Protection du dirigeant, la couverture panoramique
Aux côtés des incontournables responsabilité civile et contrats de prévoyance, les contrats liés à la cybersécurité commencent à s’imposer
Ils n’en ont pas forcément conscience mais les dirigeants d’entreprise encourent une responsabilité distincte de leur société. En cas de problème, leur patrimoine personnel peut être directement mis à mal. Ils peuvent également être insuffisamment couverts lors d’un arrêt de travail ou d’un départ à la retraite. Ils doivent donc souscrire des assurances pour couvrir leur responsabilité personnelle, et ne pas négliger les contrats liés à la prévoyance. Mais un nouveau risque se fait jour qui peut impliquer la responsabilité personnelle du dirigeant : la cybercriminalité.
Bien protéger son entreprise est essentiel pour un chef d’entreprise… tout autant que bien protéger son patrimoine personnel. Pourtant, certains patrons prennent le risque de mettre en péril leurs biens personnels en négligeant de se protéger à titre individuel. L’assurance responsabilité civile professionnelle, qui couvre la structure de la société, ne peut en effet intervenir lorsque le dirigeant est mis en cause. Sa responsabilité personnelle peut être engagée en cas de non-respect de la loi et des règlements, de violation des statuts de l’entreprise ou encore de faute
Entorses aux règles d’hygiène et propreté, harcèlement moral, non-convocation du conseil d’administration, mauvaise décision stratégique, déclaration inexacte, problèmes avec les syndicats,… La liste est longue et une négligence peut vite peser lourd
de gestion. “En général, les poursuites sont liées à des actes de mauvaise gestion”, précise Max Denis, responsable coordination grands comptes chez MMA. Entorses aux règles d’hygiène et propreté, harcèlement moral, non-convocation
du conseil d’administration, mauvaise décision stratégique, déclaration inexacte, problèmes avec les syndicats… La liste est longue et une négligence peut vite peser lourd. Notamment en cas de faillite. “Lors d’une liquidation judiciaire, si le dirigeant a fait des erreurs de gestion, les créanciers peuvent le mettre en cause et lui demander réparation du préjudice”, assure Bénédicte Delaleux, directrice du département risque financier au sein de Chubb. Ces nombreux risques peuvent entraîner des frais de défense en cas de mise en cause par une juridiction civile ou pénale, et le paiement d’éventuelles indemnités. “Le contexte économique actuel est très tendu et la pression sur les dirigeants augmente”, avertit Benjamin Barès, directeur de l’unité Entrepreneurs et professionnels pour l’assureur Hiscox.
Protection personnelle
Pour protéger son patrimoine en cas de procédure judiciaire coûteuse, le chef d’entreprise a donc tout intérêt à souscrire une assurance personnelle. En l’occurrence à l’assurance responsabilité civile des mandataires sociaux (RCMS), qui prend en charge les frais de défense (honoraire avocat, frais de procès, frais d’expertise et d’enquête, etc.) et le paiement des dommages et intérêt le cas échéant. En revanche, elle ne couvre pas les conséquences d’une faute
intentionnelle, ni les sanctions pénales ou administratives mises à la charge du dirigeant. Selon les assureurs, les extensions et limites de garanties ainsi que les options sont nombreuses et modulables. Par exemple, MMA propose une option de rapatriement. “S’il survient un événement majeur qui place l’entreprise en situation de crise lorsque le chef d’entreprise est en déplacement et qu’il doit abréger son voyage, nous prenons en charge les coûts liés à son rapatriement d’urgence”,
détaille Max Denis. “Depuis début 2017, nous observons une accélération des souscriptions concernant les contrats relatifs à la cybersécurité”
Attention à la cybercriminalité
