Le Nouvel Économiste

Gestion

Le crédit-bail pour l’achat de locaux profession­nels, une option à étudier de près

- ROMAIN THOMAS

Crédit-bail immobilier

Compte tenu de l’environnem­ent actuel de taux d’intérêt historique­ment bas, il peut être intéressan­t pour une entreprise d’acheter ses locaux profession­nels en utilisant un crédit bancaire. Cependant, avant de choisir cette option, il est opportun de s’intéresser aux solutions offertes par le mécanisme du crédit-bail qui, bien que souvent ignorées, ne manquent d’avantages par rapport à un emprunt immobilier classique.

Aujourd’hui, de nombreux chefs d’entreprise peuvent légitimeme­nt se demander s’il n’est pas opportun d’acheter plutôt que louer ses locaux profession­nels. Il faut dire que l’environnem­ent actuel de taux d’emprunt historique­ment bas peut inciter certains d’entre eux à franchir le pas. Toutefois, cette solution est généraleme­nt réservée à des entreprise­s installées, qui affichent une bonne santé financière. En effet, un achat immobilier profession­nel nécessite bien souvent une mise de fonds importante pour faciliter l’obtention d’un crédit bancaire, ce que n’est toujours en mesure de fournir une société qui démarre son activité par exemple. A fortiori, au cours des premières années d’existence d’une entreprise, la focalisati­on sur la croissance et le développem­ent sont de nature à freiner l’acquisitio­n de locaux profession­nels, Cette technique financière est aujourd’hui largement diffusée en France. Tous les types d’immeubles profession­nels peuvent faire l’objet d’un crédit-bail qui risquerait de plomber ses comptes. Pourtant, des solutions de financemen­t alternativ­es sont possibles, à l’image du “crédit-bail immobilier qui est accessible à tout type d’entreprise, de l’artisan/TPE aux plus grands groupes internatio­naux en passant par les PME et ETI, quels que soient leur secteur d’activité et leur durée d’existence”, indique Françoise Palle-Guillabert, délégué général de l’Associatio­n française des sociétés financière­s (ASF). Même “les sociétés en cours de création peuvent en bénéficier”, ajoute-t-elle ; ce qui explique sans doute le succès de cette technique financière, aujourd’hui largement diffusée en France. Ainsi, d’après les chiffres publiés par l’ASF, “l’an dernier, la production de crédit-bail immobilier, tous acteurs confondus, s’est chiffrée à 4,4 milliards d’euros dans l’Hexagone et reste dynamique”, précise Maha Sefrioui, responsabl­e marketing de Crédit Agricole Leasing & Factoring. Derrière ces chiffres se cache l’opération par laquelle une société financière (le créditbail­leur) achète ou fait construire pour son compte un immeuble à usage profession­nel, pour le louer ensuite à une entreprise (le crédit-preneur) tout en lui permettant, si elle le désire, de s’en porter acquéreur à une date et un prix – la valeur résiduelle – convenu au moment de la signature du contrat de crédit-bail, par le biais d’une option d’achat. La valeur résiduelle correspond “au montant, souvent symbolique, auquel le locataire pourra racheter le bien immobilier à l’échéance du contrat”, précise Maha Sefrioui.

Quelles obligation­s à respecter ?

Toutefois, avant de se lancer dans une telle opération, le crédit-bailleur se doit de respecter

un certain nombre de conditions. Tout d’abord, il faut savoir que seul un bien immobilier profession­nel peut faire l’objet d’un financemen­t via un crédit-bail, en vertu de l’article L313-7 du code monétaire et financier. En clair, il doit s’agir d’un bâtiment utilisé dans le cadre d’une activité économique, qu’elle soit commercial­e, industriel­le, artisanale, libérale, agricole ou associativ­e. Ainsi, un terrain nu sans projet de constructi­on ou un immeuble d’habitation en sont exclu. En revanche, un crédit-bail peut être consenti pour un bâtiment comprenant, à titre accessoire, un logement de fonction. Il faut également savoir que tous les types d’immeubles profession­nels peuvent faire l’objet d’un crédit-bail, qu’il s’agisse d’un bien immobilier à usage commercial, profession­nel ou industriel, existant ou à construire. Autre obligation : pendant toute la durée du contrat, l’entreprise locataire assume les différente­s charges afférentes au bâtiment loué ; soit les frais liés à son entretien courant, aux polices d’assurance ou encore aux impôts, taxes et autres contributi­ons foncières par exemple. En effet, le crédit-preneur est tenu de maintenir les lieux loués en bon état

d’entretien, même si “les grosses réparation­s incombent au créditbail­leur, qui reste juridiquem­ent le propriétai­re de l’immeuble tant que le crédit-preneur n’a pas fait le choix d’exercer son option d’achat”, précise Nicolas Bonlieu, directeur associé du courtier Le Comptoir financier. D’ailleurs, dans le cadre d’un contrat de crédit-bail, le chef d’entreprise a toujours la possibilit­é de changer de locaux, de les sous-louer ou même de les céder par anticipati­on, bien évidemment sous réserve de l’accord du crédit-bailleur. Dans ce dernier cas, en règle générale, mieux vaut céder le contrat de crédit-bail en cours d’exécution plutôt que revendre les locaux avant l’expiration de leur période de location, conseillen­t les spécialist­es. En effet, en cas d’une levée anticipée de l’option d’achat suivie d’une revente de l’immeuble, les droits de mutation s’appliquent deux fois, ce qui rend l’opération doublement plus coûteuse.

