MÉCOMPTES PUBLICS
Incompatibilité fiscale
Plusieurs candidats à l’élection présidentielle proposent de rendre la CSG progressive, éventuellement de la fusionner avec l’impôt sur le revenu (IR), tout en approuvant la “retenue à la source” de l’impôt sur le revenu à partir de 2018. Or la progressivité d’un impôt sur le revenu est incompatible avec son prélèvement à la source. En effet, un organisme (entreprise, caisse de retraite…) qui verse un revenu à quelqu’un doit connaître le taux moyen d’imposition de cette personne pour retenir à la source l’impôt qu’elle doit payer. Or, par définition de la progressivité, un impôt sur le revenu est progressif si le taux moyen d’imposition, le rapport entre le montant de l’impôt et le revenu, augmente avec le revenu global annuel des contribuables. À chaque contribuablecorg respond un revenu global annuel différent et un taux moyen d’imposition différent. Pour connaître le taux moyen d’imposition d’un contribuable à un impôt progressif, il faut donc d’abord déterminer son revenu global annuel, ce qui est possible seulement à la fin de l’année, une fois tous ses revenus encaissés, voire plusieurs semaines après la fin de l’année si les revenus à prendre en compte résultent de traitements comptables (bénéfices industriels et commerciaux, etc.).
Proportionnalité ou progressivité ?
Si l’impôt porte sur les revenus du couple ou de la famille comme l’IR en France, il faut en plus connaître les revenus du conjoint, ou des autres membres de la famille. Il est donc impossible de prélever à la source pendant une année N un impôt progressif sur les revenus de l’année N, et la loi de finances pour 2017 n’instaure en aucune façon un prélèvement à la source de l’IR. Elle modifie seulement, en les complexifiant beaucoup, les modalités de calcul et de prélèvement des acomptes mensuels dus au cours de l’année N par les contribuables au titre de l’impôt sur les revenus de N. Celui-ci donnera toujours lieu à déclaration, calcul et paiement du solde en N+1. Seuls des acomptes seront prélevés à la source, qui seront souvent trop élevés et devront alors être remboursés en N+1. La CSG est un impôt sur le revenu prélevé à la source, même pas d’ailleurs sur tous les revenus, parce que c’est un impôt proportionnel et non progressif : son taux ne varie pas avec le revenu global annuel des contribuables. Ceux qui veulent la rendre progressive tout en continuant à la prélever à la source ne semblent pas avoir compris ce que signifient les termes “progressivité” et “prélèvement à la source”. La France s’est dotée d’un impôt sur le revenu progressif et non retenu à la source, et d’une CSG proportionnelle et prélevée à la source, ce qui est cohérent. Il ne faut pas transformer ces impôts en deux chimères qu’il ne restera plus qu’à fusionner.