Literie haut de gamme
Un rêve tricolore
Véritable gage de qualité exceptionnelle, la literie haut de gamme et made in France séduit à la fois grâce à des matériaux nobles et un savoir-faire
manuel unique
Le marché souffre toutefois d’une grande segmentation et d’un flou autour des prix, ce qui peut créer la confusion auprès des
consommateurs
Dans un marché très segmenté qui continue néanmoins de croître, la literie française de qualité a le vent en poupe. Des matières premières de qualité, une fabrication locale, un savoirfaire authentique : le matelas français séduit bon nombre de Français. Aux acteurs historiques dont la réputation n’est plus à faire s’ajoutent de nouveaux acteurs qui proposent un concept original à un prix plus doux. En quête de bien-être général, les Français désireux de mieux dormir se tournent alors de plus en plus vers des lits made in France.
Après les voitures françaises, les cosmétiques ou encore les produits du terroir bien de chez nous, il est un autre secteur de l’industrie hexagonale qui a le vent en poupe : la literie. D’un côté, il s’agit d’un marché au savoir-faire ancien : “c’est l’une des rares industries à ne pas avoir été délocalisée au cours des trente dernières années. Il existe encore un grand nombre d’acteurs qui possèdent des usines en France et un certain nombre de techniques sont spécifiques à certaines marques”, explique Gérard Delautre, président de l’Association pour la promotion de la literie (APL). Signe qu’il se porte bien : le marché croît d’année en année. En 2016, selon les chiffres dévoilés en février 2017 par l’Institut de prospective et d’études de l’ameublement (Ipea), la literie a enregistré un chiffre d’affaires s’élevant à 1,31 milliard d’euros, en hausse de 5,5 % par rapport à 2015. Soit la plus grande progression de l’ensemble du marché de l’ameublement. Peu visible, c’est pourtant une industrie essentielle qui touche tous les publics.
Mais c’est aussi un marché très segmenté, avec un grand nombre d’intervenants et encore plus de références différentes, ce qui peut créer une confusion auprès
des consommateurs. “Par rapport à nos voisins européens, le marché français de la literie est essentiellement de moyenne gamme. Toutefois, la segmentation n’est pas très claire : il y a un problème au niveau des prix car tout le monde ne parle pas de la même chose. La norme reste le lit double classique de 140 x 190 centimètres et peu communiquent sur le format 160 x 200 centimètres qui est en grosse progression depuis trois ans”, explique le spécialiste. Même son de cloche chez Le Matelas Français et son co-fondateur Damien Saillard : “on a tendance à parler technologie et à faire n’importe quoi avec les prix. C’est une vraie problématique qui sème le trouble. Actuellement, le ventre mou du matelas, c’est le moyen de gamme. C’est un segment extrêmement secoué par des politiques commerciales agressives”, résume
l’entrepreneur.
Matières premières naturelles
Dans ce contexte, la literie haut de gamme tire son épingle du jeu. Véritable gage de qualité exceptionnelle, elle séduit à la fois grâce à des matériaux nobles et un savoir-faire manuel unique. Basé en Ile-de-France et forte de 150 ans d’expérience, Le Lit National séduit toujours clients fortunés… mais aussi politiques et même le président de la République,q ppuisqueq la maison compte l’Élysée parmi sesprestip gieux clients. La promesse de la société dotée du label Entreprise du patrimoine vivant, qui a vocation à distinguer les entreprises françaises aux savoir-faire artisanaux et industriels d’excellence : “on achète un lit pour bien dormir, pas seulement dormir”, explique Nicolas Lévy, co-dirigeant de l’entreprise. Un sommeil haut de gamme, ça se traduit d’abord par les plus belles matières premières. “Un matelas Le Lit National, c’est neuf kilos de laine de France, trois kilos de cachemire et deux kilos de soie naturelle. Nous utilisons très peu de mousse car il n’y a pas de process industriel qui le nécessite”, présente-t-il. La laine fait ainsi partie de l’ADN de la marque : naturel, le matériau présente une grande capacité d’absorption de l’humidité et il est aussi anti-acarien et naturellement anallergique. “La laine
Bien dormir n’est plus l’apanage des plus aisés.
