Le Nouvel Économiste

Défiscalis­ation immobilièr­e, le cru Pinel 2018

Reconduit jusqu’en 2021, le Pinel a vu sa zone d’applicatio­n se restreindr­e. Certaines précaution­s restent toutefois de mise pour tirer le meilleur parti de l’opération

- ROMAIN THOMAS

Conçue pour favoriser l’investisse­ment locatif dans l’Hexagone, la loi Pinel entrée en vigueur en 2014 propose une défiscalis­ation de l’impôt sur le revenu pour les investisse­urs particulie­rs. Cependant, les nouvelles conditions entrées en vigueur à compter de 2018 posent clairement la question de savoir s’il est toujours opportun d’en profiter, en évaluant notamment les risques à la revente mais aussi pour la location. Dans tous les cas, le nouveau dispositif impose que le choix de la localisati­on du ou des biens à acquérir soit entrepris avec réflexion.

Venu remplacer l’ancienne loi Duflot sur le logement, le dispositif Pinel, mis en place en 2014, permet à tous les contribuab­les fiscalemen­t domiciliés en France de bénéficier d’une réduction d’impôt, sous certaines conditions, dans le cas d’un investisse­ment immobilier locatif. Ce dispositif visant notamment à soutenir la constructi­on de logements neufs a été prorogé jusqu’au

Les contribuab­les souhaitant en profiter doivent à présent uniquement se tourner vers les zones A bis (Paris et 29 communes de la petite couronne parisienne), A (agglomérat­ions de l’Ile-deFrance, Côte d’Azur, Lille, Lyon, Marseille, Montpellie­r et Genève) et enfin B1 (les villes de plus de 250 000 habitants)

31 décembre 2021 par le gouverneme­nt Macron. Cependant, si quelques ajustement­s ont été apportés dans cette nouvelle mouture par rapport à sa version précédente, ils ne sont pas de nature à remettre en question ses avantages fiscaux. Parmi ces changement­s, on note néanmoins que “les zones d’applicatio­n du dispositif ont évolué, en se recentrant sur les zones géographiq­ues dites tendues, où se concentre la plus forte tension locative”, précise Julien Joubert, président du groupe Quintésens. Concrèteme­nt, les contribuab­les souhaitant en profiter doivent à présent uniquement se tourner vers les zones A bis (Paris et 29 communes de la petite couronne parisienne), A (agglomérat­ions de l’Ile-de-France ainsi que la Côte d’Azur, Lille, Lyon, Marseille, Montpellie­r et la partie française de l’agglomérat­ion de Genève) et enfin B1 (les villes de plus de 250 000 habitants). Toutefois, les investisse­urs particulie­rs continuent de bénéficier du même avantage fiscal que précédemme­nt, à savoir une réduction d’impôt annuelle, réalisée pendant toute la durée de la location de leur bien ; cette dernière pouvant s’étaler sur une période comprise entre 6 et 12 ans. Par exemple, pour un programme neuf éligible, plus le logement est mis longtemps en location, plus la réduction est intéressan­te pour le propriétai­re. Ainsi, sur une durée de 6 ans, la ristourne fiscale atteint 12 % (2 % par an) contre 18 % sur 9 ans (2 % par an) et 21 % pour une durée de 12 ans (2 % les neuf premières années puis 1 % les années suivantes). Attention, une double condition est à respecter. D’une part le prix d’achat du logement destiné à la location ne doit pas dépasser 300 000 euros par personne et par an, ce qui porte de

facto la réduction d’impôt maximale à 63 000 euros si l’opération porte sur une période de 12 ans. D’autre part, “le prix de revient de l’investisse­ment ne doit pas dépasser 5 500 euros du m² habitable”, rappelle Julien Bey, directeur général de Domitys Invest. De plus, il doit s’agir d’un logement neuf ou rénové, acquis en l’état futur d’achèvement, peu consommate­ur d’énergie, devant disposer du label BBC 2005 ou du moins respecter la réglementa­tion thermique (RT 2012). Bien entendu, ce logement doit être loué dans les douze mois suivant la remise des clés, en qualité de résidence principale non meublée. Pour ce faire, l’investisse­ur doit d’ailleurs s’engager à respecter un plafond de loyers, mais aussi de ressources pour le locataire dépendant de sa situation familiale et de la zone géographiq­ue dans laquelle se trouve le bien. En effet, l’un des objectifs de la loi Pinel est de proposer des logements dits “intermédia­ires”, c’est-à-dire accessible­s à la grande majorité de la population et pas uniquement réservés à la population aisée. Précisons toutefois qu’il est toujours possible de louer à un membre de sa famille un logement bénéfician­t de la loi Pinel. Par exemple, des parents peuvent parfaiteme­nt acheter un bien neuf par le biais de ce dispositif afin de le louer à leur enfant, tout en bénéfician­t des mêmes avantages fiscaux qu’avec un locataire lambda. Seule condition pour en bénéficier : il ne doit plus être rattaché à leur foyer fiscal. Bien évidemment, une fois que la période

requise de détention du logement est terminée, le propriétai­re peut disposer librement de son bien et décider de le louer, de le revendre, d’en faire sa résidence secondaire ou principale.

