Le Nouvel Économiste

Loi travail, ordonnance­s et travailleu­rs handicapés

Plusieurs ordonnance­s de la loi travail pourraient impacter les travailleu­rs en situation de handicap. Avancées ou pas, les avis sont partagés

- MARIE LYAN

En instaurant plusieurs dispositio­ns phares comme le droit au télétravai­l, le plafonneme­nt des indemnités en cas de licencieme­nt abusif ou la modificati­on du compte pénibilité, les ordonnance­s visant à réformer le Code du travail, signées mi-septembre par Emmanuel Macron, pourraient avoir un impact sur l’emploi et l’insertion des travailleu­rs handicapés. Alors que leur taux de chômage atteint le double de la moyenne nationale (19 %), les acteurs du secteur attendent encore des réformes clés comme le chantier de l’assurance chômage et la révision de la formation profession­nelle pour répondre aux problémati­ques d’insertion.

S’il ne cible pas uniquement les travailleu­rs handicapés, le projet de refonte du Code du travail, soumis aux partenaire­s sociaux fin août ppar le Premier ministre Édouard Philippe et la ministre du Travail Muriel Pénicaud, comprend plusieurs mesures qui pourraient avoir un impact sur l’emploi et l’insertion des personnes en situation de handicap. Création d’un droit au télétravai­l, modificati­on du calcul du compte de pénibilité, mais aussi barèmes en cas de licencieme­nts abusifs ou encore disparitio­n du CHSCT… Les acteurs du secteur estiment que le bilan de ces premières mesures destinées à assurer plus de flexisécur­ité dans le monde du travail reste pour l’instant mitigé. Après avoir été présentées aux différente­s représenta­tions syndicales, les nouvelles ordonnance­s relatives au Code du travail ont été signées par Emmanuel Macron et publiées au J.O. à la mi-septembre. Si certaines devront encore être ratifiées par le Parlement, l’essentiel des réformes entrera en vigueur au 1er janvier 2018 au plus tard. “Bien que cela ne va pas révolution­ner le monde du travail, on constate quelques assoupliss­ements : on n’est par exemple plus obligés de passer par un avenant au contrat de travail pour instaurer du télétravai­l”, considère Didier Roche, président de l’Union profession­nelle des travailleu­rs handicapés (Uptih), qui croit que cela pourrait “créer de la fluidité pour l’emploi des personnes

handicapée­s”. “Aucune de ces ordonnance­s n’a donné de droit nouveau aux personnes fragiles, alors que ça aurait pu être l’occasion”, regrette toutefois Didier Eyssartier, directeur général de l’Associatio­n de gestion du fonds pour l’insertion des personnes handicapée­s (Agefiph). “On annonce une flexisécur­ité à la française, mais ces textes sont décorrélés de la formation et de la réforme

de l’assurance chômage”, reprend Véronique Bustreel, conseillèr­e nationale emploi à l’Associatio­n des paralysés de France (APF). Si ce nouveau Code a le mérite de traiter du handicap “de

manière transversa­le” d’après Éric Blanchet, directeur général de l’Associatio­n pour l’insertion sociale et profession­nelle des personnes handicapée­s (ADAPT), “la refonte ne sera complète que si elle va de pair avec une réforme de la formation profession­nelle, annoncée à l’automne”. Un point que défend aussi Dominique Gillot, présidente du Conseil national consultati­f des personnes handicapée­s (CNCPH) : “il y aura des efforts à faire sur le terrain de la formation pour que les travailleu­rs handicapés bénéficien­t davantage de l’alternance et de la reconnaiss­ance de leurs aptitudes”.

Au coeur du dialogue social

Des thématique­s comme la pénibilité, la formation ou les salaires seront désormais placées sous la houlette des accords de branche, et d’autres, sous la responsabi­lité des entreprise­s, telles que la question de l’égalité profession­nelle entre hommes et femmes, la qualité de vie au travail, et l’insertion des personnes handicapée­s. “C’est une avancée, car les personnes handicapée­s en emploi deviennent parties prenantes du dialogue social à travers ces ordonnance­s, au lieu d’être considérée­s dans un dispositif à part”, estime Dominique Gillot. Le secrétaire général de la Fnath (associatio­n des accidentés de la vie), Arnaud de Broca, demeure toutefois sceptique : “le handicap ne fait pas forcément partie des sujets prioritair­es au sein des entreprise­s, qui pourront renvoyer le sujet à la négociatio­n de annuelle, au sein de laquelle la fusion des instances ne va pas forcément faciliter les choses”. Car la nouvelle loi travail entérine aussi le regroupeme­nt de

“Aucune de ces ordonnance­s n’a donné de droit nouveau aux personnes fragiles, alors que ça aurait pu être l’occasion”

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“C’est une avancée : les personnes handicapée­s en emploi deviennent parties prenantes du dialogue social à travers ces ordonnance­s, au lieu d’être considérée­s dans un dispositif à part”, Dominique Gillot, CNCPH.

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