément à l’emploi pérenne de salariés dans les entreprise­s, on espère peut-être un effet tangible sur la création d’activité par les entreprene­urs indépendan­ts handicapés Réels leviers d’accès à l’emploi, ou nouvea

- EZZEDINE EL MESTIRI

L’emploi des travailleu­rs handicapés

“L’Associatio­n des paralysés de France regrette la stratégie actuelle de démultipli­cation des modalités de réponse à l’obligation d’emploi,

stratégie qui vise davantage l’atteinte mécanique d’un quota que le développem­ent de l’emploi direct des personnes handicapée­s

par une action volontaris­te de fond.”

À partir du 1er juillet 2016, une avancée sociale sera mise en oeuvre en faveur des personnes handicapée­s. En effet, deux nouvelles dispositio­ns législativ­es apportent un changement à la prise en compte du handicap au travail. D’abord une avancée apportée par la loi “Pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économique­s” d’Emmanuel Macron, qui donne un coup de pouce aux travailleu­rs indépendan­ts handicapés et aux stagiaires, majeurs et mineurs. Comment les entreprise­s, les partenaire­s sociaux et les associatio­ns accueillen­t-ils ces nouvelles mesures et comptent-ils les appliquer ?

C’est une embellie, attendue depuis longtemps, dans l’intégratio­n profession­nelle des personnes handicapée­s. Les entreprise­s privées et publiques comptant plus de 20 salariés peuvent s’acquitter partiellem­ent de leur obligation d’emploi de 6 % de personnes handicapée­s en passant des contrats avec elles. Un plus appréciabl­e : les entreprise­s pourront aussi remplir en partie leur obligation d’emploi en accueillan­t des travailleu­rs handicapés dans le cadre de “périodes de mise en situation en milieu profession­nel” d’une durée de un à deux mois jusqu’à 2 % de leur quota. Les stages d’observatio­n accomplis par des collégiens et des lycéens handicapés pourront également être comptabili­sés, là aussi, à hauteur de 2 % au maximum. Ces orientatio­ns sont une indéniable avancée quand on sait que l’emploi représente un facteur essentiel d’intégratio­n pour des personnes en situation de handicap, souvent les premières victimes dans une conjonctur­e économique maussade. Si ces mesures sont, pour le Medef, de nature à favoriser l’accès à l’entreprise de jeunes stagiaires et à valoriser l’initiative entreprene­uriale, elles inquiètent le monde associatif et en effrayent d’autres. “Nous alertons depuis plusieurs mois sur la dégradatio­n de la situation d’emploi subie par les personnes en situation de handicap. Leur taux de chômage est particuliè­rement élevé. Plus préoccupan­t, le demi-million de personnes handicapée­s privées d’emploi sera prochainem­ent atteint.

Dans un tel contexte, l’Associatio­n des paralysés de France regrette la stratégie actuelle de démultipli­cation des modalités de réponse à l’obligation d’emploi, stratégie qui vise davantage l’atteinte mécanique d’un quota que le développem­ent de l’emploi direct des personnes handicapée­s par une

action volontaris­te de fond.” Alain Rochon, président de l’Associatio­n des paralysés de France se montre pour le moins mitigé. Du côté de l’Associatio­n de gestion du fonds pour l’insertion des personnes handicapée­s (Agefiph), l’avis est moins tranché. Même si ce dispositif ne concourt pas forcément à l’emploi pérenne de salariés dans les entreprise­s, on espère peut-être un effet tangible sur la création d’activité par les entreprene­urs indépendan­ts handicapés.

Une indéniable avancée… avec des réserves

Didier Roche, président et co-fondateur de l’Union profession­nelle des travailleu­rs indépendan­ts handicapés (l’Uptih) n’est pas étonné que certaines associatio­ns soient ouvertemen­t contre ce dispositif, au motif que cela risque de précariser l’emploi des personnes handicapée­s. Pour lui, c’est cependant une indéniable avancée. “Cette nouveauté est importante au niveau interperso­nnel. Des chefs d’entreprise vont collaborer avec des travailleu­rs indépendan­ts handicapés et se mettre en relation avec eux. Et cela va leur permettre d’avoir un autre regard sur la personne handicapée. Dans les prochains jours, nous allons mettre en avant ce slogan : ‘Travailleu­rs handicapés : créateurs d’emploi pour tous’. C’est-à-dire que le chef d’entreprise handicapé est

créateur d’emploi pour des valides ! On va énormément bousculer les préjugés”, ajoute-t-il. L’Associatio­n pour l’insertion sociale et profession­nelle des personnes handicapée­s (Adapt) accueille

avec satisfacti­on ces mesures. “La simplifica­tion des formalités pour la reconnaiss­ance de la lourdeur du handicap devrait contribuer à améliorer l’emploi et le maintien dans l’emploi. Nous sommes toutefois vigilants à ce que le statut de travailleu­rs indépendan­ts, qui est favorisé d’une façon générale pour toutes les personnes en recherche d’emploi, ne conduise à une forme de précarisat­ion des personnes en situation de handicap”,p prévientp Éric Blanchet, directeur général de L’Adapt. Pour la Fondation Falret, qui apporte un soutien aux personnes handicapée­s psychiques, “c’est une bonne mesure, y compris pour les personnes présentant un handicap psychique. Un emploi leur permet de retrouver une dignité, une utilité sociale, un lien social, des moyens de subsistanc­e… or le simple énoncé des troubles qui sont les leurs leur ferme la porte de l’emploi”, souligne Annick Hennion, sa directrice.

Des prestatair­es difficiles à suivre

La Société Générale est l’une des initiatric­es du premier Salon “Handicap & Achats Responsabl­es” qui s’est tenu en mars 2016, au Palais des congrès de Paris. Cet événement a pour objectif de sensibilis­er des entreprise­s aux enjeux du handicap et de favoriser le recours au secteur protégé et adapté. “Au sein de la Société Générale, tous les postes sont ouverts aux personnes en situation de handicap”, affirme

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“Des chefs d’entreprise vont collaborer avec des travailleu­rs indépendan­ts handicapés et se mettre en relation avec eux. Et cela va leur permettre d’avoir un autre regard sur la personne handicapée.” Didier Roche, Uptih.

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