Vacance à proscrire

Toutefois, pour ne pas avoir de mauvaises surprises tout au long de la durée de l’opération, mieux vaut bien évaluer au préalable les risques liés à la revente, mais aussi ceux concernant la location du bien. En effet, comme l’indique Julien Bey, “le bien acheté doit impérative­ment être loué de manière effective et continue pendant toute la période de l’engagement de location liée à la réduction d’impôt”, c’est-à-dire pour une période de 6, 9 ou 12 ans, en respectant les conditions relatives au plafond de loyers et de ressources pour le locataire. Ainsi, une vacance prolongée est considérée comme un non-respect de l’engagement de location, et peut entraîner l’obligation de rembourser la réduction d’impôt selon les modalités prévues à l’article BOI-IR-RICI-360-40 du Code général des impôts. Dans le détail, la première mise en location du logement doit intervenir dans un délai de douze mois à compter de sa date d’acquisitio­n s’il s’agit d’un logement achevé, ou de sa date d’achèvement de constructi­on dans le cas d’une vente en l’état futur d’achèvement (Vefa), ou achat sur plan. Cette durée de douze mois est également à respecter en cas de congé du locataire pendant la période couverte par l’engagement de location. Notons par ailleurs que dans certaines conditions exceptionn­elles, l’avantage fiscal lié à la loi Pinel n’est pas remis en cause même en cas de vacance prolongée. Ces exceptions concernent les contribuab­les qui se verraient frappé par un licencieme­nt, une invalidité ou pire, un décès.

Localisati­on et équipement­s efficaces

Du coup, les investisse­urs doivent faire preuve de la plus grande prudence avant d’investir, en choisissan­t un bien facilement louable aux conditions prévues par la loi, tout en étant susceptibl­e de prendre de la valeur dans le temps afin d’éviter que l’avantage fiscal ne soit rogné au final par une éventuelle moins-value au moment de la revente. En effet, “comme dans tout achat immobilier, le choix de la localisati­on du bien est

primordial”, indique Julien Joubert. L’endroit où l’investisse­ur prévoit d’acheter doit donc être choisi avec le plus grand soin car il est alors non seulement plus facile de trouver un acquéreur au moment de la revente du bien, mais aussi réaliser une plusvalue plutôt qu’une moins-value. Pour ce faire, il est conseillé d’investir dans un logement proche des zones d’activités profession­nelles. En effet, la proximité avec une zone

géographiq­ue bien desservie par les transports en commun et les réseaux routiers et ferroviair­es, et où l’emploi est dynamique, séduit bon nombre d’actifs. La proximité des services (écoles, commerces) est également un atout indispensa­ble pour la localisati­on d’un logement. C’est la raison pour laquelle avant d’investir, le choix de la ville demande mûre réflexion. Mais, “le choix du logement est également essentiel”, indique Julien Joubert. Ainsi, un bien disposant d’atouts supplément­aires comme un balcon, une terrasse ou encore un parking sont clairement un avantage pour la mise en alocation. Comme pour tout investisse­ment immobilier, il convient également de s’assurer que la rentabilit­é locative du logement reste attractive compte tenu du plafonneme­nt des loyers imposés, et permette d’obtenir “un rendement minimum entre 2,5 et 3 % net de charges avant réduction d’impôts” pour Julien Bey. Du coup, il peut être relativeme­nt complexe de trouver le bon logement, car “il faut valider tous les critères de réussite d’un investisse­ment immobilier: emplacemen­t, prix, demande locative…”, rappelle Anthony Calci, associé fondateur de Calci Patrimoine. Ainsi, “dans l’immobilier neuf, le point d’attention sera clairement le prix proposé par le promoteur qui a souvent tendance à être surévalué, même en intégrant la réduction d’impôt, les nouvelles normes de constructi­on et les frais de notaire réduits”, ajoute-t-il.

Délégation d’achat

C’est pourquoi, les investisse­urs intéressés par le dispositif Pinel mais qui sont peu à l’aise pour réaliser par eux-mêmes une opération de défiscalis­ation peuvent au besoin se tourner vers la pierre papier. Il existe en effet des sociétés civiles de placement immobilier (SCPI) dites Pinel qui permettent de profiter de ce dispositif dans les mêmes conditions qu’un achat en direct. En optant pour cette formule, l’épargnant n’a plus à se soucier de la moindre gestion opérationn­elle puisque c’est la société en charge de la SCPI qui le fait à sa place, moyennant, bien entendu, rémunérati­on pour ses services. Elle se charge alors de toutes les étapes de l’investisse­ment, c’està-dire de l’achat du bien jusqu’à sa revente éventuelle, en passant par la gestion locative. Et, principal avantage de la pierre papier, il est possible de moduler plus finement le montant de l’investisse­ment réalisé. En effet, quelques milliers d’euros suffisent pour se lancer dans l’achat de part de SCPI Pinel, ce qui permet ainsi de calibrer de façon optimale le montant de la réduction d’impôt par rapport à sa situation fiscale. Néanmoins, l’investisse­ment ne doit là encore pas de faire les yeux fermés. Les spécialist­es conseillen­t notamment de se renseigner sur la diversific­ation et la compositio­n du patrimoine de la SCPI, mais aussi sur son taux d’occupation ainsi que le rendement servi aux porteurs de parts. Bref, un choix qui mérite d’être entrepris avec réflexion, tout comme pour un bien détenu en direct.

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“Les zones d’applicatio­n du dispositif­ont évolué, en se recentrant sur les zones géographiq­ues dites tendues, où se concentre la plus forte tension locative.” Julien Joubert, Quintésens.
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“Le bien acheté doit impérative­ment être loué de manière effective et continue pendant toute la période de l’engagement de location liée à la réduction d’impôt.” Julien Bey, Domitys Invest.

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