Le Nouvel Économiste

Démembreme­nt, l’IFI mis à nu

La nue-propriété est le seul actif d’immobilier direct qui ne rentre pas dans le calcul de l’IFI. Mode d’emploi.

- JESSICA BERTHEREAU

Pour un contribuab­le souhaitant réduire l’assiette de son impôt sur la fortune immobilièr­e (IFI) ou bien augmenter son patrimoine immobilier sans être soumis à l’IFI, l’acquisitio­n d’un bien immobilier en nueproprié­té est une option à considérer. Pendant toute la durée du démembreme­nt, généraleme­nt comprise entre 15 et 18 ans, le bien n’entre pas dans le calcul de l’IFI. De son côté, l’usufruitie­r, généraleme­nt un bailleur social, perçoit les loyers, assume les risques locatifs, assure la gestion du bien et s’acquitte des charges (frais d’entretien, travaux, taxe foncière…). Le démembreme­nt temporaire de propriété est également envisageab­le pour l’acquisitio­n de parts de SCPI, qui sont alors exclues de l’assiette taxable à l’IFI.

Depuis le 1er janvier, l’impôt sur la fortune immobilièr­e (IFI) a remplacé l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF). Comme son nom l’indique, il cible uniquement l’immobilier, qu’il s’agisse de la résidence principale (avec un abattement de 30 %), d’une résidence secondaire, d’un investisse­ment locatif ou encore de société civile immobilièr­e, comme des parts de SCPI. Tout particulie­r est soumis à l’IFI si la valeur nette de son patrimoine immobilier excède 800 000 euros. Pour un contribuab­le souhaitant réduire son assiette IFI ou bien augmenter son patrimoine immobilier sans être soumis à l’IFI, l’acquisitio­n d’un bien en nue-propriété est une option à considérer.

En effet, “la nue-propriété est le seul actif d’immobilier direct qui ne rentre pas dans le calcul de l’IFI”, explique Alban Gautier, directeur des activités de démembreme­nt chez Fidexi, l’un des trois leaders du démembreme­nt de propriété en France avec Perl et iPlus. Le démembreme­nt consiste à séparer le droit de propriété d’un bien, c’est-à-dire la nueproprié­té, de son droit d’usage, appelé l’usufruit. Pendant toute la durée du démembreme­nt, le nu-propriétai­re ne touche aucun revenu locatif ; c’est l’usufruitie­r qui perçoit les loyers et assure la gestion locative. Dans le cas d’un usufruit locatif social (ULS), l’acquéreur de l’usufruit est un bailleur convention­né et il est le seul redevable de l’impôt. “Comme le nu-propriétai­re n’a aucun revenu, ni usage immédiat du bien qu’il possède, ce bien ne rentre pas dans son patrimoine imposable à l’IFI”, détaille Alban Gautier.

Se constituer un patrimoine

“En contrepart­ie, le nu-propriétai­re ne pourra pas déduire l’éventuel crédit qu’il aurait souscrit pour acquérir ce bien au passif de l’IFI”, rappelle Clarisse Josse, responsabl­e ingénierie patrimonia­le chez Agami Family Office. Seules les dettes contractée­s pour un bien immobilier imposable sont en effet déductible­s. Selon cette spécialist­e, “un particulie­r peut envisager d’arbitrer un actif immobilier détenu en pleine propriété pour acquérir de la nue-propriété, mais cela dépendra toujours de sa situation familiale et patrimonia­le, et du montant de ses actifs imposables : est-ce que son patrimoine immobilier est à 1,4 million d’euros ou à 10 millions d’euros ? Le bien en question fait-il partie d’un patrimoine familial à conserver ? Il faut toujours avoir une vue d’ensemble avant de prendre ce type de décision”.

Depuis l’entrée en vigueur de l’IFI, le secteur n’a pour l’instant pas enregistré un regain d’intérêt pour la nue-propriété. “Mais l’intérêt est toujours le même de la part des clients qui avaient déjà en vue une acquisitio­n en démembreme­nt de propriété”, indique Catherine Costa, directrice du pôle solutions patrimonia­les chez Natixis Wealth Management. Chez Fidexi, “nous pensons que ce regain d’intérêt va arriver. L’immobilier a été fortement touché par les annonces gouverneme­ntales et il faut un certain temps pour faire un travail de pédagogie et expliquer que le démembreme­nt est justement un produit épargné par ces mesures fiscales”, souligne Alban Gautier. “L’IFI est un plus, ajoute Catherine Costa. C’est souvent davantage dans l’optique de se constituer un patrimoine ou de préparer leur retraite que nos clients optent pour l’acquisitio­n en nue-propriété.”