En tout cas, c’est la promesse de plusieurs nouveaux venus dans le monde de la literie
française Pour réduire les coûts,
certaines marques françaises font le pari d’un matelas unique vendu sur Internet directement depuis le
fournisseur
utilisée est assez épaisse et frisée, ce qui lui confère des vertus de confort et de rebond que l’on ne retrouvera chez aucune matière synthétique. Le cachemire ou le poil de chameau sur la face hiver renforce l’absorption tandis que la soie et le lin sur la face été procurent un effet fraîcheur”, résume le chef d’entreprise. À cette base de grande qualité s’ajoute une main-d’oeuvre hautement qualifiée : l’atelier du Pré-Saint-Gervais en SeineSaint-Denis emploie vingt-cinq artisans, depuis le menuisier qui va travailler le bois de manière artisanale pour façonner le sommier jusqu’à la matelassière qui s’occupe de la fabrication des coutils 100 % viscose issue de la pulpe de bois. Le tout pour un résultat à chaque fois unique et sur-mesure selon les souhaits du client. Pour un tel degré d’exception, il faut bien sûr y mettre le prix : un lit de type 140 x 190 démarre à 3 500 euros. Basé à Châteauroux, Noctea fait aussi le pari des matières d’origine naturelle et vegans. “C’est un marché qui progresse tout en restant une niche”, précise son co-fondateur Christophe Bigot.
Un lit universel ?
Pour autant, bien dormir n’est plus l’apanage des plus aisés. En tout cas, c’est la promesse de plusieursp nouveaux venus dans le monde de la literie française. À
l’extrême opposé du grand luxe qui propose un lit sur-mesure, ces jeunes pousses vantent l’efficacité d’un matelas… universel. Une idée originale qui est venue à Clément Thenot, fondateur d’Ilobed après avoir étudié le marché actuel de la literie : “On a mis dans la tête des consommateurs que chacun avait besoin d’un matelas différent selon sa position de sommeil, son poids, etc. C’est quelque chose que nous voulons remettre en question : il suffit d’une qualité et d’un soutien qui sont bons pour
tout le monde”, explique-t-il. Le Matelas Français, lui, opte pour un produit deux-en-un : avec la technologie Reverso, le matelas est souple d’un côté et ferme de l’autre. Pour les deux, le confort universel est composé de latex, de mousse à mémoire de forme et de mousse haute résilience. Un tiercé gagnant ? À croire les taux de retour annoncés par les deux dirigeants (7 % et 2,37 % respectivement), c’est un succès. Car pour rassurer les clients encore peu enclins à acheter un matelas sans l’essayer, les marques offrent toutes les deux la livraison dans toute la France ainsi que 100 nuits d’essai. En cas de déception, elles prennent en charge le retour. L’autre critère attractif, c’est le prix. Pour un matelas double standard, comptez 550 euros chez Ilobed et 640 euros chez Le
Matelas Français. “Pour un matelas qui combine ces trois matériaux en boutique, il faut compter entre 1 000 et 1 500 euros”, explique Damien Saillard, cofondateur du Matelas Français qui estampille ses produits d’une bande tricolore. C’est la raison pour laquelle les deux entrepreneurs ont fait le choix d’une distribution pour l’instant exclusivement sur Internet : “La vente en ligne permet de supprimer pas mal d’intermédiaires et de réduire le prix. Il y a chez nous une logique du prix juste”, explique Damien Saillard. Approché par des distributeurs, il exclut pour l’instant
ce circuit : “On nous a sollicités pour commercialiser nos matelas en magasin en nous disant qu’on pouvait les vendre facilement à 1 500 euros… Ce n’est pas notre objectif ! Nous voulons continuer à vendre des matelas haut de gamme mais accessibles”, conclut-il, en précisant qu’il compte parmi ses clients des jeunes qui choisissent Le Matelas Français pour leur première installation. Pour autant, sortir d’Internet est un objectif à moyen terme pour tous les deux : “Nous sommes actuellement en train de travailler avec une agence pour développer une boutique éphémère dans l’objectif de nous différencier des autres
acteurs”, explique le dirigeant qui, pour élargir sa clientèle, a aussi développé une gamme spécifique pour l’hôtellerie. Quant à Ilobed, la jeune marque travaille elle aussi à lancer sa propre boutique.