Le Nouvel Économiste

Entreprene­uriat

Le vrai coût du portage salarial

- LORÈNE RIMONDI

Si les modalités de calcul de cette rémunérati­on doivent désormais obligatoir­ement figurer dans le contrat de travail, un manque de transparen­ce persiste néanmoins sur les montants prélevés par la société, qui ne sont toujours pas encadrés Les frais de gestion ne doivent pas être envisagés uniquement sous l’angle économique. L’accompagne­ment offert par la société peut faire la différence dans le développem­ent d’une clientèle et d’un chiffre d’affaires

Avec une croissance régulière, le portage salarial est un mode d’emploi qui explose. En proposant à des experts de bénéficier du salariat, cette activité, à cheval entre deux statuts, a mis du temps à se structurer. Résultat, les politiques commercial­es des sociétés de portage divergent encore fortement. D’autant que derrière des offres commercial­es parfois agressives, les fiches de paie peuvent réserver des surprises avec la ponction de charges supplément­aires. In fine, c’est la rémunérati­on de l’expert et le coût pour le client qui sont impactés. Une comparaiso­n de la rémunérati­on nette ainsi que de la solidité financière des sociétés apparaît finalement comme le meilleur moyen de se prémunir de pratiques douteuses.

Longtemps attendue, l’ordonnance du 2 avril 2015 a permis d’organiser le cadre juridique du portage salarial, qui demeurait encore flou. Une relation tripartite entre le porté, la société de portage et l’entreprise cliente, dans laquelle l’expert, considéré comme autonome – c’est le point clé – démarche lui-même ses clients et fixe les conditions d’exécution de sa prestation. Le salarié porté bénéficie également d’une rémunérati­on minimale selon les accords de branche. Si les modalités de calcul de cette rémunérati­on doivent désormais obligatoir­ement figurer dans le contrat de travail, un manque de transparen­ce persiste néanmoins sur les montants prélevés par la société, qui ne sont toujours pas encadrés. D’autant qu’aux frais de gestion affichés peuvent s’ajouter d’autres charges dans le bulletin de paie. Des frais cachés, difficiles à détecter, qui complexifi­ent la comparaiso­n en amont. Au final, c’est la rémunérati­on nette pour le porté qui diminue, et le coût pour l’entreprise cliente qui augmente. Alors que le portage est en passe de devenir une véritable une branche profession­nelle (voir encadré), de grandes différence­s tarifaires

persistent et ne font toujours pas

partie des discussion­s. “La politique commercial­e des sociétés de portage reste librement fixée par chacune d’entre elles. La question de la transparen­ce et de la lisibilité est pourtant bien au coeur des enjeux du portage”, reconnaît Patrick Levy-Waitz, président d’ITG et vice-président du Peps (Profession­nels de l’emploi en portage salarial), principal syndicat des entreprise­s de portage salarial, qui a émis une série de recommanda­tions de bonnes pratiques.

Frais de gestion, la difficile alchimie entre prix et services

L’entreprise de portage se rémunère par le biais de commission­s prélevées sur les honoraires versés par le client, généraleme­nt comprises entre 6 et 12 %. Ces frais de gestion comprennen­t différents services qui varient d’une société à l’autre et en fonction de la propositio­n commercial­e. A minima, ils incluent le calcul du salaire, l’édition du bulletin, la facturatio­n au client, la déclaratio­n auprès des organismes sociaux ainsi que l’inscriptio­n à une mutuelle et la formation profession­nelle. Des services complément­aires peuvent être ajoutés en fonction des besoins identifiés, comme la gestion du statut de détachemen­t à l’étranger, le plan d’épargne, la mise à dispositio­n de bureaux ou d’espaces de co-working et de matériel informatiq­ue, le référencem­ent et la communicat­ion sous la marque de la société de portage. Certaines sociétés proposent aussi une avance de trésorerie pour pallier les retards de paiement, un service refacturé 1 % par tranche de 30 jours. Le système de subrogatio­n permet aussi au porté de cumuler le maintien du salaire lors d’un arrêt maladie. “Dans la négociatio­n de l’offre commercial­e, le principal point d’achoppemen­t peut se situer sur les réserves prélevées en cas de rupture convention­nelle. En accord avec le salarié, ces indemnités sont calculées en fonction de la date de départ avec une provision sur salaire d’environ 20 % tous

les mois”, selon Julie Thollon, expert-comptable. Si des commission­s fantaisist­es qui atteindrai­ent 15, voire 20 %, doivent d’emblée être éliminées, les frais de gestion ne doivent cependant pas être envisagés uniquement sous l’angle économique. L’accompagne­ment offert par la société peut faire la différence dans le développem­ent d’une clientèle et d’un chiffre d’affaires. “Ne sélectionn­er que les entreprise­s qui proposent le taux le plus bas peut être contre-productif, car les frais de gestion comprennen­t des services qui permettent de

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 ??  ?? “La politique commercial­e des sociétés de portage reste librement fixée par chacune d’entre elles. La question de la transparen­ce et de la lisibilité est pourtant bien au coeur des enjeux du portage.” Patrick Levy-Waitz, ITG et Peps.
“La politique commercial­e des sociétés de portage reste librement fixée par chacune d’entre elles. La question de la transparen­ce et de la lisibilité est pourtant bien au coeur des enjeux du portage.” Patrick Levy-Waitz, ITG et Peps.

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