Par ailleurs, de nouvelles menaces peuvent peser sur les dirigeants. “Nous observons l’émergence de nouveaux risques, notamment liés à la réglementation en matière d’environnement et à la cybersécurité. Cela peut être source de grosses inquiétudes pour les chefs d’entreprise”, souligne Bénédicte Delaleux. De fait, de nombreux assureurs proposent désormais des contrats liés aux cyber-risques. “Notre rôle est d’accompagner notre client au moment de la réalisation du cyber-risque, en mettant notamment à sa disposition des experts qui vont pouvoir restaurer la situation au plus vite. Le contrat cyber comprend également un volet indemnisation, lorsque le problème informatique a par exemple entraîné un arrêt de production, et donc une perte importante pour l’entreprise”, ajoute Bénédicte Delaleux. Ces contrats semblent connaître une activité florissante. “Depuis début 2017, nous observons une accélération des souscriptions concernant les contrats relatifs à la cybersécurité”, confie Alex Boussac, responsable étude responsabilité civile chez le courtier en assurance Verspieren. Et l’engouement pour ce type de protection devrait grandir, en ligne avec l’évolution de la réglementation, et notamment l’entrée en vigueur depuis fin mai 2018 du RGPD, le règlement européen pour la protection des données personnelles. Celui-ci impose notamment aux entreprises ayant subi un vol de données d’en avertir l’ensemble des clients concernés. “En France, cela pourra se traduire par l’envoi d’un courrier en recommandé à tous les clients dont les données se trouvaient dans les fichiers clients piratés. Cela générera forcément des coûts substantiels”, souligne Max Denis. “Dans certains cas, cela pourrait placer le chef d’entreprise qui n’aurait pas souscrit d’assurance cyber-risques dans une situation délicate. On pourrait considérer qu’il a fait une faute de gestion personnelle”, met également en garde Max Denis.
Ne ppas faire l’impasse sur la prévoyance
Un arrêt de travail prolongé ou un décès peuvent également mettre à mal l’entreprise et le patrimoine personnel du dirigeant. Selon son statut, il sera plus ou moins bien protégé. “En matière de prévoyance, il faut distinguer les mandataires sociaux assimilés salariés et les dirigeants non salariés”, explique Thomas Ducorps, directeur du marché épargne retraite chez Verspieren. Si le premier statut permet au dirigeant de bénéficier globalement des mêmes avantages qu’un salarié cadre, en cotisant auprès de la sécurité sociale, pour les patrons non salariés (gérant majoritaire de SARL, artisan, commerçant, etc.), c’est une autre histoire. “Ces derniers cotisent auprès d’autres caisses, comme le RSI [Regime social des indépendants]. Cela leur coûte moins cher mais ils ne sont quasiment pas couverts en cas de problème. Pour eux, il existe une vraie carence de protection”, affirme Thomas Ducorps. Les contrats de prévoyance visent à pallier ce manque et permettent de couvrir le dirigeant sur trois risques : l’invalidité, le décès et l’arrêt de travail. Lors de la souscription d’une assurance
prévoyance, il est également essentiel de regarder le mode de calcul de l’indemnisation, qui peut prendre en compte ou non
l’activité professionnelle. “Pour les dirigeants, les bons contrats de prévoyance sont ceux dont le taux d’invalidité est mesuré en fonction du retentissement de l’incapacité consécutive au sinistre sur l’exercice de l’activité professionnelle”,
estime Thomas Ducorps. “Par exemple, si un chef d’entreprise se coupe des doigts, l’impact de cet accident sur son activité professionnelle sera différent selon sa profession : un artisan ou un chirurgien sera dans l’incapacité de travailler, à la différence d’un chef d’entreprise qui exerce son activité dans des bureaux. Le barème fonctionnel ne prend pas en compte ces différences”, illustre-t-il. Côté retraite, le schéma est similaire. Les patrons non salariés cotisent moins et partent donc avec de maigres revenus lorsqu’ils arrêtent leur activité. Pour ne pas se retrouver trop démunis, ils peuvent souscrire une retraite complémentaire sur laquelle ils verseront des cotisations supplémentaires. En plus de gonfler leur capital retraite, ce contrat permet aussi de bénéficier d’un avantage fiscal. “La loi Madelin permet de déduire fiscalement tous les ans les cotisations versées sur la
complémentaire retraite”, souligne Thomas Ducorps. Une bonne protection en matière de responsabilité et de prévoyance est donc nécessaire à tout dirigeant, aussi bien du côté des grands groupes que des PME.
Les contrats de prévoyance permettent de couvrir le dirigeant sur trois risques : l’invalidité, le décès et l’arrêt de travail