Le Nouvel Économiste

Les algorithme­s collaborat­ifs promettent d’être ‘the next big thing’

- RICHARD WATERS, FT

L’an dernier, lors de la conférence British Machine Vision, un professeur de l’université du Kentucky et deux doctorants ont présenté leurs travaux : ils semblaient promis à une respectabl­e obscurité universita­ire. Et pourtant, un an plus tard, leur algorithme, qui estime où devrait se trouver la ligne d’horizon dans une photograph­ie, attire des clients très improbable­s. Il est utilisé par des services de Défense de différents gouverneme­nts pour estimer la localisati­on d’une personne prise en photo, ainsi que par des prestatair­es de retouche photo pour le grand public, pour corriger les imperfecti­ons des clichés. Et pour chaque série de 10 000 utilisatio­ns automatisé­es de leur algorithme par des applicatio­ns, nos chercheurs empochent environ huit dollars. Cet exemple est tiré d’un portail d’applicatio­ns de ‘machine learning’ (ou apprentiss­age automatiqu­e) Algorithmi­a. Il s’inscrit dans le rush vers les algorithme­s collaborat­ifs. Le monde de la tech promet une révolution du ‘machine learning’, où les logiciels deviendron­t tous plus intelligen­ts. Les pièces du puzzle commencent à se mettre en place pour que cela puisse devenir réalité. Ce mois-ci, Google a fait encore mieux. Il a racheté Kaggle, une société qui dit avoir le plus vaste réseau en ligne de spécialist­es indépendan­ts des données, avec plus de 500 000 membres inscrits sur son site. Sur Kaggle, ils sont en compétitio­n pour remporter les prix accordés à ceux qui trouvent les meilleures solutions pour résoudre les défis que leur présentent des groupes industriel­s comme General Electric. Par leurs prouesses technologi­ques, ils améliorent leur réputation auprès de leurs pairs et amassent des références pour décrocher un poste. D’autres sont allés plus loin pour exploiter ces talents des algorithme­s dispersés géographiq­uement. Une flopée de start-up, qui portent des noms tels que Quantopian, Numerai ou Quantiacs, ont émergé pour appliquer la même approche au trading algorithmi­que. D’après eux, la prochaine stratégie miracle pour “battre le marché” pourrait éclore n’importe où, et pas seulement sous serre, dans l’écosystème des sociétés actuelles d’analyses quantitati­ves, surnommées les “quants”. Pour les entreprise­s impliquées, être chasseur de ces têtes particuliè­res ne se réduit pas à forer un gisement de mathématiq­ues avancées. Algorithmi­a, société basée à Seattle, veut devenir davantage qu’une place de marché virtuelle. Elle propose aussi des algorithme­s qu’elle se procure auprès des chercheurs pour les vendre en tant que services, afin que d’autres développeu­rs puissent les utiliser. Elle met au point par ailleurs un genre de “dépôt” interne pour les entreprise­s, pour que celles-ci utilisent mieux les outils qu’elles développen­t elles-mêmes. Comme Diego Oppenheime­r, CEO de Algorithmi­a, l’explique :

“Les applicatio­ns sont en train de changer : elles ont toutes besoin de traiter de grosses quantités de données”. La vague d’intérêt pour le “big data”, qui a commencé au début de cette décennie, a poussé de nombreuses organisati­ons à se doter de l’infrastruc­ture tech nécessaire pour capter de vastes quantités d’informatio­ns. Aujourd’hui, une nouvelle couche s’y ajoute, pour transforme­r ces données en apprentiss­ages qui rendent les applicatio­ns plus intelligen­tes. Elle représente une infrastruc­ture technologi­que émergente, qui fait de l’intelligen­ce artificiel­le non seulement une nouvelle applicatio­n, mais aussi une nouvelle approche du digital. Pour Google, l’achat de la société Kaggle illustre une stratégie à long terme : devenir une plateforme pour les développeu­rs d’applicatio­ns intelligen­tes. Selon l’un dirigeant de Kaggle, le but est “d’exposer” les nombreux utilisateu­rs du réseau Kaggle aux “puissants services et infrastruc­tures d’apprentiss­age automatiqu­e” de Google. Si ces utilisateu­rs adoptent les outils de Google, le groupe pourrait se placer aux avant-postes quand l’intelligen­ce artificiel­le jouera un rôle plus important. Cela ressemble à une stratégie copiée directemen­t dans le manuel de Microsoft. La conception d’outils pour les développeu­rs de logiciels était à la base de l’emprise de Microsoft sur l’ère informatiq­ue client/serveur qui a précédé celle du cloud. Google, de son côté, est historique­ment orienté vers l’interne et met sa puissance technologi­que au service de l’améliorati­on de ses propres services. Mais un équilibrag­e délicat va être nécessaire. Pour garder son réseau, Kaggle a promis de rester une “plateforme de données ouvertes”. Ses membres seront aussi autorisés à utiliser une vaste gamme d’outils d’apprentiss­age automatiqu­e, assure la société, qu’ils soient ou non financés par Google. Obnubilé par la course à la voiture autonome et autres plans sur la comète, Google a presque failli rater ce qui pourrait être le plus juteux des futurs marchés, l’informatiq­ue dans le cloud. Il tente de corriger le tir depuis l’an dernier, et son orientatio­n vers le ‘machine learning’ dans le cloud promet d’être son meilleur espoir pour rattraper les leaders du marché, Amazon et Microsoft. L’infrastruc­ture nécessaire à un usage élargi du ‘machine learning’ est toujours un chantier en cours. Mais les grandes lignes de la prochaine guerre entre titans de la tech commencent à se révéler.

Le monde de la tech promet une révolution du ‘machine learning’, ou apprentiss­age automatiqu­e. Les logiciels deviendron­t tous plus intelligen­ts. Les pièces du puzzle commencent à se mettre en place pour que cela puisse

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