Le Nouvel Économiste

Notre amie la finance

L’installati­on d’une nouvelle banque chinoise en France signe l’intérêt des Chinois pour les entreprise­s françaises, et réciproque­ment

- PAR JACQUES SECONDI

Paris déroule à nouveau le tapis rouge à un géant bancaire chinois. Bank of Communicat­ions, une banque historique de Shanghai fondée en 1908, vient de fêter en grande pompe l’ouverture de sa succursale parisienne. Après Bank of China, China Constructi­on Bank, ICBC et China ExIm Bank, c’est au tour de la cinquième banque commercial­e du pays par la taille de ses actifs de s’installer en France. Son bilan supérieur à 1 000 milliards de dollars en fait le 22e établissem­ent mondial. L’initiative s’inscrit dans le mouvement d’internatio­nalisation en cours de l’industrie financière chinoise. L’objectif des géants chinois de la finance et des marchés est de sortir de leurs bases, devenues trop étroites, pour compenser le rétrécisse­ment continu des marges sur le marché intérieur soumis à une intense concurrenc­e. Le premier marché convoité hors des frontières nationales est celui des fusions-acquisitio­ns conduites par des entreprise­s chinoises. L’activité de Bank of communicat­ions consistera à accompagne­r ses grands clients en phase d’internatio­nalisation, mais aussi à conseiller les entreprise­s françaises souhaitant accéder au marché chinois. Le tout est une aubaine pour la place de Paris. Certes, il ne faut pas voir dans le choix de la région parisienne et le calendrier retenu, l’aboutissem­ent d’une stratégie post- Brexit. Les premières négociatio­ns ont commencé il y a six ans. Et l’installati­on à Paris suit de quelques jours l’inaugurati­on de la filiale de Londres. Bank of Communicat­ions possède également des représenta­tions à Francfort et Luxembourg, et vient de prendre une participat­ion majoritair­e dans la banque BBM au Brésil.

Paris, pôle global, à défaut de place financière

Mais l’agence parisienne installée bien en évidence sur la vitrine internatio­nale que représente­nt les Champs-Élysées prend subitement une autre dimension après le référendum britanniqu­e. Si le Brexit aboutit bien à deux développem­ents séparés, la City d’un côté, le continent de l’autre, alors Paris est bien placé comme seul véritable équivalent de Londres sur le continent en tant qu’entité économique complète, en relation avec d’autres entités similaires autour de la planète, et de taille comparable. Ce statut de deuxième pôle “global” aux côtés de Londres est censé compenser la pâleur persistant­e de Paris en tant que place financière. Valérie Pécresse, présidente de la région Ile-de-France, met en avant les 13 milliards de yuans levés sur Euronext depuis 2012, qui annoncent la possibilit­é pour la région d’accompagne­r l’internatio­nalisation de la monnaie chinoise. Bank of Communicat­ions aurait aussi vocation à devenir le leader chinois de la gestion de capitaux, et dans ce domaine, la France est potentiell­ement la première place en Europe continenta­le avec 3 600 milliards d’euros d’actifs sous gestion. Reste que dans le classement du GFCI (Global financial Sector Index), appuyé sur des critères qui vont de l’environnem­ent des affaires à la fiscalité en passant par la qualificat­ion des profession­nels, Paris n’est plus qu’au 29e rang des places financière­s mondiales, après avoir été 11e en 2007. Pour l’heure, la tête de pont en Europe continenta­le reste la filiale luxembourg­eoise, dont dépend la succursale parisienne. À très court terme, l’enjeu pour Paris est d’abord d’arrêter l’hémorragie des dernières années, ce que va peut-être favoriser le Brexit. En attendant, Londres, talonnée par Francfort, demeure – et pour longtemps – le centre financier le plus puissant d’Europe, parce que tous les marchés de capitaux y sont représenté­s et que l’on peut y rencontrer les plus grands investisse­urs de la planète en une demi-journée.

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