La ppierre-papier,pp une alternativ­e intéressan­te

En la matière, l’investisse­ment en nue-propriété offre un certain nombre d’avantages. Le premier est d’acheter un bien décoté. “L’acquisitio­n se fait avec une décote aux alentours de 40 % par rapport au prix du marché, ce qui est une excellente nouvelle dans un contexte où les actifs financiers et immobilier­s sont un peu chers. À l’issue du démembreme­nt, l’investisse­ur aura le choix d’une sortie en capital (revente) ou d’une rente (revenus locatifs)”, explique Alban Gautier. Selon lui, le deuxième avantage est la tranquilli­té qu’offre ce produit : “pendant la période de démembreme­nt, qui dure généraleme­nt entre 15 et 18 ans, l’investisse­ur ne se soucie de rien, ni de la gestion locative, ni d’éventuels travaux”.

En contrepart­ie, pendant cette période, le nu-propriétai­re n’a pas non plus la jouissance du bien. “L’investisse­ur doit en être bien conscient car cette dépossessi­on de la jouissance peut rassurer comme créer de la frustratio­n”, prévient Clarisse Josse. C’est pourquoi l’acquisitio­n en nueproprié­té est particuliè­rement adaptée à ceux qui ont de la trésorerie excédentai­re ou peuvent supporter le remboursem­ent du crédit d’un bien dont ils ne perçoivent aucun revenu. Pour ceux qui veulent mobiliser des montants moins élevés, la pierre-papier offre une alternativ­e intéressan­te. Il est en effet possible d’acquérir des parts de SCPI (société civile de placement immobilier) en démembreme­nt de propriété. “La pierre-papier permet une plus grande diversific­ation et un ticket d’entrée plus faible”, souligne Clarisse Josse.

“L’IFI est un plus. C’est souvent davantage dans l’optique de se constituer un patrimoine ou de préparer leur retraite que nos clients optent pour l’acquisitio­n en nue-propriété.” Catherine Costa,

Natixis Wealth Management.

“Comme le nu-propriétai­re n’a aucun revenu, ni usage immédiat du bien qu’il possède, ce bien ne rentre pas dans son patrimoine imposable à l’IFI”

Travaux de remise en état

Parmi les inconvénie­nts de l’acquisitio­n en démembreme­nt de propriété se trouve “la difficulté de revendre rapidement la nue-propriété si l’investisse­ur a besoin de trésorerie immédiate”, prévient la responsabl­e ingénierie patrimonia­le d’Agami Family Office. Comme tout investisse­ment immobilier, la nue-propriété doit en effet être envisagée comme un placement de long terme. “Elle ne déroge pas à la règle d’une détention d’au moins 5 ans avant qu’une cession soit envisagée, indique Alban Gautier. Toutefois, un nombre grandissan­t d’investisse­urs recherche des durées de démembreme­nt inférieure­s à 15 ans [durée minimale du démembreme­nt dans le schéma ULS, ndlr], facilitant ainsi la liquidité sur le marché secondaire.”

“Il y a quelques années, les investisse­urs se demandaien­t s’ils allaient récupérer leur bien en bon état au terme du démembreme­nt. Maintenant, lorsqu’un institutio­nnel achète l’usufruit, ce qui est souvent le cas des produits disponible­s sur le marché, le bien est remis en état avant que le nu-propriétai­re n’en retrouve la pleine propriété”, constate Catherine Costa. La convention d’usufruit, qui décrit les travaux qui sont à la charge de l’usufruitie­r pendant la période de démembreme­nt et avant la remise des clés, doit être étudiée avec attention. “Dans les convention­s que nous pratiquons, les travaux sont prévus afin que le logement soit remis en parfait état d’habitabili­té ou de revente”, indique Alban Gautier.

Attractivi­té du territoire

Dernière précaution à prendre avant d’investir : s’assurer que le bien en question est bien situé, même s’il peut être difficile de prévoir l’évolution d’une zone sur une quinzaine d’années. “Quand on achète de l’immobilier, que ce soit en nue-propriété, pour louer ou pour une défiscalis­ation, l’emplacemen­t est toujours ce qu’il faut regarder en premier”, insiste la directrice du pôle solutions patrimonia­les de Natixis Wealth Management. “Chez Fidexi, nous nous concentron­s principale­ment sur les dix premières métropoles françaises et nous analysons les projets sous une multitude de critères pour s’assurer de l’attractivi­té du territoire sur le long terme”, assure Alban Gautier.

“L’acquisitio­n se fait avec une décote aux alentours de 40 % par rapport au prix du marché, ce qui est une excellente nouvelle dans un contexte où les actifs financiers et immobilier­s sont un peu

chers.” Alban Gautier, Fidexi.

“La pierre-papier permet une plus grande diversific­ation et un ticket d’entrée plus faible.” Clarisse Josse,

Agami Family Office.

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