Le Nouvel Économiste

Portage salarial, l’emploi du futur ?

Simplicité, sécurité et flexibilit­é, pour le salarié porté comme pour l’entreprise cliente : le portage salarial est un mode de travail dans l’ère du temps

- JESSICA BERTHEREAU

À mi-chemin entre le salariat et l’entreprene­uriat, le portage salarial a le vent en poupe. Inscrit dans le Code du travail depuis 2015 et disposant d’une convention collective depuis l’année dernière, il permet d’exercer une activité indépendan­te tout en conservant la couverture sociale du salariat. Le porté est rémunéré par l’entreprise de portage tout en étant autonome dans le démarchage de ses clients et l’organisati­on de ses missions. Il délègue les tâches administra­tives, comptables et jjuridique­sq à la société de pportage,g, qqui reçoit ç en contrepart­ie une commission. Être porté permet aussi d’être accompagné, de bénéficier de formations et de la dynamique d’un réseau.

Même si le contrat à durée indétermin­ée (CDI) demeure la forme dominante d’emploi en France, la part du travail indépendan­t progresse depuis plusieurs années. Une étude de l’Associatio­n pour l’emploi des cadres (Apec) publiée en décembre dernier signale ainsi que depuis 10 ans, l’emploi non salarié progresse plus vite que l’emploi total, en particulie­r dans le secteur tertiaire. Dans ce contexte, le portage salarial, qui se situe à mi-chemin entre le salariat et l’entreprene­uriat, a le vent en poupe. “Ce mode

d’entreprena­riat connaît un succès grandissan­t, en particulie­r dans les métiers du conseil ou du numérique”, assure Guillaume Cairou, président du groupe Didaxis Hiworkers. Le portage salarial a tout particuliè­rement bénéficié ces dernières années de la sécurisati­on de son régime juridique : après être longtemps resté sans fondement légal, il a été inscrit dans le Code du travail en 2015 et bénéficie d’une convention collective depuis l’été dernier. “Le premier avantage offert par le portage salarial est de pouvoir valoriser son expertise et travailler en toute indépendan­ce tout en préservant son statut de salarié”, souligne Claude Tempé, directeur général du groupe Freelance. com. Qualifié dans les textes de “profession­nel autonome”, le porté voit ses honoraires transformé­s en salaire par l’intermédia­ire de l’entreprise de portage. Cette dernière signe un contrat de travail avec le porté, à durée déterminée ou indétermin­ée, et un contrat commercial avec l’entreprise cliente du porté. “En France, il y a un grand écart entre la couverture sociale des indépendan­ts et celle des salariés. Quand on a longtemps été salarié classique, le régime du portage salarial permet de maintenir la même couverture sociale en matière de maladie, de chômage, de retraite et de prévoyance”, indique Radhia Amirat, directrice générale de la société de portage ITG.

Levier de négociatio­n

Cette alliance de sécurité et de flexibilit­é qu’offre le régime du portage salarial est aussi valable pour le porté que pour l’entreprise cliente. “Le portage salarial est un levier de négociatio­n pour décrocher une mission parce qu’il offre de la flexibilit­é : le contrat peut être facilement prolongé ou raccourci si besoin est. Il offre aussi de la sécurité : pour le porté au travers notamment des droits aux indemnités chômage en cas d’interrupti­on de la mission, et pour l’entreprise qui limite le risque de requalific­ation en contrat de travail”, explique Daniel Pardo, fondateur et dirigeant de la société de portage Flexi-Entreprene­ur. “Les entreprise­s sont particuliè­rement sensibles à l’aspect juridique, confirme Radhia Amirat. Dans 75 % des cas, le porté est en

CDI. Il a plusieurs clients et moins de dépendance économique qu’un micro-entreprene­ur qui démarre.” Par ailleurs, le portage salarial s’inscrit tout à fait dans l’évolution des modes de travail au sein des entreprise­s. “La structure des entreprise­s évolue de plus en plus vers le travail en ‘mode mission’ : elles ont besoin de monter des équipes pour des durées déterminée­s qui se dissolvent une fois le projet achevé”, souligne Claude Tempé. Si le porté bénéficie de la couverture sociale du salarié, il est bien plus autonome que ce dernier. “Contrairem­ent à un salarié classique, le porté est autonome dans la gestion de son activité profession­nelle et il est libre de choisir

ses clients”, explique Guillaume Cairou. La société de portage n’étant pas tenue de fournir du travail au salarié porté, ce dernier doit lui-même chercher ses clients et convenir avec eux des conditions d’exécution de sa prestation et de son prix. Mais, “contrairem­ent à la création d’entreprise, le porté est libéré des démarches administra­tives, juridiques, fiscales et comptables liées à une activité d’entreprene­ur

classique”, ajoute Guillaume Cairou. Ces tâches sont déléguées à la société de portage, qui reçoit en contrepart­ie une commission qui représente généraleme­nt entre 5 % et 15 % du chiffre d’affaires.

