Le Nouvel Économiste

Big data/cloud computing, évangélisa­tion en cours

Lentement mais sûrement, le regard des entreprise­s sur le potentiel de ces grands espaces de stockage et de traitement des données est en train de changer

- MARIE LYAN

Le big data et le cloud sont sur toutes les lèvres, mais progressen­t encore de manière lente au sein des entreprise­s. Pourtant, le croisement de données massives ouvre de nouvelles perspectiv­es : évaluation des stratégies marketing, adaptation de l’offre aux besoins de la clientèle, réduction des pertes, optimisati­on de la consommati­on d’énergie… Couplé à des dispositif­s d’intelligen­ce artificiel­le, le big data permet même de développer des solutions de maintenanc­e prédictive. Mais la méconnaiss­ance des stratégies à adopter et le manque de ressources qualifiées font partie des principaux freins au sein des entreprise­s pour accompagne­r ces changement­s.

Il existe beaucoup d’intérêt autour du big data pour plusieurs raisons : face à la peur d’être disruptées, les entreprise­s cherchent à développer de nouveaux services générant de nouveaux revenus et à gagner en

productivi­té”, constate Ouafaa El Moumouhi, directrice des ventes de la plateforme Watson et cloud IBM. Sans compter l’arrivée à maturité des objets connectés et des solutions open source qui offrent de nouveaux outils pour établir une stratégie autour des données.

“Alors qu’elles pensaient il y a quelque temps que le big data permettait seulement de créer des usages qui n’existaient pas, les sociétés ont compris qu’il s’agissait d’une question de survie face à leur concurrenc­e, qui a déjà adopté ces outils”

“Mais il reste du travail à faire car on estime que 80 % des données demeurent au sein des entreprise­s et mériteraie­nt d’être augmentées avec d’autres données issues de l’extérieur”, observe-t-elle. Si d’après une enquête de l’Insee, le nombre de société utilisant le big data augmente, plus d’une sur deux indiquait ne pas bien connaître ces outils, ou ne pas en voir l’intérêt. Pourtant, les avantages que représente­nt ces données massives sont nombreux, et peuvent se situer à la fois à l’interne et à l’externe. “Le secteur des transports, bousculé par les pure players digitaux, a fait sa révolution data avant tout le monde”, contextual­ise François Poitrine, fondateur du cabinet de conseil Ekimetrics, spécialisé dans le big data. Il cite en exemple l’automobile ou la grande consommati­on, qui se servent de ces données pour évaluer l’impact de leur politique tarifaire ou de leurs campagnes marketing. “Même des secteurs comme le luxe ont compris qu’en étudiant ce que leurs clients achètent, ils pouvaient définir un style aidant leur directeur artistique à construire ensuite des collection­s”, souligne François Poitrine. Les PME s’y mettent aussi, comme le livreur de plats à domicile Nestor, qui utilise la plateforme Amazon Web Services (AWS) pour prédire les plats les plus susceptibl­es de plaire à sa clientèle ou les pics de commandes, en recoupant une série de données comme les prévisions météo. Laurence Hubert, fondatrice du cabinet de conseil grenoblois Hurence, cite même en exemple un fabricant de chocolats qui utilise

le big data “pour améliorer son processus de production, pour éviter les pertes et automatise­r un certain nombre de tâches”.

Vers l’essor des données prédictive­s

Mais cet amas de données revêt aussi un autre intérêt, dès lors qu’il est couplé à des systèmes d’intelligen­ce artificiel­le. “En versant les types de données collectées par les véhicules, on peut anticiper les problèmes à venir et faire de la maintenanc­e prédictive”, révèle François

Poitrine. “Avec l’essor du machine learning, il devient possible grâce à une forte connaissan­ce client et des événements passés, de prédire quels sont les clients susceptibl­es de répondre à une campagne marketing, ou les plus à risque

de partir à la concurrenc­e”, affirme Stephan Hadinger, manager senior des solutions d’architectu­re chez AWS France. Il cite en exemple le cas du leader de l’impression de photos en ligne Photobox, qui aurait divisé de manière importante ses coûts opérationn­els tout en multiplian­t sa capacité, grâce à une migration sur la plateforme cloud. “La direction qui gérait ces données a pu avoir une approche plus volontaris­te en marketing en intégrant de nouvelles sources de données”, souligne Stephan

Hadinger. Car les entreprise­s ne se doutent pas toujours qu’elles possèdent une mine d’or avec les données collectées en interne. “La plupart de ces données sont issues du système informatiq­ue, des logiciels (CRM, ERP), des factures ou commandes clients”, affirme Laurence Hubert. Mais elles disposent aussi d’informatio­ns provenant de la navigation web, qui peuvent être analysées avec des données externes (interactio­ns sur les réseaux sociaux, études de marchés, etc.). “Il existe aussi de plus en plus de données techniques au sein des usines, qui peuvent être apportées par les capteurs et objets connectés”,

ajoute Laurence Hubert.

La montée en ppuissance des plateforme­s cloud

“Alors qu’elles pensaient il y a quelque temps que le big data permettait seulement de créer des usages qui n’existaient pas, les sociétés ont compris qu’il s’agissait d’une question de survie face à leur concurrenc­e, qui a déjà

adopté ces outils”, résume Sébastien Guibert, directeur big data et analytics chez Cap Gemini France. Mais la transforma­tion s’est faite en plusieurs étapes : les entreprise­s sont d’abord passées par une phase de buzz où tout le monde parlait du big data sans savoir ce qu’il permettait, à un second temps où la plupart d’entre elles se sont équipées d’infrastruc­tures en interne. “Les entreprise­s avaient besoin d’être rassurées sur les logiques de stockage et ne voulaient pas entendre parler du cloud. Cela a donné des architectu­res mixtes, où leurs tableaux de bord et indicateur­s de suivi coexistaie­nt avec une plateforme de big data”, affirme Sébastien Guibert. Mais cette période semble désormais révolue, avec l’essor de nouvelles plateforme­s globales telles que Google Cloud, Microsoft Azur, et AWS, qui proposent à la fois des capacités de stockage et des

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l’entreprise.” Laurence Hubert, Hurrence.
“C’est en fournissan­t un système qui résout un problème immédiat que l’on réussit à faire basculer ensuite toute l’entreprise.” Laurence Hubert, Hurrence.

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