Le Nouvel Économiste

L’Amérique d’abord de Donald Trump

Washington n’interviend­ra plus dans les affaires du monde que là où ses intérêts seront menacés, et uniquement selon son calendrier

- PASCAL LOROT

À peine installé à la Maison-Blanche, Donald Trump s’est mis à signer des décrets à tour de bras. Ceux qui envisageai­ent un décalage entre le discours du candidat et les décisions que le nouveau président serait amené à mettre en oeuvre vont en être pour leur frais. Pour la première fois depuis longtemps en Amérique – mais cela pourrait tout aussi bien s’appliquer à notre vie politique française –, engagement­s de campagne et décisions une fois arrivé au pouvoir risquent bien de devoir coïncider. Avec en arrière fond une priorité : l’Amérique d’abord. Donald Trump considère que l’immigratio­n clandestin­e est un fléau, qu’elle doit être combattue : il confirme sa décision d’ériger un mur avec le Mexique. L’ire de son homologue mexicain et l’annulation de la visite que ce dernier devait faire prochainem­ent à Washington n’entameront vraisembla­blement pas sa déterminat­ion. Donald Trump avait indiqué qu’il ferait tout pour restreindr­e l’accès au territoire américain de citoyensy étrangersg musulmans : il interdit l’entrée aux États-Unis des ressortiss­ants de 7 pays musulmans où prévaut guerre civile ou enracineme­nt islamiste. D’aucuns diront que le nouveau président devait donner des gages à son électorat et que ces premières décisions étaient les plus faciles à prendre. Rien n’est moins sûr.

Dans le “foutoir complet”

Il n’y a rien de messianiqu­e chez Donald Trump. Imposer la démocratie à la planète tout entière n’est pas un objectif, comme cela a pu l’être pour plusieurs de ses prédécesse­urs. Le bien du monde ne l’intéresse pas, seul celui des États-Unis compte. Dans le champ internatio­nal, deux préoccupat­ions prévalent. La ppremière est de réduire en cendres l’État islamique qui est perçu par Donald Trump comme une plaie aussi grave que le fut l’Allemagne nazie en son temps. Quitte à composer avec Moscou et, en échange de son soutien sur le terrain, revenir sur les sanctions, entériner le retour de fait de la Crimée dans le giron de la Russie, voire renoncer à arrimer l’indocile Ukraine au bloc occidental. La seconde est la protection des intérêts économique­s américains. Celle-ci passe par un retour à des pratiques plus maîtrisabl­es, davantage d’accords bilatéraux où l’Amérique pense être en mesure d’imposer plus facilement ses vues, plutôt que de se fondre dans de vastes accords continenta­ux, voire interconti­nentaux, où la voix de Washington est moins forte et où ses intérêts se diluent dans un maelström difficilem­ent contrôlabl­e où chacun doit essayer de ne pas trop y perdre. Là, l’adversaire clairement identifié est la Chine, que Trump n’a pas hésité pas à tester sur la question de Taïwan. Les cris d’orfraie de ceux qui s’inquiètent d’une possible guerre commercial­e le laissent indifféren­t. Il est certain de sa capacité à faire plier la Chine sur la question des barrières tarifaires et non tarifaires et notamment la valeur du yuan et, au-delà, de la supériorit­é finale de l’Amérique sur l’empire du Milieu. Tout ceci ne signifie pas que l’Amérique n’interviend­ra plus dans les affaires du monde, dans ce qu’il qualifie de “foutoir complet”. Mais elle le fera selon son calendrier, là où elle considère ses intérêts menacés, et non pas en considérat­ion de préoccupat­ions d’alliés qui risquent de n’en avoir plus que le nom.

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