Depuis 10 ans, l’emploi non salarié progresse plus vite que l’emploi total, en particulie­r dans le secteur tertiaire. Dans ce contexte, le portage salarial, qui se situe à mi-chemin entre le salariat et l’entreprene­uriat, a le vent en poupe

Se concentrer sur son activité

Être libéré de toutes ces formalités permet au porté de se concentrer sur le développem­ent de son activité. “Quand on se met à son compte, il faut à la fois effectuer ses

missions et développer sa clientèle : prospecter, rebondir sur une première mission, créer et entretenir un réseau. Cette partie commercial­e n’est pas forcément naturelle pour tous et requiert du temps”, souligne Radhia Amirat. Il est donc particuliè­rement avantageux de ne pas avoir à se préoccuper en plus des démarches administra­tives. “Les portés me disent souvent que s’ils devaient gérer tout l’aspect administra­tif de leur activité, un tiers de leur temps y passerait, rapporte Claude Tempé. Le portage permet de se focaliser sur le savoir-faire de l’individu.” C’est

aussi un gage de facilité : “dès que le porté trouve une mission, il n’a pas besoin de réfléchir à la création d’une structure juridique, il peut démarrer rapidement. Chez nous, tous les contrats sont dématérial­isés et dotés de signature électroniq­ue, ce qui permet d’aller encore plus vite”, indique Daniel Pardo. Le régime du portage salarial permet aussi d’être accompagné, de bénéficier de formations et de la dynamique d’un réseau. “Aujourd’hui, de plus en plus de personnes choisissen­t de se mettre à leur compte. Cela signifie de plus en plus de monde sur le marché. Il faut donc savoir se différenci­er et se profession­naliser, ce qui est plus facile à faire quand on est accompagné par une société de portage”, juge Radhia Amirat. Par exemple, il peut être difficile de fixer le prix de sa prestation. “Quand on vient du salariat, on ne pense pas à tout ce qu’un indépendan­t doit inclure en termes de temps de prospectio­n, de préparatio­n, de développem­ent personnel ou encore de charges”, souligne la directrice d’ITG, qui propose des formations en la matière.

Montée en compétence

La plupart des entreprise­s de portage offrent donc des services

d’accompagne­ment divers et

variés. “Chez Flexi-entreprene­ur, nous proposons par exemple une séance chez un photograph­e profession­nel, des formations spécifique­s pour savoir comment trouver des missions et un accès à des réseaux d’experts dans lesquels il est possible d’échanger et parfois de trouver des missions”, indique Daniel

Pardo. “Chez Didaxis, nous avons

“De plus en plus de personnes choisissen­t de se mettre à leur compte. Cela signifie de plus en plus de monde sur le marché. Il faut donc savoir se différenci­er et se profession­naliser, ce qui est plus facile à faire quand on est accompagné par une société de portage”

mis en place un accompagne­ment personnali­sé avec différents services comme la mise à dispositio­n d’espaces de travail, l’assistance à la rédaction d’offres commercial­es et la réalisatio­n de supports de communicat­ion, détaille de

son côté Guillaume Cairou. Nous apportons aussi une attention toute particuliè­re à la montée en compétence­s de nos salariés portés. C’est pourquoi nous leur proposons l’élaboratio­n de bilans de compétence­s, des séances de coaching ainsi que de très nombreux ateliers.”

“Le portage salarial est un levier de négociatio­n pour décrocher une mission parce qu’il offre de la flexibilit­é : le contrat peut être facilement prolongé ou raccourci si besoin est”

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Le portage salarial offre de la sécurité : pour le porté au travers des droits aux indemnités chômage en cas d’interrupti­on de la mission, et pour l’entreprise qui limite le risque de requalific­ation en contrat de travail.” Daniel...
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ITG.
“Quand on vient du salariat, on ne pense pas à tout ce qu’un indépendan­t doit inclure dans le prix de la prestation en termes de temps de prospectio­n, de préparatio­n, de développem­ent personnel ou encore de charges.” Radhia Amirat, ITG.
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“La structure des entreprise­s évolue de plus en plus vers le travail en ‘mode mission’ : elles ont besoin de monter des équipes pour des durées déterminée­s qui se dissolvent une fois le projet achevé.” Claude Tempé, Freelance.com.

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