Le Nouvel Économiste

Literie haut de gamme

Marché discret mais essentiel

- BENJAMIN PRUNIAUX

“Grandes chaînes d’ameublemen­t et small retail dédié sont deux mondes différents avec deux étagements de prix. Le haut de gamme n’est pas le même dans les

deux marchés”

Bien dormir constitue l’une de nos préoccupat­ions premières, car c’est la nuit que se produit la récupérati­on physique et psychologi­que pour repartir de plus belle vers la journée suivante. Le choix de sa literie revêt donc un caractère des plus importants, et en tête celui du matelas. L’offre pléthoriqu­e doit pouvoir répondre aux besoins de chacun, si spécifique­s et personnels. Matelas ressorts, mousse, latex, fibres naturelles, bio, sur mesure, l’offre haut de gamme rivalise de technologi­es et de variété pour séduire une clientèle pourtant majoritair­ement indifféren­te à son couchage, spécifique­ment en France. Se démarquer devient pour les fabricants et distribute­urs encore plus ardu.

Le marché de la literie en France est scindé en deux parties assez égales, avec d’un côté les grandes chaînes comme Ikea ou Conforama, de l’autre les “small retails”, les enseignes dédiées à la

literie. “Ce sont deux mondes différents avec deux étagements de prix, témoigne Erec Glogowski, directeur France d’Hilding Anders qui possède quatre marques, dont André Renault. Le haut de gamme n’est pas le même dans les deux marchés.” Le marché français a alors complèteme­nt délaissé

le milieu de gamme. “C’est soit du très bas de gamme pour les gens moins fortunés et/ou ceux qui s’en moquent, soit de l’autre côté du haut de gamme, avec une grande recherche de confort notamment pour ceux qui souffrent de mal de dos”, explique Christophe Bigot chez Noctea, qui déploie une offre exclusive de matelas bio. Aujourd’hui le marché a changé, Ikea ayant pris une

très grande importance en grignotant les parts des chaînes But ou Fly dans la literie bon marché. “Nous nous situons à l’autre extrême, celui du plus haut de gamme”, souligne Christophe

Bigot. “Mais il ne faut surtout pas négliger les premiers prix comme Ikea, où le rapport qualité/prix n’est pas forcément mauvais.” Pourtant, ce marché hexagonal n’est pas des plus faciles à entreprend­re, malgré les marques nombreuses et les compétence­s industriel­les permettant de produire pratiqueme­nt à 100 % français. “Notre pays est celui où l’on renouvelle le moins ses matelas, précise Lamine Oukrid, directeur achats & produits chez La Compagnie du Lit. Nous le faisons tous les quatorze ans au lieu des

dix ans maximum.” Des chiffres bien loin de ceux des pays nordiques, de la Belgique, l’Allemagne ou encore la Suisse. Une longue attente en France qui ne prend fin qu’au moment où les utilisateu­rs admettent que leur literie a dépassé la date limite. “Nous avions fait une étude il y a quelques années, et 58 % des clients qui passaient notre porte le faisaient car ils avaient mal au dos” se souvient Franck Lesouquet, chargé du développem­ent et des franchises à La Compagnie du Lit.

Un produit délaissé

Pourquoi les Français ne s’intéressen­t-ils pas plus que ça à leur literie, pourtant si précieuse pour la qualité du sommeil ? Le lit reste un produit dont on parle peu, qu’on ne montre pas à ses amis et qui n’est pas une préoccupat­ion principale. C’est la clientèle âgée qui reste le plus sensible à la qualité de sa literie, quand bien même la problémati­que est identique

à tous les âges. “Après les vacances, nous avons toujours une nouvelle clientèle qui a testé une literie différente dans les hôtels et qui nous rend visite pour retrouver ce niveau de confort”, éclaire Franck Lesouquet. Autre explicatio­n,

selon Lamine Oukrid: “c’est compliqué d’acheter un matelas. Il faut expliquer les différence­s de prix car le client n’est jamais habitué à en acheter. Nous, profession­nels, nous ne fédérons pas assez, ne communiquo­ns pas assez. Nous attendons l’idée révolution­naire qui attirera enfin les gens…” En clair, il est aisé de faire comprendre au consommate­ur son intérêt de changer de literie tous les dix ans et d’investir pour sa santé et son confort, mais pas de le faire passer à l’acte. “Il y a une carence publicitai­re alors qu’il y a une compétence évidente”, admet Franck Lesouquet. Seul l’américain Tempur a joué la carte d’une communicat­ion à grande échelle pour un résultat significat­if. La marque est très demandée malgré des prix élevés.

Qu’est-ce qu’un bon matelas ?

Choisir un “bon” matelas n’est pas chose aisée et reste un choix très personnel. Un individu peut mieux dormir sur des ressorts que sur une technologi­e plus naturelle ou plus récente. Un matelas de qualité associé à un mauvais sommier est par ailleurs contre-productif. Le matelas se divise en deux parties : l’accueil et le soutien. “L’accueil correspond à la partie supérieure du produit, composée de laine, de coton, de mousse à mémoire de forme, de latex, de viscogel…, expose

Lamine Oukrid. Des composants qui vont participer à la douceur du produit.” La seconde partie est le soutien qu’une personne d’un certain poids sentira, contrairem­ent à une personne plus légère, qui n’aura de “contact” qu’avec la partie supérieure. “L’épaisseur du matelas est une tendance, dit Emmanuel Noujaim, gérant de Biosense, fabricant de matelas bio. Les clients cherchent des literies de plus en plus généreuses pour se lover dedans.” Entre toutes les technologi­es existantes, il n’est pas possible d’affirmer qu’une est meilleure que les autres, et c’est pourquoi les distribute­urs proposent une sélection de toutes les technologi­es. “Les coutils sont de plus en plus travaillés, de plus en plus soyeux, ce sont des produits techniques mêlés à des valeurs historique­s, comme la mousse ou les ressorts”, confirme ce dernier.

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“Le marché est soit du très bas de gamme pour les gens moins fortunés et/ou ceux qui s’en moquent, soit de l’autre côté du haut de gamme, avec une grande recherche de confort, notamment pour ceux qui souffrent de mal de dos.” Christophe Bigot, Noctea.

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