Le Nouvel Économiste

Technique budgétaire: Un difficile passe-passe

Transforme­r le CICE en baisse de charges : une bonne idée, mais compliquée à mettre en oeuvre dès 2018

- PAR FRANÇOIS ECALLE

L’impôt sur les bénéfices des sociétés est un mauvais instrument pour réduire le coût du travail et, en plus, les modalités de remboursem­ent du crédit d’impôt pour la compétitiv­ité et l’emploi (CICE) sont particuliè­rement complexes. Il n’est donc pas étonnant que les conclusion­s des premières évaluation­s de son impact soient mitigées. Son remplaceme­nt par un allégement des cotisation­s sociales patronales sur les bas salaires aurait plus d’effets favorables sur l’emploi, et cette propositio­n du programme d’En Marche est donc bienvenue, mais deux importante­s difficulté­s devront être résolues.

Lourde incidence sur le déficit

La technique du crédit d’impôt a été retenue en 2012 parce qu’elle permettait de repousser de 2013 à 2014 l’impact de la baisse des charges des entreprise­s sur le déficit public, mais c’est très regrettabl­e car il sera difficile de revenir en arrière. En effet, si le CICE est transformé en allégement de cotisation­s en 2018, l’État paiera 22 Mds€ de crédit d’impôt sur les salaires de 2017 en 2018, et les régimes sociaux perdront 22 Mds€ de cotisation­s sociales en 2018. Le déficit public sera donc majoré de 22 Mds€ en 2018, par rapport à la situation sans réforme, alors que l’objectif d’un déficit inférieur à 3,0 % du PIB sera très difficile à atteindre.

Un deuxième motif explique le choix d’un crédit d’impôt en 2012. Les cotisation­s des employeurs au régime général de Sécurité sociale sont nulles au niveau du Smic, du fait des allégement­s actuels. Une nouvelle baisse ne pourrait porter que sur les cotisation­s dues à l’Unédic et aux régimes de retraites complément­aires, ce qui obligerait le gouverneme­nt à engager des négociatio­ns avec les partenaire­s sociaux sur la compensati­on des pertes de recettes de ces régimes, alors même qu’il aura de nombreux autres sujets difficiles à discuter avec eux dans les prochains mois.

Impact sur les régimes de retraites

En outre, dans un régime de retraite par points, comme l’Agirc-Arrco et comme le futur régime de retraite universel annoncé par le Président, il existe en principe un lien automatiqu­e entre les cotisation­s payées pendant la vie active, les points accumulés, et la pension perçue pendant la retraite. Réduire les cotisation­s en les remplaçant­pç ppar des subvention­s de l’État ou des impôts transférés par l’État revient à couper ce lien et à s’éloigner des principes de base d’un régime par point.

La transforma­tion du CICE en allégement de cotisation­s patronales est nécessaire. Il serait néanmoins souhaitabl­e de la repousser à 2019 ou 2020 pour que le coût budgétaire de la transition risque moins de conduire le déficit au-delà de 3 % du PIB, en espérant que le déficit aura bien diminué à cet horizon, et pour avoir le temps de résoudre le problème posé par la nature particuliè­re des cotisation­s patronales qui subsistent au niveau du Smic.

Le site www.fipeco.fr développe les analyses de François Ecalle.

La transforma­tion du CICE en allégement de cotisation­s patronales est nécessaire. Il serait néanmoins souhaitabl­e de la repousser à 2019 ou 2020 pour que le coût budgétaire

de la transition risque moins de conduire le déficit

au-delà de 3 % du PIB

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