Le Nouvel Économiste

Ressources humaines

Pour les entreprise­s en quête de d’expertise et de liberté, et les seniors d’indépendan­ce et de sérénité : le portage salarial

- CHARLOTTE DE SAINTIGNON

Les seniors et le portage salarial

L’avancée en âge constitue un sérieux facteur d’exclusion et de discrimina­tion à l’emploi. “Plus on se rapproche de la date de la retraite, plus il est difficile de se réinsérer dans une entreprise” Le porté peut cumuler l’intégralit­é de ses revenus inhérents à ses activités avec sa pension retraite dès 55 ans

Le portage salarial permet aux entreprise­s de trouver des consultant­s pour traiter des problémati­ques stratégiqu­es ou bénéficier d’expertises précises. Il apparaît alors comme une solution flexible pour les structures qui sont réticentes à embaucher des seniors expériment­és, mais onéreux. Quant à ces derniers, ce moyen souple complète leur retraite ou leur activité principale, ou bien ouvre une voie en tant qu’indépendan­t, tout en offrant le confort d’un salarié. Revue de détail des bénéfices partagés.

“Les seniors correspond­ent à la genèse du portage salarial. Historique­ment, celui-ci s’est créé avec cette population”, rappelle Radhia Amirat, directrice générale adjointe d’ITG, société de portage salarial. Ainsi, 53 % des consultant­s portés ont plus de 45 ans. Le dispositif s’applique particuliè­rement à eux puisque “les prérequis sont l’autonomie et l’expérience. Or, il y a toujours du travail ppour qqui est compétent”p pointep Éric Atlani, président fondateur de Concretio. “La nouvelle génération de seniors s’autonomise et ne cherche plus à rentrer dans une entreprise par le biais d’un contrat de travail classique, d’autant que le contrat à durée indétermin­ée (CDI) n’apporte plus la sécurité que l’on prétend, développe Lydie Roussel, présidente de Portage & Vous. Ils sont de plus en plus nombreux à rechercher l’indépendan­ce, donnant naissance à de nouvelles formes d’employabil­ité. Autre phénomène concomitan­t, ils ne se voient plus proposer de CDI. Ils se font ainsi porter par des sociétés amies.” “En général, ils arrivent au portage salarial avec leur pprécédent employeur”,py indiqueq pour sa part Éric Atlani. C’est le cas de Gérard, retraité de 66 ans qui a fait presque toute sa carrière chez Airbus, et vient de rempiler pour une mission de quelques jours dans son ancienne entreprise pour expertiser un équipement développé par une société étrangère.

Génération papy-boom au chômage

L’avancée en âge constitue un sérieux facteur d’exclusion et de discrimina­tion à l’emploi. “Beaucoup arrivent en bout de course de leur recherche d’emploi”, soutient Radhia Amirat. “Plus on se rapproche de la date de la retraite, plus il est difficile de se réinsérer dans une entreprise”, regrette Jérôme Tartaing, président fondateur de Webportage. Dans un contexte où le marché du travail reste difficile, ils constituen­t les premières victimes des restructur­ations et politiques de recrutemen­t. “Les entreprise­s réfléchiss­ent à deux fois avant d’embaucher un senior”, poursuit Lydie Roussel. “Les freins sont énormes, comme le coût financier et le manque de visibilité”, plaide Radhia Amirat. Passé 50 ans, ils deviennent vulnérable­s et n’ont pas toujours la force et la motivation pour se lancer dans des démarches fastidieus­es de recherche d’emploi. Trouver un client reste plus aisé qu’obtenir un poste ou entreprend­re. Les chiffres de l’indice entreprene­urial français le prouvent : les seniors s’inscrivent moins dans une dynamique entreprene­uriale que les génération­s antérieure­s (44 % des 30 à 49 ans contre 25 % des 50 à 64 ans). “Proposer des missions plutôt qu’un CDI facilite la vie de l’entreprise et lui donne une certaine flexibilit­é, ajoute Radhia Amirat. La demande pour des missions ponctuelle­s est réelle. Après les crises de 2001 et 2008 et les vagues de licencieme­nts, les entreprise­s ont beaucoup perdu de savoir-faire, les seniors n’étant pas toujours remplacés à même niveau d’expérience. Beaucoup de tâches sont réalisées par des publics plus jeunes alors que certains dossiers spécifique­s ou sujets pointus nécessiten­t des personnes plus compétente­s, avec davantage d’expérience.” Les missions peuvent s’étaler de quelques jours, dans le cadre d’une réponse à un appel d’offres, jusqu’à deux ou trois ans pour des projets stratégiqu­es. En sus, le portage salarial constitue pour certains l’assurance de retrouver un emploi. “La prise de risque paie. Changer de statut ne doit pas effrayer, c’est un vrai tremplin qui maximise les possibilit­és de retour à l’emploi ou la création d’une activité rentable”, poursuit la directrice générale adjointe d’ITG. Le “papyboom”, devenu réalité, génère une population de seniors aspirant à rester actifs malgré leur passage à la retraite pour continuer à jouer un rôle social, se sentir utiles, reconnus tout en prolongean­t leur vie active. “Cela leur permet de se maintenir en fforme !” assure Jérôme Tartaing.g Être en activité les dynamise en revalorisa­nt leur expérience et savoir-faire. Ils peuvent alors passer tranquille­ment à l’étape retraite sans rupture brutale avec leur vie profession­nelle antérieure, les missions constituen­t presque une thérapie. “Le choc personnel du passage brutal d’une vie active à plus rien s’atténue. Le portage permet une transition en douceur entre l’emploi, la retraite ou le chômage. Ne plus subir rend maître de sa carrière”, reconnaît Mélanie Lecoeur, directrice d’Advizium.

Formule zen

Si les seniors peuvent avoir une certaine appréhensi­on par rapport au statut, Radhia Amirat les rassure : “le portage représente la sécurité dans le sens où il constitue du salariat”. Les portés bénéficien­t des mêmes protection­s et avantages, “à la différence des micro-entreprene­urs ou des entreprene­urs individuel­s, ajoute Lydie Roussel. Ce système ne provoque pas de rupture dans leur couverture sociale ou dans l’acquisitio­n de leurs droits à la retraite”, pas plus que de limitation­s en termes de chiffre d’affaires. Le porté peut cumuler l’intégralit­é de ses revenus inhérents à ses activités avec sa pension retraite dès 55 ans. Cette solution s’avère “la meilleure pour augmenter les coûts de prestation et cadrer avec les prétention­s salariales des seniors”, reconnaît Gérard, porté salarial pour Airbus. Concrèteme­nt, il bénéficie des mêmes prérogativ­es

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 ??  ?? “Changer de statut ne doit pas effrayer, c’est un vrai tremplin qui maximise les possibilit­és de retour à l’emploi ou la création d’une activité rentable.” Radhia Amirat, d’ITG.
“Changer de statut ne doit pas effrayer, c’est un vrai tremplin qui maximise les possibilit­és de retour à l’emploi ou la création d’une activité rentable.” Radhia Amirat, d’ITG.

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