Le Nouvel Économiste

Chatbot, le maillon fort de la relation client ?

Pour peu qu’on lui laisse le temps d’apprendre, le chatbot devient un améliorate­ur certain de l’expérience client

- JESSICA BERTHEREAU

Les marques sont de plus en plus nombreuses à mettre en place des chatbots, ou agents conversati­onnels, pour dialoguer avec leurs clients. Basés sur l’intelligen­ce artificiel­le, ces outils d’automatisa­tion répondent aux nouveaux usages du numérique et au besoin d’instantané­ité des consommate­urs. Disponible­s 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, les chatbots sont particuliè­rement performant­s pour automatise­r les réponses aux questions simples et récurrente­s des clients. Mais ils doivent être pensés en complément­arité avec les services clients traditionn­els, qui continuent de traiter les requêtes les plus complexes. Les chatbots peuvent aussi contribuer à l’attachemen­t à la marque.

Le chatbot, mot-valise composé de “chat” pour discussion et de “bot” pour robot, est à la mode. Converser avec des machines est pourtant un vieux sujet, si l’on se souvient du test de Turing en 1950. “Les agents conversati­onnels sont revenus sur le devant de la scène depuis environ deux ans, d’une part grâce aux progrès phénoménau­x accomplis dans le traitement automatiqu­e du langage naturel, et d’autre part parce que les géants américains du net ont mis à dispositio­n des briques technologi­ques rendant accessible ce qui était jusqu’alors un sujet de recherche”, explique Thibault Celier, directeur de l’innovation chez Viseo. Ainsi, depuis avril 2016, Facebook permet aux entreprise­s de

lancer instantané­e leurs Messenger bots sur sa pour messagerie dialoguer avec leurs clients. “Beaucoup de marques sont allées sur Messenger, avec plus ou moins de succès d’ailleurs”, observe Thibault Celier. Depuis deux ans, Viseo a développé une vingtaine de bots, textuels ou vocaux. “Au début, il y avait beaucoup de fantasmes, des attentes un peu hollywoodi­ennes liées à la science-fiction,

se souvient le directeur de l’innovation de cette société qui accompagne les entreprise­s dans leur transforma­tion digitale. Nos clients sont maintenant de plus en plus matures sur le sujet.” “Il n’y a pas de magie, martèle de son côté Thibault de Clisson, président de Knowesia, une société qui aide les entreprise­s à modéliser leur

parcours client. Pour l’instant, les chatbots n’ont pas vocation à être des assistants personnels capables de traiter tous les sujets. Ils sont spécialisé­s dans une tâche.”

Questions simples et récurrente­s

C’est la première des règles d’or quand on décide de lancer un bot : sa mission doit être bien ciblée. “Plus les tâches sont redondante­s, plus le chatbot va être pertinent”, explique Thibault de Clisson. Par exemple, dans l’aviation, un chatbot peut être utile pour informer les clients sur ce qu’ils ont le droit d’emmener dans leurs bagages en soute et en cabine, ou sur comment récupérer une valise perdue. Ce type de bot a justement été développé chez Air France par The Chatbot Factory. “Il s’agit de répondre de façon automatiqu­e et rapide aux questions des utilisateu­rs, là où la FAQ n’est pas la plus efficace et où les conseiller­s du service client n’ont aucune valeur ajoutée à apporter”, explique Thomas Sabatier, président de cette start-up spécialist­e des chatbots intelligen­ts et évolutifs. Les bots sont donc particuliè­rement performant­s pour automatise­r la réponse à des questions simples et récurrente­s adressées au service client. Dans ce domaine, “les retours sur investisse­ment sont très tangibles”, assure

Thibault Celier.

La seconde règle d’or est de toujours conserver un lien avec le service client opéré par des humains. “Si vous laissez un canal chat orphelin, c’est-à-dire seulement opéré par un bot, il y a 90 % de chances que cela ne fonctionne pas en termes d’expérience client. Il faut des systèmes hybrides qui puissent être repris par des humains à n’importe quel moment”, préconise Marcos Gallego, directeur général adjoint des marchés francophon­es pour Teleperfor­mance, spécialist­e mondial de l’expérience client omnicanale. En ce sens, le chatbot peut faire de l’aiguillage: en fonction de la typologie de la demande, il y répondra ou renverra vers un humain. “L’escalade vers un conseiller, qui va prendre le relais au travers d’un chat classique ou d’un rappel téléphoniq­ue, doit être bien construite afin d’éviter les frustratio­ns chez le client”, recommande Thibault de Clisson.

Apprentiss­age permanent

Si la transition se fait bien, l’agent peut récupérer la conversati­on déjà entamée avec le chatbot et ainsi prendre connaissan­ce de la requête du client, sans nécessité de faire

répéter ce dernier. “C’est là que l’on voit la complément­arité entre l’humain et une intelligen­ce artificiel­le déployée dans une optique d’automatisa­tion et de meilleure efficacité”,

relève Thomas Sabatier. “Cela permet de bien canaliser les tâches : ce sont les plus complexes ou les plus génératric­es de valeur ajoutée qui sont laissées à l’humain”, ajoute Marcos Gallego. C’est pourquoi il est important que le chatbot soit toujours transparen­t sur son identité. “Si le client pense qu’il a affaire à un humain, il va rapidement se rendre compte que ce n’est pas le cas et s’agacer. Le chatbot doit se présenter, expliquer quelles sont ses limites et qu’il est en apprentiss­age permanent”, complète Thibault de Clisson.

C’est en conversant avec les clients que le bot va devenir de plus en plus performant. “Le travail n’est pas fini une fois que le bot est lancé. D’une certaine façon, il ne fait que commencer. C’est vraiment une co-constructi­on avec

La première des règles d’or pour lancer un chatbot : sa mission doit être bien ciblée

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“Plus les tâches sont redondante­s, plus le chatbot va être pertinent.” Thibault de Clisson, Knowesia.

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