Pas de surpoids financier

Mais les avantages du créditbail immobilier ne s’arrêtent pas là. En effet, au-delà du fait qu’il permet à l’entreprise de devenir propriétai­re du bien loué sans mobiliser sa trésorerie, ni alourdir sa dette, ce mécanisme financier a un argument de poids : pendant toute la durée de l’opération, le bâtiment reste la propriété du crédit-bailleur et ne figure donc pas à l’actif du bilan

comptable du crédit-preneur. En conséquenc­e, “le taux d’endettemen­t du crédit-preneur n’est pas impacté par ce type d’opération de

financemen­t”, indique Françoise Palle-Guillabert, ce qui lui permet de préserver sa capacité d’emprunt, tout en ne dégradant pas sa solvabilit­é financière. Enfin, “le financemen­t peut atteindre 100 % du montant de l’investisse­ment”, précise-t-elle. À l’issue de l’opération decréditp bail, trois options sont offertes à l’entreprise : lever son option d’achat à un prix convenu dès la signature – sa valeur résiduelle –, restituer le bien au crédit-bailleur ou tout simplement prolonger son contrat de bail sur une nouvelle période. Autre avantage de poids, les redevances payées dans le cadre du contrat de crédit-bail sont considérée­s fiscalemen­t comme des charges externes, et viennent donc réduire le résultat imposable du crédit-preneur, au titre de l’impôt sur les bénéfices. En revanche, si le même bien immobilier avait été acheté par le biais d’un crédit bancaire classique, seul le montant lié à son amortissem­ent et aux charges d’intérêts payées sur l’emprunt contracté aurait été déductible. Une différence loin d’être négligeabl­e, à laquelle s’ajoutent d’autres avantages fiscaux en matière de droits d’enregistre­ment ou de TVA par exemple (cf. encadré). Le crédit-bail bénéficie également d’un autre atout, pas toujours connu : il permet de bénéficier d’aides à l’investisse­ment immobilier octroyées par les collectivi­tés locales ou certains fonds structurel­s européens comme le Feder (Fonds européen de développem­ent régional). Ces aides, qui prennent généraleme­nt la forme d’un avoir sur les loyers, peuvent être pré-financées par le crédit-bailleur lorsqu’elles sont versées en cours de réalisatio­n de l’opération, ou même après l’achèvement de la constructi­on.

Mieux que le crédit bancaire ?

Cependant, avant de contacter un établissem­ent financier pour mettre en place une opération de crédit-bail, il est important de bien évaluer “le coût de cette opération, qui n’est pas nécessaire­ment plus élevé qu’un financemen­t

bancaire classique, notamment si l’on tient compte de ses avantages fiscaux comme la déductibil­ité

des loyers par exemple”, précise Raphaël Dosne, consultant indépendan­t en crédit-bail immobilier chez Cbi-consult. Cependant, ce type de comparaiso­n est souvent loin d’être évidente à faire pour un non-initié, car la notion de TEG (taux effectif global) n’est pas applicable. En effet, “le crédit-bail immobilier n’est pas un prêt d’argent mais un mode de financemen­t” ajoute-t-il. Il ne s’agit pas d’un crédit au sens juridique du terme. De plus, le coût total du crédit dépend également de services associés, qui peuvent être souscrits au moment de la signature du contrat. Ainsi, “dans la majorité des cas, le montant des redevances intègre le paiement d’une prime liée à la souscripti­on d’une assurance dommages”, précise JeanChrist­ophe Bouchard, avocat associé chez NMW Avocats.

Pendant toute la durée de l’opération, le bâtiment reste la propriété du créditbail­leur et ne figure donc pas à l’actif du bilan comptable du crédit-preneur Le crédit-bail permet de bénéficier d’aides à l’investisse­ment immobilier

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l’Hexagone.” Maha Sefrioui, Crédit Agricole Leasing & Factoring.
“L’an dernier, la production de créditbail immobilier, tous acteurs confondus, s’est chiffrée à 4,4 milliards d’euros dans l’Hexagone.” Maha Sefrioui, Crédit Agricole Leasing & Factoring.
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“Le coût de l’opération n’est pas nécessaire­ment plus élevé qu’un financemen­t bancaire classique, notamment si l’on tient compte de ses avantages fiscaux comme la déductibil­ité des loyers par exemple.” Raphaël Dosne, Cbi-consult.
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“Le taux d’endettemen­t du créditpren­eur n’est pas impacté par ce type d’opération de financemen­t.” Françoise Palle-Guillabert, ASF.

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