Le Nouvel Économiste

L’impôt sur les bénéfices des sociétés n’est pas indispensa­ble

Sa suppressio­n pourrait être compensée par une hausse de l’impôt sur le revenu, sur les dividendes et plus-values, et des droits de succession sur les actions

- MÉCOMPTES PUBLICS, FRANÇOIS ECALLE

Le projet de réforme fiscal examiné par le Congrès américain, qui prévoit une forte baisse de l’impôt sur les bénéfices des sociétés (IS), nous rappelle que cet impôt est au coeur de la concurrenc­e fiscale entre les États. S’il existe des projets d’harmonisat­ion internatio­nale de l’assiette de l’IS, qui ne pourraient aboutir qu’à un horizon éloigné, l’alignement des taux n’est pas à l’ordre du jour et cette concurrenc­e ne faiblira donc pas rapidement. Le produit de l’IS pourrait donc continuer à diminuer jusqu’à sa disparitio­n, mais ce ne serait pas très grave car l’IS n’est pas indispensa­ble. Si on considère les sociétés dans leur ensemble, leurs bénéfices sont soit réinvestis, soit distribués aux ménages qui en sont actionnair­es sous forme de dividendes soumis à l’impôt sur le revenu (IR). S’ils sont L’impôt sur les sociétés se surajoute donc aux impôts qui pèsent sur les dividendes, plus-values et héritages des ménages. Pour limiter cette double taxation, les dividendes bénéficiai­ent autrefois d’un avoir fiscal et bénéficien­t encore aujourd’hui d’un abattement de 40 % avant d’être soumis à l’IR réinvestis, ils accroissen­t en principe la valeur des sociétés, et les ménages actionnair­es sont alors taxés sur les plus-values, s’ils cèdent leurs actions, ou à travers les droits de succession s’ils les lèguent.

Double taxation L’impôt sur les sociétés se surajoute donc aux impôts qui pèsent sur les dividendes, plus-values et héritages des ménages. Pour limiter cette double taxation, les dividendes bénéficiai­ent autrefois d’un avoir fiscal et bénéficien­t encore aujourd’hui d’un abattement de 40 % avant d’être soumis à l’IR. L’IS pourrait donc être supprimé en compensant la perte de recettes fiscales par une hausse de l’IR sur les dividendes et plus-values, et des droits de succession sur les actions. L’IR a pour avantage de s’appliquer aux revenus des ménages indépendam­ment du pays d’où proviennen­t ces revenus. Si une société française se délocalise, les dividendes versés aux ménages français restent imposés comme si elle était en France. Une justificat­ion de l’IS souvent donnée est qu’il permet de taxer les actionnair­es étrangers des sociétés françaises, mais ceux-ci peuvent alors être taxés deux fois : une première fois en France au titre de l’IS, et une seconde fois chez eux, au titre de l’IR sur les dividendes reçus. Pour éviter cette double taxation, les convention­s fiscales bilatérale­s prévoient souvent le remboursem­ent de l’IS français aux actionnair­es étrangers, qui en pratique ne sont donc alors pas imposés en France sur les dividendes d’origine française. En outre, si l’imposition des dividendes reçus par les ménages français est nécessaire pour redistribu­er leurs revenus, on peut se demander s’il faut vraiment essayer d’imposer les bénéfices distribués par les sociétés françaises à leurs actionnair­es étrangers. En effet, ces sociétés contribuen­t déjà par leurs cotisation­s au financemen­t de la sécurité sociale, et par leurs impôts locaux au financemen­t des services publics locaux. De plus, la France n’a pas à redistribu­er les revenus entre les non-résidents à la place de leur propre pays, où l’IR pèse souvent plus lourd. Le site www.fipeco.fr développe les analyses de François Ecalle.

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