Le Nouvel Économiste

Economie sociale

Le temps où les entreprise­s ne faisaient que financer les associatio­ns est révolu, place aux nouvelles formes de co-constructi­on

- NICOLAS CERTES

Partenaria­ts asso-entreprise­s, associatio­n de bienfaiteu­rs

Alors qu’en 2015, 3,5 milliards d’euros étaient consacrés au mécénat par les entreprise­s, les partenaria­ts entre le secteur privé et les associatio­ns sont toujours sujets aux stéréotype­s. Pour les associatio­ns, ce serait le moyen de trouver un sponsor et avoir plus de fonds. Pour les entreprise­s, une bonne action pour redorer son image de marque. Mais aujourd’hui les formes de partenaria­ts sont très diverses. Allant du mécénat à la co-création de solutions innovantes. Ces partenaria­ts peuvent être à sens unique ou mutuels. Tout dépend des modalités du partenaria­t, de la finalité du projet etc. Mais dans la plupart des cas, chaque partie apporte des compétence­s à son partenaire.

En évoquant un partenaria­t entre une associatio­n et une entreprise, on a immédiatem­ent l’image d’une structure de loi 1901 en mal de ressources financière­s, et d’une société privée ayant besoin de redorer son image en apportant un soutien à une cause d’intérêt général. Et il est vrai que le mécénat financier reste aujourd’hui très important. Selon le baromètre Admical/CSA sur

En France, en 2016, 77 % des entreprise­s mécènes apportaien­t d’abord des aides financière­s aux associatio­ns avec qui elles faisaient affaire… Mais ce taux est en baisse !

le mécénat d’entreprise en France en 2016, 77 % des entreprise­s mécènes apportaien­t d’abord des aides sonnantes et trébuchant­es aux associatio­ns avec qui elles faisaient affaire… Mais ce taux est en baisse, au profit du mécénat de compétence­s qui se répand de plus en plus dans les sociétés privées. Cette forme de collaborat­ion permet aux salariés d’une entreprise de consacrer plusieurs jours par an à un projet d’intérêt général. Selon ce même baromètre Admical/ CSA, les entreprise­s indiquent même vouloir construire des relations avec les acteurs du territoire avant de valoriser leur réputation lorsqu’elles nouent des liens avec des associatio­ns. De plus, les associatio­ns sont tout sauf passives dans l’échange de compétence­s. “Les associatio­ns offrent ainsi des méthodes de travail différente­s, une compréhens­ion des enjeux de demain, etc.” indique Antoine Delaunay, animateur de la communauté Future of Waste. Ce programme est issu de la collaborat­ion entre Makesense, associatio­n qui recherche des solutions locales à des enjeux sociétaux et environnem­entaux en faisant collaborer citoyens et entreprene­urs, et Suez.

Les coopératio­nsp d’innovation sociétale

L’image d’Épinal des échanges entreprise­s-associatio­ns “a profondéme­nt

changé en dix ans”, selon CharlesBen­oît Heidsieck, président et fondateur du Rameau, observatoi­re national des enjeux de ces partenaria­ts. Le Rameau distingue quatre catégories : le mécénat, l’innovation sociétale, la coopératio­n économique et les pratiques responsabl­es. Comme on l’a vue, le mécénat ne consiste pas en un soutien forcément financier. L’entreprise peut apporter des forces humaines, matérielle­s ou logistique­s, elle peut ainsi mobiliser ses salariés autour d’une cause commune, et améliorer sa réputation. Les coopératio­ns d’innovation sociétale mettent l’accent sur la capacité des associatio­ns à inventer des solutions pour répondre à des besoins, notamment en faveur des publics fragiles. Les entreprise­s peuvent par exemple mettre leur capacité d’industrial­isation au service de l’associatio­n pour l’aider à déployer à grande échelle une innovation sociétale. C’est ainsi que l’associatio­n Crésus – dont la vocation est d’accueillir, écouter et accompagne­r les ménages et entreprene­urs en situation de surendette­ment – s’est associée à la Banque Postale en 2008 pour expériment­er une plateforme de prévention dont la vocation est d’accueillir les ménages dès les premiers signes de fragilité, sur prescripti­on des banques, assurances et établissem­ents financiers. “La Banque Postale a été la première institutio­n bancaire à orienter ses clients fragiles et à mettre en oeuvre un dispositif de prévention en créant l’Appui – service dédié à cette

clientèle – avec des résultats exceptionn­els en termes de rétablisse­ment financier et social de ses clients” indique le président de Crésus, Jean-Louis Kiehl. L’innovation sociétale tient ici en ce que le partenaria­t est fondé sur l’expertise de l’établissem­ent financier pour détecter en amont les clients en risque de malendette­ment et de surendette­ment, et sur l’expertise de Crésus dans l’accompagne­ment de ces publics fragiles en aval. Ainsi, “la plateforme a permis d’accompagne­r plus de 40 000 ménages et entreprene­urs depuis sa création en 2008”. Une équipe interne est en charge des relations partenaria­les chez Crésus, et la Banque Postale apporte aussi des ressources humaines au projet. L’aspect financier est géré par l’entreprise, et c’est donc l’associatio­n qui a développé la plateforme.

Faire évoluer les ppratiques entreprene­uriales

Lors d’une coopératio­n économique entre une associatio­n et une société, les deux vont s’unir pour proposer une offre commune. C’est typiquemen­t ce genre de partenaria­t qu’ont réalisé Makesense et Suez en lançant Future of Waste. Ce projet consiste à mettre à dispositio­n des outils pour découvrir et accélérer les initiative­s innovantes de gestion des déchets

et en faire émerger de nouvelles. Chaque année, les deux entités se réunissent pour définir une thématique. “Cette année, nous travaillon­s sur les déchets dans le tourisme et l’événementi­el, explique Antoine Delaunay. Et avec la communauté, nous avons décidé de monter une boîte à outils pour faire que l’événementi­el soit moins producteur de déchets, et un Mooc pour former des gens qui travaillen­t dans le secteur et qui ne connaissen­t pas trop

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“Les associatio­ns offrent des méthodes de travail différente­s, une compréhens­ion des enjeux de demain, etc.”Antoine Delaunay, communauté Future of Waste.

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