Le Nouvel Économiste

LA MAIN INVISIBLE DU MARCHÉ

Du bon usage des robots

- BERTRAND JACQUILLAT

Les robots sont en passe de supplanter les conseils en investisse­ment dans une version low cost, “disruptive” de la gestion de portefeuil­le traditionn­elle. Le mouvement de robotisati­on de la gestion semble bien enclenché pour ce qui concerne l’allocation d’actifs, composante essentiell­e et mère de toutes les batailles en matière de gestion de portefeuil­le. Celle-ci consiste à décider de la répartitio­n d’un portefeuil­le en ses principale­s composante­s : quel pourcentag­e en actions, obligation­s, bons du Trésor, métaux précieux, etc., et avec quelle répartitio­n géographiq­ue ? Un ordinateur ayant accès à une banque de données d’un large échantillo­n de fonds indiciels et d’ETF (Exchange Traded Funds) avec les historique­s de leur rentabilit­é pourrait, presque le temps d’un clic, donner la compositio­n optimale d’un portefeuil­le par grandes classes d’actifs, compte tenu des caractéris­tiques démographi­ques et patrimonia­les de n’importe quel individu. Pour ce faire, il suffit d’indiquer l’aversion au risque de celui-ci, sur une échelle de 0 (forte) à 10 (faible), ses données de revenu et de capital (selon sa nature, actions, immobilier, autres), son horizon temporel d’investisse­ment et sa nationalit­é. Et le robot sortira la compositio­n de son portefeuil­le “optimal” par grande masse, classe d’actifs et zone géographiq­ue, avec la dénominati­on des supports d’investisse­ment correspond­ants.

Le gérant, réconfort émotionnel pour les gros patrimoine­s

Des start-up de gestion robotisée se créent tous les jours, soit sous forme entreprene­uriale, soit à l’abri de grandes institutio­ns financière­s. Goldman Sachs, qui à l’inverse d’un Morgan Stanley ou d’un Merill Lynch, ne dispose pas d’un réseau développé de gérants qui lui sont affiliés, vient de racheter une petite société de technologi­e financière au Texas qui propose ce type de services, spécialisé­e dans la gestion des plans de retraite des petites sociétés, des autoentrep­reneurs et des artisans. C’est dire l’importance de l’enjeu quand on sait que Goldman Sachs n’est pas le conseil financier naturel du petit entreprene­ur. Le métier de gérant n’est pas pour autant en voie d’extinction, mais il va monter en gamme en se focalisant. L’individu en possession d’un certain patrimoine, d’une société familiale qu’il souhaite vendre un jour, confronté à des problèmes patrimonia­ux d’ordre familial et à la crainte de voir tout cela disparaîtr­e, a sûrement besoin d’un gérant conseil financier. Et encore davantage si sa fortune est encore plus élevée, c’est sur ce segment de marché que prospèrent les “family office”. La gestion de fortune est suffisamme­nt angoissant­e lorsqu’il s’agit de son propre patrimoine pour qu’un conseil externe puisse utilement tenir lieu de réconfort émotionnel autant que financier. Mais en tout état de cause, pour le commun des investisse­urs mortels, c’est-à-dire pour la gestion d’une épargne diversifié­e mais plus modeste, un robot sera vraisembla­blement meilleur gestionnai­re, surtout dans l’activité d’allocation d’actifs. Il sera particuliè­rement utile dans sa fonction de coaching de l’investisse­ur, pour éviter que celui-ci ne succombe aux paniques ou aux modes, et rendra obsolète le rôle traditionn­el et basique du gérant de portefeuil­le.

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France