Comment naissent les arômes du rhum
Quand le terroir, la technique et la main de l’homme créent les saveurs
Historiquement, la zone Caraïbe-Amérique latine, où est né le rhum au XVIe siècle, était divisée en trois grandes zones d’influence. Aujourd’hui encore, ces traditions et ces savoir-faire ancestraux influent sur le goût du rhum
Comment un distillat de jus de canne ou de mélasse sortant de sa colonne ou de son alambic entre 65 et 95° d’alcool, peut-il offrir à la dégustation des arômes aussi variés que celui des fleurs blanches, du caramel, ou des fruits exotiques, le tout sans adjonction d’éléments exogènes (selon la définition européenne du rhum) ? De multiples facteurs naturels, tels que le terroir ou la variété de canne, techniques, comme le type d’appareil de distillation, ou le savoir-faire du maître de chai en matière de vieillissement et d’assemblage, viennent donner aux rhums leurs profils aromatiques et leur identité. Autant d’éléments de choix que l’on retrouve ensuite à la dégustation d’un rhum pur.
D’où viennent les arômes et les goûts du rhum ? Ces notes de caramel, de vanille, de fruits exotiques ou de fleurs blanches viennent bien sûr des fruits et des épices qu’on y ajoute lorsqu’il s’agit de rhums arrangés ou épicés. Mais dans le rhum blanc ou vieilli dégusté pur, qu’en est-il ? La réponse à cette question qui taraude tous les amateurs est complexe, car la personnalité d’un rhum blanc est dictée par des facteurs aussi variés que l’aire culturelle d’où il provient, la variété de canne ou le terroir dont elle est issue, la matière première (jus de canne ou mélasse), les levures utilisées lors de la fermentation, le type d’appareil de distillation, la méthode de distillation, le temps de maturation… Ce à quoi il faut ajouter pour les rhums vieillis, le type de barrique, la chauffe qu’elle a subi, sa taille, le fait qu’elle ait reçu auparavant ou non un autre alcool, le temps de vieillissement, le climat qui entourait le chai de vieillissement, l’assemblage pratiqué entre les lots… Le rhum représente un monde dont la diversité ne cesse de ravir les amateurs.
L’influence du terroir et de la canne
La personnalité d’un rhum se définit d’abord par l’aire culturelle où il a été produit. Historiquement, la zone Caraïbe-Amérique latine, où est né le rhum au XVIe siècle, était divisée en trois grandes zones d’influence. Aujourd’hui encore, ces traditions et ces savoir-faire ancestraux influent sur le goût du rhum. “Les rhums ‘français’ sont plutôt vifs et complexes, ceux de typicité espagnole sont légers et aromatiques. Tandis que ceux de typicité anglo-saxonne trouvent un juste milieu, et sont vifs et aromatiques, décrit Jérôme Ardès, ambassadeur de marques chez Dugas (plus de 40 rhums en portefeuille). Même s’il y a des exceptions dans chaque typicité.” Il faut ensuite savoir si le rhum est issu de la distillation du jus de canne, on l’appelle alors
“agricole” en France, de mélasse (c’est alors un rhum de distillerie ou de sucrerie), de sirop ou de miel de canne.
Pour résumer, les rhums issus de jus de cannes fraîches broyées et transformées en vin de canne, les rhums agricoles, auront des notes végétales. Les rhums de mélasse (le sirop très foncé qui s’écoule après la cristallisation du sucre) auront quant à eux des arômes caramélisés. Issu de la chauffe continue du jus de première presse de canne, le miel ou sirop de canne est utilisé dans cinq pays : Venezuela (Diplomatico), Pérou, Paraguay (Fortin), Guatemala (Botran ou Zacapa…), Cuba (Conte de Cuba), et il a pour colonne vertébrale des arômes pâtissiers. Qu’ils soient agricoles, de miel ou de sucrerie, ces rhums pourront voir leur profil aromatique différer selon la variété de canne utilisée et le terroir où elle a poussé. “Il y a une quinzaine de variétés éligibles dans l’AOC Martinique, dont la canne paille ou or, la canne bleue utilisée par certains opérateurs, et chacune donne une personnalité différente au rhum, explique Cyrille Lawson, directeur commercial des rhums HSE. La même canne ne donnera pas les mêmes caractéristiques en fonction du sol où elle a poussé, autour de la montagne Pelée avec son sol volcanique, sur les terres alluvionnaires du centre au nord, sur le sol argileux du sud, ou calcaire et sec de l’extrême sud.” Sans oublier non